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Lettre au Premier Ministre

Arles, le 27 août 2001

M. Lionel Jospin
Premier ministre
Monsieur le Premier ministre,

Comme vous le savez, et comme nous l'avons rappelé à votre directeur de cabinet, M Olivier Schrameck, lors de notre rencontre du 6 juin dernier, la mise en place de la taxe Tobin en Europe constitue l'une des revendications prioritaires d'Attac. Elle a fait l'objet de rapports favorables de la commission des finances de l'Assemblée nationale et du Conseil économique et social. La délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée avait, malheureusement en vain, demandé que cette taxe figure dans le programme de la présidence française de l'Union du second semestre 2000.

Il se trouve qu'une occasion se présente de faire avancer cette idée au plan européen avec la décision de la présidence belge de l'inscrire à son programme de travail. Et l'échéance est maintenant très proche, puisque le conseil Ecofin doit l'examiner lors de sa réunion de Liège à la fin septembre. La position de votre gouvernement sur ce sujet est très attendue dans plusieurs pays membres - où des associations Attac extrêmement actives mobilisent l'opinion, les élus et leur gouvernement -, mais surtout en France où la taxe Tobin bénéficie d'un soutien très majoritaire de l'opinion et a reçu l'appui de personnalités politiques dépassant largement le cadre de votre majorité parlementaire.

A ce jour, le ministre le plus directement concerné, M. Laurent Fabius, n'a pas cru devoir modifier la position hostile qu'il avait affichée en août dernier, en s'appuyant sur un rapport de ses services du ministère de l'économie et des finances. Attac avait, en son temps, réfuté tous les arguments prétendument techniques mis en avant dans ce rapport, et montré que le seul blocage réel était politique. Depuis, différents travaux ont confirmé le bien fondé de cette analyse.

Pour tenter d'occulter ce caractère uniquement politique de son opposition, M. Fabius vient de lancer dans la presse une opération de diversion en proposant, en lieu et place de la taxe Tobin, la taxation internationale des exportations d'armes. Attac ne saurait contester l'intérêt de cette mesure : pour être très ancienne - elle a, dans le passé, fait l'objet de plusieurs propositions de loi -, elle reste parfaitement pertinente. Mais l'exhumer à seulement quelques semaines du conseil Ecofin - où c'est un autre sujet qui est à l'ordre du jour - apparaît comme une manoeuvre dont personne n'est dupe.

C'est pourquoi, au nom du conseil d'administration d'Attac, et afin de vous exposer les raisons qui militent pour une prise de position ferme du gouvernement en faveur de la taxe Tobin, j'ai l'honneur de solliciter une audience de votre part, et ce dans les meilleurs délais compatibles avec vos engagements, que je sais écrasants. Pour garder tout son sens, cette audience devrait avoir lieu avant les arbitrages que vous rendrez en amont du conseil Ecofin. Nous avons, en effet, prévu une importante campagne de sensibilisation et d'action, en France et en Europe, pendant le week-end du 22-23 septembre, et son contenu sera largement fonction de la position du gouvernement.

Pour éclairer votre décision, Attac va organiser, début septembre, un séminaire sur la faisabilité technique de la taxe Tobin. Nous réunirons à cet effet quelques uns de nos spécialistes de cette question. Dans la mesure où ils répondront point par point aux objections soulevées par les experts du ministère de l'économie et des finances auteurs du rapport d'août 2000, il nous paraît indispensable que ces derniers soient également présents. Nous ne doutons pas, en effet, de leur réceptivité à des arguments auxquels ils n'avaient pas songé, et tout nous conduit à penser qu'ils seront convaincus par les mesures que nous leur proposerons. Je vous serais donc très reconnaissant de bien vouloir demander à M. Fabius de donner les instructions nécessaires à ses collaborateurs.

En vous remerciant par avance du bon accueil que vous voudrez bien réserver à mes requêtes, je vous prie, Monsieur le Premier ministre, de croire à l'assurance de ma haute considération.

Bernard Cassen
Président d'Attac France

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30/08/01