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Coup de sang !
Date: 18 Feb 1998
From: ratus@ALTERN.ORG
To: antenneassedic@internatif.org
Quand je lis les contributions diverses des abonnés à l'antenne assedic, j'ai l'impression d'être revenu aux meilleures années de ma jeunesse militante, à l'époque ou je portais un grand A entouré dans le dos de mon treillis sale et ou mes lectures se résumaient à l'intégrale en 5 volumes de Daniel Guérin "anthologie de l'anarchisme" (petite collection maspéro), Proudhon, Sorel, Bakounine, Kropotkine et autres fondateurs du mouvement anar. Serieusement, j'y vois la même chose, mais aujourd'hui, cela ne fait pas du tout rire. Non pas que je sois devenu un petit bourgeois tranquillement assis dans mon fauteuil de fonctionnaire à vie et ayant renié le bel engouement idéologique des années étudiantes Non pas que je me sois résigné à la "mondialisation", à la "pensée unique", et aux thèses pronées par les tenants de l'ultra libéralisme; Non pas que j'ai pris ma carte au Parti Socialiste; Mais parce qu'il commence à régner sur l'antenneassedic un espece de consensus idéologique autour duquel chacun fait de son mieux pour surrencherir, en une sorte de compétition à qui fera le plus en matière de mieux disant révolutionnaire. Bref, ça commence à sentir l'avant garde éclairée, celle qui a toujours raison et qui n'hésite pas à fusiller ses contradicteurs dés lors qu'ils ne souscrivent pas au bonheur futur dont ils se veulent les théoriciens et les maîtres d'oeuvre. Ce consensus est le suivant: D'abord il nous faut des ennemis: Etat = vérole Capitalisme = la bête immonde à abattre Travail= exploitation et les quelques droitiers du Club Internet qui servent d'épouvantails (pour nous rappeler que l'ennemi existe et que sa stupidité est virtuellement palpable) Ensuite des revendications: Revenu = Droit A ce rythme de dérive idéologique, les chômeurs au nom duquel les actions sont menées risquent de ne plus vraiement comprendre ou on veut les attirer, et au nom de quel fantasme de Grand Soir certains parlent en leur nom. La grande majorité d'entre eux cherchent surtout à travailler: pour subvenir à des besoins matériels et en finir avec la précarité bien sûr, mais aussi parce que le travail est une source de satisfaction autre que purement materielle. Parce que travailler, c'est construire et c'est se libérer, c'est faire quelque chose de sa carcasse en plus que le minimum physiologique au même titre que l'éducation, la culture, les loisirs ou le sport. Le travail est en soi positif et libérateur et ce n'est pas parce cette idée figurait à l'entrée d'Auschwitz qu'elle est en soi fausse. L'existence du lien de subordination patron/salarié est quelque chose de vraiement secondaire qui relève plus du combat syndical dans l'entreprise, de l'affrontement juridique contre l'employeur. Et ce combat interne à l'entreprise participe aussi à l'élévation de l'individu dés lors que la cause est juste et que la loi lui donne raison. Demandez donc aux salariées de Maryflo ce qu'elles en pensent... Alors quoi ? un revenu d'existence ? pour les chômeurs ? pour tout le monde ? Arrêtons de jouer les crétins avec ce sujet: Non seulement les choses sont un peu plus compliquées que certains l'imaginent en solutionnant le problème par une taxe sur la fortune (lesquelles ? des noms ? combien ? quelles mesures pour empêcher la fuite des capitaux ?) mais on frôle ici, soit l' absurdité totale, soit la naïveté absolue. Une absurdité parce les chômeurs se sont battus et se battent pour justement ne plus être des chômeurs et que leur attribuer un revenu d'existence, ce serait finalement tirer un trait définitif sur leur existence: Les actifs se diviseraient entre ceux qui travaillent et ont un salaire et ceux qui n'ont pas de travail et bénéficieraient du Revenu d'existence. Avec ce genre de mesure, on enfermerait les chômeurs dans une espece de statut de « sous actif ». Comme les Corses dont on a cru que le robinet à subventions pouvait faire office d'extincteur. Ou pire encore, comme ces indiens d'Amérique, cloitrés dans des reserves et poussés par l'état fédéral vers un état d' assistance totale afin de mieux contrôler leur dégénérescence. De ce généreux élan émane enfin une naïveté qui semble directement sortie des comtemplations de l'ami Rousseau Jean Jacques et à laquelle on opposerait bien la lecture du cynique Thomas Hobbes. Comment serieusement imaginer que les bénéficiaires se contenteront d'un revenu minimum, quand d' autres, bénéficieront à leurs côtés d'un travail et d'un revenu plusieurs fois supérieur ? comment ne pas imaginer le développement du travail au noir qui risque de découler d'une telle mesure ? Des petits « blacks » bien organisés qui seront pris en charge par des malins mieux organisés encore, déstabilisant les entreprises ordinaires qui ne pourront résister à une telle conccurence et se mettront à leur tour à licencier leur personnel, qui rejoindra la cohorte déjà nombreuse de ceux qui n'ont plus de travail, lesquels ne pourront finalement à leur tour rester inactifs et accepteront n 'importe quel job au noir, etc...On arrive ici à une déréglementation totale du marché du travail, à l'application de la loi du plus fort sur un marché ou le déséquilibre au profit des employeurs est déjà flagrant. Alors la solution ? détruire le capitalisme et l 'état bourgeois ? en caricaturant à peine, l'idée revient souvent dans ce « courrier des lecteurs » . Facile. Arrêtons de parler et armons nous, mettons le pays à feu et à sang jusqu'à la destruction ultime de ce capitalisme honni et à l' issu duquel une nouvelle société plus juste, plus etc.... On a déjà entendu ce discours pueril depuis des années et il n'a su généré que du sang, des pseudos élites incapables, prétentieuses et théorisantes. Je ne suis pas sûr que les chômeurs soient prêts à jouer à la guerre civile pour quelques hallucinnés dont le plus grand regret semble finalement de ne pas avoir vécu certaines journées chaudes de 1968 ou de 1986. Mon idée, et elle n'engage que moi, est que l'antenne assedic n'a pas interêt, si elle souhaite maintenir une certaine mobilisation et une certaine cohérence, à laisser les discours dériver vers une logique d' affrontement idéologique vers laquelle la poussent des professionnels de l' agitprop et du noyautage. A ne pas laisser le discours être monopolisé par des apparatchicks qui parlent au nom du peuple ouvrier en faisant la révolution via SFR et n'ont jamais mis les mains dans le cambouis, ou des syndicats menant un double jeu curieux. A continuer les actions réellement utiles (occupations EDF, Assedic, Huissiers). Et surtout, à sortir des slogans faciles pour proposer quelque chose de solide: l'environnement du travail et de la formation professionnelle peuvent être réformés dans ce pays sans que les questions de coût financier soient opposés comme une objection irréfutable. Voila, maintenant vous pouvez vous défouler, je vous laisse mes coordonnées. ratus@altern.org Et j'accepte toutes contributions sur mon site http://altern.org/ratus/index.htm
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