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1) Finance et production capitalistes Il existe une interdépendance complexe entre la production et la finance capitalistes. Ces deux sphères sont liées entre elles de façon structurelle, mais leurs relations se modifient sans cesse, au cours de l’histoire du capitalisme, et diffèrent selon les pays et les conjonctures. L’économie capitaliste de production ne peut se passer de la sphère financière .Les entrepreneurs ont besoin d’avancer des fonds pour investir, payer les salaires des travailleurs productifs et les services de commercialisation , recherche, etc. Ces fonds sont fournis par le crédit, crédit bancaire ou obligations, et/ou par des émissions d’actions par les sociétés cotées en Bourse. Cela dépend de la structure du capital des entreprises, et du mode de financement dominant dans les différents pays. Réciproquement, la finance, quelles que soient ses formes, ne peut pas non plus se passer de l’économie de production, où se créent les valeurs économiques, et les revenus de base dont elle tire sa propre rémunération- intérêts, dividendes, commissions ainsi que les gains de la spéculation sur la valeur de marché des actifs financiers. Ces revenus financiers sont parfois considérés comme une rente prélevée par les possesseurs d’argent sur les revenus de base de l’activité économique, profits et salaires . Chacune de ces deux sphères capitalistes a ses propres formes d’instabilité : cycle économique (croissance/ récession et chômage) , mouvements financiers à la hausse et à la baisse des Bourses, des taux d’intérêt, des monnaies nationales . Ces fluctuations sont inévitables . Leur connexion s’opère notamment dans des crises, plus ou moins fortes - stagnation, récessions, dépressions . On a pu observer en 1997-1998, ce qui a été perçu comme la première crise de la « mondialisation » financière. La crise monétaire et financière qui a éclaté en Thaïlande, et s’est étendue en Asie du sud-est, puis a touché la Russie et le Brésil, s’est traduite par des récessions économiques dans ces pays. L’onde de choc a affecté les Bourses occidentales, mais de façon brève, et sans effet immédiat sur la croissance et l’emploi. Il y a donc eu dans cette crise, une double déconnexion, entre pays riches occidentaux et pays dépendants, et, dans les pays riches, entre sphère financière et sphère productive. Mais les cercles dirigeants occidentaux ont redouté une crise mondiale « systémique » de la finance, qui se conjuguerait, comme dans les années 1930, avec une crise économique internationale. La surproduction dans certains secteurs économiques, automobiles, semi-conducteurs- et la baisse des prix de gros et des prix des matières premières, ont fait craindre une crise générale de « déflation » . La lutte pour les marchés et les profits est devenue une hyper-concurrence, donnant lieu à une énorme concentration des entreprises . Autre source d’inquiétude, la forte hausse spéculative, depuis 1993, de la Bourse américaine, Wall Street , qui pourrait déboucher sur un krach et ruiner la croissance aux Etats-Unis, où les ménages sont fortement endettés. L’instabilité chronique du capitalisme a en effet été aggravée par deux procès, qui se sont développés depuis les années 1980, en réponse à la crise des profits au cours des années 1970.. Le premier procès est celui de l’accroissement considérable du rôle de la finance dans les modalités de l’accumulation et de la restructuration du capital. L’exacerbation de la concurrence économique a conduit à une forte concentration du capital par des achats et fusions d’entreprises, qui ont mobilisé des centaines de milliards de dollars sur les marchés financiers. Ainsi des banques géantes se sont formées, notamment aux Etats-Unis, et leurs opérations sont devenues beaucoup plus opaques et incontrôlables, ce qui augmente les risques pour le système tout entier. D’autre part la déréglementation de la finance par les gouvernements a donné aux détenteurs de fonds la liberté de placer et déplacer leur argent selon le profit espéré à court terme, quelles que soient les conséquences économiques .Là-dessus se greffent la spéculation, les engouements , les paniques comme celle de 1997 qui a fait chuter les monnaies et les Bourses asiatiques , et qui a ébranlé la finance internationale. Le second procès, lié au précédent, est celui de la nouvelle dictature du « retour sur fonds propres » (return on equity) hors endettement , très élevé, jusqu'à 15% , exigé par les actionnaires des entreprises . Comme la croissance économique ne dépasse pas 3% en moyenne dans les pays capitalistes développés, la répartition de son produit est atteinte de plein fouet par cette exigence de rendement du capital. Les profits des entreprises devant être maximisés, ce sont les salaires et l’emploi qui ont été pris comme des variables d’ajustement de la restructuration du capital des entreprises selon les nouvelles normes de rentabilité. L’inégalité des revenus , entre pays riches et pays pauvres, et dans les pays riches eux-mêmes, entre revenus du capital et salaires des ouvriers et des employés, a partout considérablement augmenté . Il en est allé de même pour l’inégalité des patrimoines financiers, partout concentrés entre les mains d’une petite minorité de riches propriétaires d’argent. Une telle polarisation est elle-même une source d’instabilité économique et sociale. Elle s’inscrit dans un rapport des forces aujourd’hui excessivement déséquilibré en faveur du capital, relativement au travail, et aux besoins des peuples. Les exigences de rentabilité élevée de la finance, ses revenus considérables concentrés entre les mains d’une minorité, sa liberté de mouvement, sont aujourd’hui la partie la plus visible des excès anti-sociaux de la restructuration internationale du capital , et de ceux de l’idéologie néo-libérale qui justifie les déréglementations de toute sorte par la rationalité des marchés. 2) Plusieurs projets de consolidation du système financier international ont circulé, pendant et après la crise de 1997-1998, qui a fait craindre une « crise systémique » mondiale. Mais aucune réforme sérieuse n’a encore été engagée . Voyons-en quelques cas . L’accord est général , au début de 1999, chez les experts et les gouvernements, pour mieux appliquer des règles traditionnelles de prudence(prudential), concernant la transparence des opérations bancaires, et la nécessité d’améliorer l’évaluation des risques de crédit selon la qualité des emprunteurs .Mais la plupart des banques tiennent à leur autonomie de décision et à leurs propres modèles de calcul des risques , voire à une sorte de droit à l’opacité de leurs opérations. Et la formation de banques géantes va dans le même sens . Résultat : en l’absence de mesures contraignantes, on espère que les acteurs financiers vont s’auto-réguler , alors même que l’hyper -concurrence les pousse à prendre de plus en plus de risques . Pour mieux observer les réalités de la finance internationale, il a été procédé à un élargissement du groupe des 7 plus grandes puissances économiques mondiales (G-7) à un groupe ad hoc des 20, qui inclut notamment la Chine et l’Inde . Cela a déjà été fait dans le passé, à différents moments, sans pour autant conduire à un meilleur partage des pouvoirs de décision entre pays riches et pays dépendants, et sans réduire l’instabilité financière . En 1997-98 il a beaucoup été question d’une réforme du Fonds Monétaire International (FMI), qui a mal géré la crise et a été largement discrédité. Le FMI s’est montré incapable de comprendre le risque de contagion régionale et internationale de la crise monétaire et financière née en Thaîlande. Suivant ses procédures habituelles il a exigé l’application brutale des mesures restrictives conditionnant ses prêts, ce qui a aggravé la crise de crédit et le risque économique de récession. Ainsi, dans un premier temps, le FMI a fait en sorte de reporter sur les pays en difficulté le poids de la panique financière qui avait entraîné la fuite massive des capitaux, la dépréciation des monnaies régionales liées au dollar, et les krachs boursiers. Malgré ces fautes, le FMI n’a pas été réformé en 1999. Les grandes puissances occidentales qui en sont les principaux mandants n’en ont fait aucune critique publique . Qu’en est-il des idées d’une réforme monétaire internationale, qui aurait pu être envisagée après la chute initiale des monnaies asiatiques sous l’effet de la spéculation ? La plupart des experts proposent deux voies : encourager le flottement de toutes les monnaies, dont les taux de change seraient fixés par les marchés, ou mettre en place des currency boards, c’est-à-dire la dépendance complète d’une monnaie faible vis-à-vis d’une monnaie de référence, avec émission limitée à une unité de monnaie nationale pour une unité de dollar (ou d’euro) entrée dans les réserves du pays. La seconde proposition ne tient pas compte de l’expérience du currency board en Argentine, dont le peso a été lié au dollar par ce moyen. L’expérience a échoué, et des dirigeants argentins demandent maintenant que le dollar devienne leur monnaie nationale. ..Quant à la première proposition, celle du flottement généralisé des monnaies, elle ne tient pas compte de la structure monétaire internationale , hiérarchisée, autour de trois monnaies dominantes, le dollar, le yen, l’euro (à la place du D.mark ), ni de l’instabilité des taux de change entre ces trois grandes monnaies elles-mêmes . Pour réduire le risque d’une instabilité excessive entre le dollar, le yen et l’euro, sous l’effet de la concurrence entre ces trois monnaies, qui se développe malgré l’hégémonie persistante du dollar, le Japon et des pays européens ont proposé l’instauration d’ exchange target zones entre elles. Il y aurait dans ces zones un plafond et un plancher des variations de change au delà et en deçà desquels les autorités monétaires devraient se concerter et intervenir de façon coopérative . Cette mesure de stabilisation monétaire a été rejetée par les Etats-Unis. On voit ainsi quelle résistance est opposée à des mesures de stabilisation qui, pourtant, ont un caractère conservatoire du système financier , des intérêts des puissances dominantes et de ceux du capital . Cela doit-il conduire au fatalisme - avec l’idée que l’on ne peut rien faire ou proposer pour limiter les dangers que l’actuel rapport des forces , favorable au capital et à la finance, fait peser sur les sociétés ? Certainement pas . 3) Le réveil de l’opinion publique : paradoxes et avancées Sous des formes diverses, et avec des objectifs multiples, il se produit, depuis quelques années, un mouvement international de protestation contre les excès néo-libéraux du nouvel ordre mondial et leur caractère dangereux pour les peuples. Un sondage réalisé dans 20 pays par The Economist (2/1/1999), sur la nécessité de rétablir des contrôles sur les mouvements de capitaux, indiquait que 49% des personnes interrogées, issues de couches sociales moyennes, étaient pour, 37% contre, 14% ne sachant pas . Cet hebdomadaire anglais pourtant défenseur de la liberté des marchés , en concluait que cela incitait à réfléchir . On ne peut faire état ,ici, de toutes les prises de positions importantes, comme celles qui ont déjà abouti au report de la libéralisation complète des investissements à l’étranger (AMI) . Evoquons seulement deux manifestations anti-libérales de caractère différent, mais intéressantes pour notre propos sur la stabilisation financière . La première concerne l’action d’un pays asiatique dépendant, la Malaisie, lors de la crise de 1997-98 . Le 1° septembre 1998, le gouvernement de ce pays a instauré un contrôle officiel des changes, et l’interdiction de rapatriement des capitaux étrangers. Ces mesures ont été assouplies en février 1999, mais une taxe sur le principal des capitaux étrangers, allant de 30% à 0% après un an, a été maintenue. L’objectif du gouvernement malais étant de pénaliser les brusques départs de capitaux qui jouent sur des indicateurs de rentabilité à court terme sans se soucier des effets de cette pratique sur l’économie du pays . Certains pays comme le Chili (de 1991 à 1997)avaient déjà utilisé ce type de mesure. Pourtant les mesures prises par la Malaisie ont d’abord été stigmatisées par « la communauté financière internationale » . Voilà un pays dépendant qui prétendait ouvertement échapper aux réformes préconisées par le FMI, et aux conséquences de la libre circulation des capitaux ! Puis l’ opinion ds experts occientaux a évolué . On a constaté qu’à court terme la Malaisie a réussi à stabiliser son économie. Une discussion a été rouverte sur le bien fondé des contrôles du compte capital des pays dépendants par le FMI . C’est à la fois limité et important. Dans l’ignorance de ce qu’ont à supporter les populations malaises , on ne peut se prononcer sur les mesures prises par le gouvernement de la Malaisie. Par contre, ces mesures montrent que la résistance officielle d’un pays dépendant à l’instabilité financière internationale est possible . En fait, des mesures de contrôle des changes et des mouvements de capitaux ont aussi été prises pendant la crise asiatique, à Taïwan notamment, mais de façon informelle, alors que la Malaisie procédait de façon ouverte. C’est pourquoi le cas malais est plus intéressant. Tout en restant paradoxal : par son caractère de protestation anti-néo-libéral mais nationaliste, et non anti-capitaliste. Une seconde mesure de caractère anti néo-libéral, est maintenant l’objet d’un important mouvement d’opinion en sa faveur, dans plusieurs pays, en Europe, au Canada, en Amérique Latine. IL s’agit de la taxe Tobin sur les transactions de change, proposée en vue de « jeter du sable dans les rouages de la spéculation » sur les monnaies , spéculation qui affecte l’autonomie des politiques économiques nationales de croissance et de répartition des revenus . Les marchés étant incapables de s’auto-réguler , ils engendrent des variations de taux de change qui sont irrationnelles, et dangereuses pour les monnaies et les économies nationales. Contrairement à ce qu’affirme l’économiste américain M.Friedman, la spéculation sur les monnaies est , selon J.Tobin ,également économiste américain et prix Nobel, une source d’instabilité financière et de déstabilisation économique. La déréglementation de la finance qui a suivi ,dans les années 1970, la fin du système de Bretton Woods, a ouvert un immense espace à la spéculation sur les monnaies, au détriment des données économiques à long terme . Cela concerne aussi bien les pays capitalistes développés que les pays dépendants. Les grandes banques internationales sont les premières à être impliquées , puisque 80% des opérations de change sont inter-bancaires - et environ 20% à la demande de clients non bancaires . Or le volume global des transactions sur les changes s’est considérablement gonflé par rapport au volume des transactions commerciales. Ainsi en 1980, pour un dollar de commerce international on comptait 9 dollars d’opérations sur les changes. En 1998, ce rapport était de un dollar de commerce à 60 dollars d’opérations de change. Il faut évidemment tenir compte de ce qu’il s’agit de flux financiers bruts, avant le solde net des opérations . Et aussi de ce que ce gonflement des flux peut en partie correspondre à l’usage de nouvelles techniques de gestion des portefeuilles financiers . Mais les opérations sur devises ont engendré de gros profits (et parfois des pertes importantes) pour les grandes banques internationales et les opérateurs privés qui en sont les principaux acteurs. sans bénéfices économiques pour l’économie réelle. L’objectif principal de la taxe Tobin est de réduire la spéculation de court terme sur les monnaies en la rendant coûteuse, c’est-à-dire en faisant payer les spéculateurs à la source . Toutes les monnaies sont concernées, y compris les grandes devises, le dollar, le yen et l’euro . Et tous les opérateurs, à commencer par les grandes banques internationales qui ont leurs racines dans les pays capitalistes riches . Il ne s’agit donc pas seulement de la protection des pays dépendants .Mais de la mise en cause de la spéculation sur les monnaies quel que soit son champ d’action . C’est l’intérêt principal de la Taxe Tobin : amorcer un changement de logique, contre la pure logique financière, par la restriction du volume des flux internationaux de capitaux spéculatifs. Le principe de cette taxe est le suivant : à chaque transaction sur le marché des changes, au comptant, à terme, ou sur les produits dérivés, serait appliquée une taxe internationale uniforme, par exemple de 0,O5 % . Etant donnée l’ampleur des opérations quotidiennes de conversion d’une monnaie en une autre, le montant final de la taxe pour un opérateur à la recherche d’un pur profit de circulation serait élevé. Cela permettrait de filtrer les transactions sur les changes de caractère spéculatif, qui opèrent d’incessants va-et-vient sur les devises, par opposition aux transactions liées au commerce international et aux investissements, qui sont orientées vers le moyen et le long terme. Les recettes perçues à partir d’ une faible taxe de 0,05% pourrait se monter à 150 milliards de dollars par an, et être affectées notamment à l’aide aux pays dépendants les plus pauvres. Selon J.Tobin, la taxe sur les opérations de change devrait être permanente et universelle .Elle devrait initialement être mise en oeuvre par les pays du G7, ainsi que par d’autres places financières importantes, comme Singapour et la Suisse. Qu’en est-il des limites économiques de cette taxe Tobin ? Beaucoup d’économistes ont indiqué qu ‘en cas d’attaques spéculatives de grande ampleur contre une monnaie, débouchant sur la fuite massive de capitaux, la taxe Tobin de 0,05 (ou même davantage) , ne pourrait rien. Cela aurait été le cas de la crise du peso mexicain en 1994-95, quand le peso a baissé de 60% par rapport au dollar -il aurait alors fallu une taxe Tobin de 23% , et non de 0,05% , pour bloquer la spéculation ! A cela on peut répondre qu’en effet, en cas d’urgence, la taxe Tobin doit être complétée par des mesures exceptionnelles de contrôle des capitaux .Ou par des mesures permanentes, comme celles qu’utilisent des pays comme l’Inde ou Taïwan, moins touchés que d’autres par la crise asiatique ,et moins proches des Etats-Unis que le Mexique. Mais cela n’enlève rien au rôle stabilisateur de la taxe Tobin, s’il est vrai que la spéculation sur les changes est nourrie par la liberté des mouvements de capitaux acceptée par les gouvernements depuis les mesures de libéralisation de la finance . Les gouvernements ou experts occidentaux contraints par leur opinion publique de discuter la « faisabilité » de la taxe Tobin, avancent de multiples arguments contre elle. En France le ministre des finances, hostile à cet impôt ,a utilisé successivement plusieurs arguments : 1) la spéculation peut être stabilisatrice, 2) les flux des transactions financières sur devises sont incontrôlables, 3) on ne peut même pas en connaître l’ampleur dans un pays comme la France. Il est possible de répondre à ces arguments, tout d’abord sur la spéculation : les excès de celle-ci en 1997-98 ont montré à quel point la spéculation sans frontières rend fragile le système financier international, et reporte sur les populations les plus vulnérables, les risques économiques qu’elle comporte. Ensuite, les flux des opérations sur devises étant comptabilisés , ainsi que les profits bancaires sur ces opérations, on peut connaître , et contrôler si nécessaire, les transactions à taxer. Par contre il est certain que la France, (ou un autre pays européen) ne pourrait à elle seule adopter la taxe Tobin , pour des raisons à la fois techniques et politiques, dans la perspective de l’euro . Mais d’une part la Banque de France conserve, pour le moment en tout cas, la tâche de surveillance des banques françaises ; d’autre part les conditions dans lesquelles sera déterminé le futur taux de change de l’euro, par rapport au dollar notamment, relèvent à la fois de la Banque Centrale Européenne et des ministres des finances des pays membres. Le problème est alors politique. Est-ce que la France fera campagne pour la taxe Tobin ? Est-ce que la zone euro (euroland) affrontera le refus prévisible des Etats-Unis et du Royaume Uni, et sera en mesure de constituer une « zone Tobin », avec d’ autres pays prêts à le faire ? Cela dépendra beaucoup de la force du mouvement de réprobation contre la spéculation financière, et de sa jonction avec divers mouvements sociaux opposés au nouvel ordre, ou désordre, international. Certains critiques de gauche de la taxe Tobin ou d’autres mesures contre la spéculation financière montrent que c’est le capitalisme qui est à mettre en cause, et pas seulement la finance et les financiers. Ce débat n’est pas ouvert ici. Disons seulement que si la finance est aujourd’hui la pointe émergée de la domination brutale du capital , la mise en cause de son instabilité et la volonté de faire payer les spéculateurs sont des signes positifs de l’état des opinions publiques. Il est certes paradoxal que la modeste taxe Tobin ait pu devenir une sorte de symbole de la volonté de restreindre la liberté des mouvements de capitaux , jugée nuisible pour l’autonomie des politiques économiques de croissance et pour une distribution moins inégalitaire des revenus. Mais elle a contribué à cristalliser un mécontentement croissant devant le nouvel ordre mondial mis en place depuis les années 1980, au détriment des travailleurs et des pauvres. Sa mise en oeuvre, aurait une grande portée politique , comme coup d’arrêt aux pires désordres du capitalisme actuel .
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