Mondialisation. Etat des lieux

Les compromis nécessaires - Texte paru sur la liste de discussion francophone d'ATTAC - septembre 1999

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Les compromis  nécessaires

...“ Pauvreté, maladie, pourriture, eau insalubre et égouts saturés, chômage, suicide, surpopulation,malnutrition, illetrisme.... Le nombre de mendiants et de prostitués des deux sexes augment régulièrement à Suva (Fidji), Les taudis s’implantent à Nukualofa (Tonga), Port Vila (Vanuatu) et Honiara (Iles Salomon)....  AFP LE MATIN... Août 1999... Après des années d’abondance économique et de surconsommation, les Iles du Pacifique  sombrent dans l’enfer...Reportages télévisés, dépêches d’agence, encarts et pages spéciales...

Depuis la publication des récents rapports du PNUD sur la croissance et le développement humain, pauvreté, ravages de la société de consommation offrent à l’évidence un sujet d’analyse hautement fréquentéquand ce n’est pas un thème à sensation. Rare désormais l’édito ou le TJ en vue qui ne trouve à faire  étal des chiffres et considérations portés à la connaissance générale sur l’immense détresse du monde. Au  terme de trente années de fulgurante croissance économique, jamais les disparités de revenus et de conditions  d’existence  des personnes et des pays n’ont été  aussi grandes.  Pour  20 personnes  qui jouissent  de tous les aspects du confort matériel, culturel et médical,  80 végètent  dans le dénuement  et l’exlusion. Pour  15 pays asiatiques qui ont connu une croissance économique sans précédent, 100 ont  stagné quand encore  ils n’ont pas regressé, 70 d’entre eux ayant aujourd’hui une moyenne de revenu inférieure à celle de 1980.  Les pays du G7 qui ne comptent que  12,5% de la population mondiale  drainent à leur seul profit  64% du PNB mondial.  Un  milliard de pauvres d’entre les plus pauvres vivent avec un peu moins de 6FF par jour. La  fortune du plus riche des mexicains s’élevait en 1995 à US$ 6,6 Milliards, soit l’équivalent du revenu cumulé de 17 millions  de ses compatriotes. Les  200 plus grandes fortunes du monde  ont grossi  à proportion de US$ 500 par seconde entre l994 et  l998. Et qu’on se ne réjouisse pas.  Si dans  les  pays de l’OCDE, la pauvreté se dissimule sous l’élégance du vocabulaire , l’exclusion (du latin excludere, mettre dehors) autant que la précarité (état de ce qui est révocable)  marginalisent   un nombre toujours croissant  de citoyens.   l10 Mio.  de personnes  n’ont pas ou plus  accès aux services de l’instruction  et de l’entraide sociale, 35 millions sont sans emploi  etc... etc... Des chiffres qui parlent d’eux-mêmes. Or à l’horizon  2000, 42% de la population mondiale s’entassera dans les villes d’Afrique, 75% dans les zones urbaines  d’Amérique du Sud.  26 villes dont Lagos, Rio de Janeiro, Sao Paulo et  Manille  dépasseront les 10 millions d’habitants.  Si l’on considère qu’à ce jour, 900 millions  de personnes, dont 20% de jeunes  de moins de 25 ans, soit un tiers de la population active mondiale,  sont  sans emploi;  si l’on sait que pour la seule Afrique où la population augmente de 2,9% par  an, ce sont plus de 8 millions  de demandeurs d’emplois qui chaque année arrivent sur le marché  du travail,   on   imagine sans peine la nature  explosive du composé  d’indigence   et de désoeuvrement  qu’un tel entassement pourra engendrer dans des pays écrasés sous le fardeau croissant  de leur endettement.

La nuit du 3 août l999, deux  jeunes adolescents guinéens  sont morts de froid dans les soutes d’un Jumbo 747 pour avoir voulu fuir la famine, la violence, l’incurie des corps et des esprits auxquels le  hasard de la naissance les condamnait.   Deux clandestins. Une affaire plus ou moins téléguidée qui aurait mal tournée. Qu’importe. Ce  drame  qui n’est pas le premier, pourrait  bien cette fois prendre  valeur  d’appel  pour  des multitudes   de plus en plus résolues, de moins en moins résignées,  et les  pousser  dans le sillage de quelque  miraculeux visionnaire. Il y a péril,  et péril d’autant plus grand qu’à l’heure de la globalisation et de la communication,  il en va des idées comme des capitaux. Une  fraction de seconde   suffit à les projeter  d’un bout à l’autre de la planète. Affranchies des frontières, libérées des contraintes  de la distance et du temps,  elles   peuvent  ensemencer   à leur guise  dans l’obscure galaxie  des consciences  et  fédérer  en un rien de temps de féroces énergies. Si rien n’est fait pour infléchir  l’ordre du monde, celui-ci promet de basculer dans le chaos, tant il est vrai que qui n’a plus rien à perdre peut céder aux  pires extrémités de la haine et du fanatisme.

On peut  certes  s’interroger  sur les raisons d’un tel déséquilibre, constater  avec étonnement   que pour la seule année  1998 le budget du PNUD s’élevait à US $1036 Milliards, qu’en 1995 l’Union Européenne a consacré US$ 70 Milliards à l’aide au développement, soit 10% de toute l’aide fournie par l’OCDE. On peut  aussi   déplorer  qu’une grande part des milliards de fonds privés publics  injectés  en 1997 ait été indirectement restituée aux pays donateurs par les voies du financement des frais d’expertise et d’assistance  technique ou d’achats de biens d’équipement .   On peut également   revenir à plaisir  sur les détournements, les dessous de table  et  le scandaleux gaspillage dont ces sommes ont  fait l’objet,  gloser sur le fait que plutôt que de servir une agriculture et une industrie  hautement   vitales, 53% du PIB des pays du Tiers Monde  passent à l’entretien d’un secteur tertaire pléthorique. 80% des montants accordés aux Philippines n’ont jamais quitté les banques occidentales.  Au Mexique et en Argentine dirigeants,  hauts fonctionnaires et  entrepreneurs ont  en quinze ans évadé à leur profit 50% de l’aide  internationale. Le résultat   ne s’en impose  pas moins. Le montant de la dette ne cesse  de croître. Elle  dépasse  actuellement les  2 trillions  de dollars, dont  235 Milliards pour la seule Afrique Sub saharienne. Autant de créances qui pour être honorées absorbent  la quasi totalité des ressources des états débiteurs et par conséquent empêchent de satisfaire aux besoins  essentiels des populations  locales. Entre 1980 et l992, PVD (pays en voie de développement) et PMA (pays moyennement avancés) ont remboursé  en capital et intérêts  US£ 1662,2 Milliards,  soit trois fois le montant des sommes empruntées.  Les emprunts qui devaient  permettre  au  Tiers Monde  de moderniser son agriculture  et ses infrastructures industrielles, l’ont pratiquement   ruiné, rendu totalement  tributaire  des orientations politiques et économiques des grandes puissances, repoussent  toujours plus loin l’espoir  d’entrer à part entière dans le monpoly des pays riches.

Contraints de négocier de  nouveaux emprunts contractés auprès du FMI ou de la Banque Mondiale   pour assurer le service de leurs dettes, les PVD assèchent  les revenus qui permettraient  de structurer un outil  industriel et scientifique  performant. Pris dans l’engrenage du  crédit , leurs gouvernements n’ont d’autre  priorité  que de prouver leur   solvabilité et leur aptitude à contenir les soubresauts d’une sédition  quasi endémique . Hopitaux, école, armée, douanes ou police, le choix est vite fait d’un régime  fort  à la botte des pourvoyeurs de fonds internationaux. Le budget militaire absorbe en moyenne 19,2 % du PNB (contre  15,6% dans les pays industrialisés) le  service  la dette 14,2%, la santé publique un modeste 12, 8%. En Tanzanie le service de la dette  équivaut neuf fois le budget  alloué  à la santé et quatre fois celui de l’éducation. Mieux  lotie la république démocratique du Congo, avec  une  dette  de US$ 13Billions, soit l’équivalent de 2 fois et demie  d’un PNB dont elle grignote  un  modeste  0,5 %!  Et le gouffre ne cesse de se creuser , toujours plus vertigineux. La hausse des taux d’intérêts, la baisse des cours sur le marché des matières premières,  la chute des exportations vers des zones chahutées par la crise financière et le jeu des dévaluations monétaires, la hausse des prix à l’importation  aggravent   chaque année un peu plus le  déficit des balances commerciales et ce faisant  enferrent le Tiers Monde  dans l’étau  toujours   plus resserré de la dépendance.

Une situation  en regard de quoi tout ce qui, en n’exigeant  que peu, voire pas d’investissement , promet de générer un minimum de profit  est exploité aux limites du tolérable, sans aucune  considération de l’hypothèque qu’un tel pillage reporte sur l’avenir. En trente  ans la couverture forestière par habitant  est passée de 11, 4 à 7,3km. En Côte d’Ivoire 400000 ha de forêts sont perdus chaque année, 250000 au Nigeria. En l’an 2000 les basses forêts de Malaisie et des Philippines n’existeront plus. Un quart des ressources halieutiques sont  aujourd’hui épuisées. Entre l950 et 1998, les réserves d’eau de la planètes  ont passé de 17000m3 à 7000m3 par habitants. 130 millions de personnes dans le monde  ne disposent que d’un m3 d’eau par an.  Aux Philippines, où faute de réseau d’adduction   un quart  de la population n’a pas accès à l’eau potable,  il s’agit de répondre à une demande en eau supérieure de 33% à l’offre, et la concurrence est rude  entre  vendeurs à la sauvette et sociétés privées locales pour soustraire aux trusts étrangers  le marché  de la vente en  bouteilles, marché  estimé à plus de 10 Millliards de dollars américains.  Un peu partout, en Amazonie, en Afrique, en Asie, On  massacre des singes ou des oiseaux  prisés pour la délicatesse de leur chair. On vend des femmes et des enfants aux bordels des grandes villes. Familles et clans mafieux organisent le trafic, affrètent bateaux et camions. 4 millions de clandestins, généreraient   annuellement pour US$ 7 Milliards de chiffre d’affaire. Et puisque les quotas de pollution fixés  lors du dernier  sommet de Rio ne comblent pas les besoins  des pays hautement industrialisés  autant  négocier  avec eux  des droits  d’émission de CO2 et d’oxyde de plomb inutilisables.   L’essentiel  est de survivre.

Entre 1863 et 1879 à l’initiative d’Ismaël Pacha vice-roi  d’Egypte et successeur de son oncle Saïd, l’Egypte  souscrivit  auprès des banques  françaises, britanniques  et allemandes des emprunts  publics  gagés  sur les recettes fiscales et les récoltes. Les gouvernements occidentaux  orientait  alors les placements de leurs épargnants vers des pays peu développés recommandés pour garantir des  taux d’intérêt particulièrment élevés. Dès 1875, dans l’incapacité de souscrire aux engagements, Ismaël Pacha  mit  en vente ses parts dans la Cie de Suez, soit 40% du capital actions qui seront rachetés par le gouvernement britannique. Une simple  anecdote qui montre  que les   temps n’ont guère changé en 100 ans.  Sauf qu’après avoir tiré  les leçons de l’inefficacité  criante de l’aide au développement,  les pays industrialisés s’efforcent  aujourd’hui de réduire au mieux  la part de PNB qu’ils entendent  y affecter . Ramenée  à une  moyenne  de 0,15%. 0,7%, pour les plus généreux  que sont  les pays scandinaves, le Canada et le Royaume Uni, l’aide n’est désormais attribuée qu’après une stricte évaluation de sa rentabilité.

Pareil désengagement a pour effet  d’’inciter   les  gouvernements  du  Tiers Monde  à  rechercher  l’appui  des  capitaux privés et pour ce faire mener des politiques abusivement attractives. Celles-ci, principalement articulées  sur le relèvement systématique  des taux d’intérêts et  l’étranglement  du crédit aux industries  locales,  s’inscrivent le plus souvent   dans le cadre d’accords multilatéraux ,  lesquels , outre  qu’ils définissent  les devoirs du débiteur  veillent  pour l’essentiel  à   fixer les  droits de l’investisseur avec ce préalable “qu’ un cadre approprié permet aux entreprises d’exploiter leur dynamisme, leurs ressources mondiales et leurs vastes capacités dans le sens d’un renforcement des moyens technologiques locaux des pays en développement et de l’expansion des possibilités d’exportation et de l’accès  à des structures  et à des instruments compétitifs tels que les réseaux d’information et de transport et les filières de distribution et de commercialisation. ” (1) Libre circulation des capitaux,  octroi  de régimes fiscaux préférentiels, suppression de toute contrainte  administrative  de nature à entraver les processus de production et d’exportation . Sous  prétexte d’assainir  et rentabiliser, il s’agit en fait  pour l’investisseur d’imposer les conditions qui assureront  le rendement  du capital  investi. Un marché de dupe dont la première conséquence est  de lessiver via le service de la dette le plus gros des recettes fiscales tirées des revenus du travail national.  A quoi viennent s’ajouter    de brutales restructurations  assorties de  faillites en cascade et  de licenciements massifs,   le tout  très souvent ponctué  par le  rachat  pur et simple  des entreprises en difficulté. Ce sont ainsi des secteurs entiers  de l’économie nationale, télécommunication, distribution, recherche,  qui passent peu à peu aux  mains des grands groupes multinationaux,  illustration  s’il en fallait des méfaits d’une mondialisation débridée, qui  éclaire  cruellement l’impasse dans laquelle   les pays pauvres  se trouvent  désormais  enfermés.

Nombreuses  sont néanmoins  les voies qui s’élèvent pour réclamer   une restructuration des modalités de l’aide au développement.  Nombreuses également  celles  qui réclament  l’instauration d’urgence de mesures visant à alléger voire annuler la dette du Tiers Monde. De fait, les  négociations menées dans le cadre du G7 en février 1999 ont conduit  à   l’annulation d’une  part  des créances publiques des pays pauvres hautement endettés.  Une simple écriture comptable  pour effacer  US$ 71  Milliards, compensée par la vente sur   les réserves du FMI de 10 Mio d’onces d’or. Une  faveur qui prend soin de ne pas léser les  intérêts des investisseurs privés et qui pourrait s’étendre à ceux des  52  pays portés candidats, qui auront  mérites et qualités  en suffisance pour en bénéficier.  Comprendre,  comme le précise les termes  la CNUCED, ceux qui  outre répondre à tous les critères sociaux, politiques et financiers de leurs créanciers, sont  à même de  “ créer des condtions propices aux flux d’investissement... ” (2).   S’agissant des autres, attribution de nouveaux prêts ou réechelonnement  de  la dette  continuent  à se traiter  au cas par cas, sur la base de ce qu’il est convenu d’appeler  des programmes d’ajustement structurel , à savoir des plans  d’austérité  élaborés  par le FMI qui incitent  les gouvernements  à strictement contracter les investissements publics  et rogner toujours plus sur les budgets  de santé et. d’éducation.  Des mesures on ne peut plus aisées à prendre à en croire les recommandations   des fonctionnaires de l’OCDE “  Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service quitte à ce que la qualité baisse. On peut réduire par exemple les crédits de fonctionnement aux écoles ou aux universités mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement et l’école peut progressivement et ponctuellement  obtenir une contribution des familles ou supprimer telle activité.Cela se fait au coup par coup dans une école mais non dans l’établissement   voisin de telle sorte que l’on évite un mécontentement général de la poulation ” (3)

On le voit les horizons sont partout bouchés.

La tentation serait  ici de baisser la garde, de conclure que  quelle   que soit la manière  de gérer   l’aide  développement, on ne fait jamais qu’évoluer sous des plafonds pourris.  De là, fermer les yeux sur les terrifiants dérapages inscrits dans la logique d’une évolution sans issue, tant il est difficile d’imaginer que les deux tiers des humains puissent tolérer  plus longtemps encore  cette forme de hiérarchisation  bi-polaire qui  les soumettrait  sans rémission possible  au bon vouloir et bien plaire d’une oligarchie de nations.  Or, loin de céder  aux sirènes du catastrosphisme,  jamais la conscience  n’a été aussi répandue  du danger  déployé sur le  devenir de  l’humanité. Deux  centres d’étude  sur le développement   humain, sorte d’observatoire de la pauvreté  ont été créés au Pakistan à Islamabad et au Mexique à Guanajuanto. 120 pays ont participé à la publication de 260 rapports nationaux. On suit   désormais l’évolution des hautes et basses pressions de la misère.

“ Les pays les moins avancés),  en particulier ceux d’Afrique et d’autres pays en développement continuent d’être freinés dans leurs efforts par la faiblesse de leurs capacités de production et ne parviennent pas à tirer profit du commerce. La marginalisation intérieure et extérieure de ces pays s’est aggravée. De trop nombreuses personnes continuent à vivre dans une extrême pauvreté. A l’approche  d’un nouveau  millénaire c’est là une situation intolérable ” (4) “ Governements are financially and politically challenged as never before ” (5)

“ The collapse of space, time and border  may be crating  a global village , but not everyone  can be a citizen ” (6) “ Financial support must be accompanied by economic reform and restructuring- taking account of the human  goals, not just economic and financial ones ” (7)

“ La mondialisation imprègne l’ensemble de la vie économique et sociale. Elle parait, à travers l’affaiblissement des instruments traditionnels d’intervention mettre en cause la capacité des Etats à définir et à maîtriser leur destin ” (8)

Discours et déclarations   se répètent  nourris  de voeux  pieux qui en appellent  au sens de la responsabilité collective, à  la mobilisation internationale  des  acteurs   civils et gouvernementaux. En  même temps qu’ils  prennent  conscience de l’exiguité et de la fragilité de leur niche économique, les terriens se découvrent une responsabilité collective, une destinée commune. Il n’est plus question désormais que de besoins fondamentaux, de droits et de libertés imprescriptibles. Il faut défendre, protéger, garantir, promouvoir, soutenir. Les frontières sont tombées. La mode  est à la solidarité,  à la citoyenneté mondiale. Un seul défi l’avenir de l’espèce. Un seul credo : le développement  humain.

Il est intéressant de se souvenir ici d’un ouvrage de Dennis Meadows “ Les limites de la croissance ” paru en 1972 et fort décrié à l’époque. Un rapport  rédigé avec la collaboration d’une équipe de chercheurs, économistes  et , sociologues  du MIT,  et qui,  en faisant  intervenir  les indicateurs  des variables   que sont  la population, le capital industriel, la production alimentaire, l’utilisation des ressources non renouvelables et  la pollution entendait  démontrer  pourquoi, si rien n’était  fait  dans les dix  prochaines   années,  l’espèce  humaine  courait à sa perte. Une analyse  qui,   constatant    l’écart  grandissant entre nantis  et déshérités, l’aggravation des disparités  de développement  entre les  diverses régions du globe et l’imbrication   toujours plus complexe des problèmes du monde,  concluait  à l’urgence  d’ une refonte  globalisante  des systèmes  politiques, sociaux  et  économiques de  la planète.  Par  voie de fait, la redistribution  à l’échelle mondiale  du travail et de ses produits,  la modification  des modes de penser et d’agir, la lutte  contre  les égoïsmes nationaux et donc  le renoncement  aux options  à court  terme  qui, pour satisfaire de petits intérêts locaux ou servir le profit immédiat  léguaient aux générations  futures  la charge  d’honorer  la facture, la fin  de l’exploitation inconsidérée des ressources  naturelles,  l’ouverture  du Nord au Sud des portes de la concertation  entre riches et pauvres,  et surtout  la restructuration du système monétaire international avec création d’une monnaie  unique. Un défi colossal qui  présupposait   par delà les frontières la collaboration   de toutes les organisations  non gouvernementales, la coordination de l’ensemble des forces syndicales, la solidarité  des énergies politiques, religieuses  et culturelles.  Un vaste chantier  dont dépendait   la survie même de l’humanité. Un vaste programme qui  ne pouvait s’accommoder de  frilosités historiques, de querelles partisanes ou d’ambitions personnelles et qui, ambitionnait  déjà de promouvoir une société de welfare mondial, en inscrivant  au bénéfice de tous, le progrè s porté au crédit  d’une minorité  de privilégiés .

Placées au centre  du débat, les conclusions et propositions du Club de Rome ont  alimenté  les travaux des sessions extraordinaires de l’Assemblée Générale des Nations Unies en 1974 et 1975 et conduit  à la mise au point  d’un programme d’action pour l’Etablissement d’un nouvel ordre économique international  ainsi qu’à la rédaction d’une Charte des droits et devoirs économiques des Etats. Mais les  détracteurs n’ont pas manqué pour dénoncer ce qui a été appelé “ l’imposture du Club de Rome ”. Reproche  était  particulièrement  fait à ce rapport  d’avoir été initié par un capitaine de l’industrie  italienne Aurelio Peccei (9),  de gratter  la corde sensible des terreurs  gravées  dans l’insconcient collectif, de jouer sur les angoisses millénaires   de  cataclysmes  apocalyptiques. Mais aussi, et plus gravement,  de  s’appuyer  sur une croissance  exponentielle des  variables  prises en compte en négligeant  les  facteurs modérateurs; notamment l’interaction  au long terme  entre progrès  technologique   et développement,  et donc la capacité de la découverte scientifique  à  repousser à l’infini les limites de la croissance. Pire, de s’en prendre à la souveraineté des états, coupables à leurs yeux d’entretenir les ferments de la dictature, du racisme et du nationalisme et donc de faire obstruction à  la nécessaire solidarité des peuples. Pire encore, de vouloir  organiser la planification mondiale  de tous les secteurs de l’économie,   le nivellement  des identités, le démantèlement  des  pouvoirs politiques  en appliquant, cela va de soi,  à l’ensemble des  sociétés civiles les règles d’efficacité  et de flexibilité  propres à l’entreprise, dans le but entier et unique de  créer “ un état industriel global ”.  En somme,  d’avoir trop allègrement  anticipé sur l’avenir.

Force  aujourd’hui est bien de constater que 30 ans plus tard les ombres de la pollution, de la surpopulation et de l’épuisement des ressources naturelles  ont  largement  contrecarré,   voire discrédité,  les succès  de la technologie  ou de la recherche scientifique.  Force aussi est de constater  que les champs  du discours  médiatique   est  aujourd’hui  investi par des propositions  sans autre originalité  que  d’ être reformulées  à la lumière de l’expérience contemporaine  et  qui   toutes vont  dans le  sens de  l’approche   globalisante   du  Club de Rome.  Inscrire  au patrimoine mondial l’eau, l’air, les forêts,  les océans  et le corps humain . Créer  d’une banque centrale mondiale. Instaurer  une  agence  supra-nationale  pour l’investissement chargée  de l’attribution et de la  redistribution des excédents  des pays riches.Instituer une commission  internationale pour la supervision et l’encadrement  des rachats et fusions d’entreprises. Elaborer et rédiger    un droit   international  contre  la criminalité organisée. Constituer  un fonds mondial d’aide à l’éducation et la santé. Fixer  un  calendrier pour l’élimination de  toutes les formes de discrimation raciales ou sexistes. “ La mondialisation  et la libéralisation  rendent tous les pays plus sensibles à la conjoncture extérieure, en accélérant la transmission des impulsions positives  mais aussi des ondes de choc. D’où une interaction croissante des politiques nationales et internationales. Ces phénomènes peuvent  atténuer certaines difficultés liées aux obstacles au commerce et à l’investissement mais risquent de créer des problèmes nouveaux. La coopération  et le partenariat à l’échelle internationale  sont donc appelés à jouer un rôle essentiel ” (10) Quant à savoir si dans le cadre de ce partenariat , il faut ou non  déposséder les états de leur souveraineté  et  les ranger sous  l’autorité d’un pouvoir économique supra-nationa.  mieux  vaut constater que la question ne se pose plus. Dégraissage, délocalisations, ventes, achats , fusions, anticipant  sur toute décision, les multinationales  ont pris les devants et mènent  tambours  battants la  réorganisation de  la planète  en pliant  les individus et les nations aux seules lois du rendement et du profit. Deutsche Telecom  prévoit de supprimer 20000  emplois d’ici à l’an 2000, Citigroup 10400, Royal Dutch/Shell Group 105000. Dans un premier temps  le rachat de Mobil par Exxon  conduira à la suppression  de 9000 postes de travail, à quoi s’ajouteront plusieurs milliers de licenciements supplémentaires, une fois fermées les unités de production et de distribution à faible rentabilité. En Europe  10% de la population actives est  chômage, 7% en moyenne  dans les pays asiatiques. Le niveau de revenu estimé nécessaire pour satisfaire les  besoins de base des ménages   américains a doublé entre l986 et l994, ceux des canadiens  exigent 77h voire 83,6 heures de travail hebdomaires,  une contrainte  autant liée il est vrai à l’accroissement  des besoins qu’à la hausse de leurs  coûts.

Petits boulots, travail à l’appel, partout  on s’organise, on veut faire front. Des expériences sont menées. Ici , qui tentent  ici  de rétablir  les pouvoirs des communautés locales  dans le choix économiques. Ailleurs, qui  cherchent à d’ouvrir des  brèches  dans les murs de l’exorbitante  dictature  des banques  et autres grands organismes financiers. Au Bangladesh, la Banque Grameen, spécialisée dans le micro crédit , accorde des prêts aux femmes désireuses  de  réaliser un projet à l’échelon du village ou du district. Nombre d’entre elles   ont ainsi pu acheter des machines à coudre, des étoffes et, en contre partie de la vente des vêtements confectionnés, assurer le salaire d’un  instituteur. Certaines   ont constitué le stock d’un petit commerce, acheté les outils nécessaires  à une meilleure exploitation des  champs, d’autres ont préféré  acquérir et louer du matériel agricole  ou des barques de pêche. Une démarche également conduite   dans les ghettos de Chicago, dans les communautés lapones de Norvège, les réserves sioux et apaches des Etats-Unis. Au Burkina Fasso, plutôt  que de se fier aux promesses de faramineux projets d’endiguement  ou de détournement de fleuves, des villages entiers se sont organisés  sous l’autorité traditionnelle des anciens  pour assurer l’aménagement  de plus de 100 puits et bassins de rétention. A l’ancienne, avec les matériaux du cru, sans apport financier extérieur, sans conseiller  ou expert  hautement  qualifié. Aux villages de s’associer et collaborer à l’élaboration des projets, de planifier la réalisation des travaux. A charge  aux habitants d’assurer  construction, entretien  et réparation  des canalisations , digues ou déversoirs, de s’entendre sur les modalités de distribution de l’eau d’irrigation, d’empoissonner ce qui peut l’être, de  fixer les tarifs et répartir  les frais sur l’ensemble de la collectivité.  Nulle perspective de profit dans ces  remises  sur pied de l’entraide  collective  et du sens des responsabilités.  Uniquement l’ambition de motiver  l’initiative, de procurer  une tâche à chacun et couvrir les besoins alimentaires de la communauté. En Europe,  on a choisi de contourner les  circuits officiels de l’argent par la création de zones de monnaie franche.  Généralement  émise sous forme de bons garantis par dépôt bancaire, cette monnaie permet circule dans un secteur rigoureusement  limité, village ou quartier. Elle permet à quiconque  fournit une prestation de l’échanger  en biens de consommation courante et vice versa. Pain,volaille, essence ou tabac contre dentiste, plâtier ou  répétiteur. Ni salaire, ni épargne d’aucune sorte, chacun tirant de  ses compétences et talents   l’à-valoir nécessaires à la couverture de ses besoins. Le système fait florès. En Irlande,  où les LETS (Local Exchange Trading) sont fiscalement  encadrés de manière à ne pas décourager l’emploi salarié, mais aussi aux Etats-Unis avec le Time dollar, en France avec les   Troc-Temps et les SEL  (Systèmes d’échange local), au Japon avec l’Epargne Temps,   où il s’agit chaque fois d’échanger du crédit temps  contre des services, des denrées ou des fournitures. Des   d’expériences sporadiques, qui, lorsqu’elles ne sont pas découragées par  des contre-mesures juridiques ou administratives, peinent  à trouver la publicité qui leur permettrait de se coordonner et  diffuser à plus grand échelle.  Car si discours et conférences jouent à l’unisson sur le grand air  de la fraternité universelle, les accents se font nettement  plus réservés  dès lors qu’il s’agit d’ouvrir  des voies à emprunter.

 “ La démocratie de libre marché a apporté l’abondance à un tiers environ de la population mondiale au cours du dernier siècle grâce essentiellement à un arrangement entre le travail et le capital dans un contexte capacitant créé par la production en série de type fordiste et la consommation de masse. Il convient  aujourd’hui  de trouver un arrangement similaire afin que la démocratie  globale de libre-marché  puisse apporter le confort matériel aux deux autres tiers de l’humanité  tout en le maintenant pour le tiers déjà riche.... l’objectif principal de la coopération au développement doit être, dans ce contexte, de veiller à ce que la croissance née de la mondialisation augmente les capacités et diminue les disparités ” (11)

 Il ne sert à rien de vitupérer la globalisation ou de mener un combat d’arrière-garde contre un processus irréversible. La vraie question est de savoir comment renverser l’écart  entre les plus riches et les plus pauvres ” (12).

En clair . Ne changeons  rien,  le système est bon pour autant que l’on soit capable de s’y adapter. Une approche qui reporte sur les victimes la responsabilité des méfaits.  Une assertion doublée  du postulat selon lequel pour garantir les félicités du futur, la croissance se doit d’être exponentielle. Une allégation proche  de la foi,  qui veut  croire   et faire croire qu’il sera un jour possible de hisser de hisser le  train de vie planétaire   au niveau de celui des pays les plus développés. Un train de vie qui tient à ceci qu’il  consomme 45 % de  la viande et du poisson mangés dans le monde, utilise 58% de l’énergie mondiale , engloutit 84% du papier utilisé,  possède  87% des véhicules en circulation. Nul  besoin d’être grand savant pour apprécier  l’ effet multiplicateur qu’une  pareille boulimie  aurait si elle venait à contaminer  4  milliards de sujets supplémentaires.  De toute évidence, quelque chose doit quand même changer,  le tout  étant de savoir quoi et comment .

Dans la mesure où, selon la formule désormais consacrée,  quels que soient les efforts et les démarches,   les pauvres deviennent toujours plus pauvre et  les riches toujours plus riches,  la réponse semble  aller de soi,. Il faut quelque part  reconsidérer  des modes de faire et de penser dont il n’est plus nécessaire de vérifier les désatreuses conséquences, consentir  ici de nouveaux droits, fussent-ils les plus légitimes, qui ailleurs impliquerotn  des renoncements,  voire des sacrifices  mal ressentis  lesquels  en bousculant  les intérêts  en viendront  inévitablement à  déstabiliser  le consensus  social. Une cure d’amaigrissement  est nécessaire dont il faut  bine se demander  qui   est sincèrement prêt  à la suivre. 

Il serait en effet bien naïf de croire  que brusquement  touchés par la grâce   les pays riches puissent  spontanément  décider de  reconsidérer  des  méthodes  et des  préceptes qui ont assuré leur prospérité et par conséquent  remettre en cause leur suprématie. Ils ont tous les jours sous les yeux les chiffres qui prouvent que le monde a plus que jamais besoin d’eux. Ainsi  des  études  récemment conduites par la Commission Européenne  et par l’OCDE   ont,  au  vu de l’expansion démographique et des effets de la globalisation, conclu à un formidable  accroissement  de la demande  alimentaire mondiale. Il faudra demain 6000 tonnes de denrées alimentaires pour nourrir les mégalopoles d’Asie et d’ailleurs. Dans les cinq prochaines années à venir, compte  tenu de l’incapacité  des PVD à augmenter leur production intérieure, les exportations de viande de l’OCDE devraient augmenter de 66%, celles des céréales de 30%. Les prix promettent  eux aussi de monter. 190   dollars  la tonne de blé . 135 dollars la tonne de maïs. On se réjouit! On aiguise les faux. On emmanche les rateaux. Chez Ciba Geigy, Shell et Cargil la culture du riz génère déjà en  pesticides  et herbicides un chiffre d’affaire de US$ 3 Milliards. Monsanto  tient déjà dans ses laboratoires de biotechnologie les intrants  et  anti-virus dont l’agriculture  du troisième  millénaire aura dramatiquement  besoin. L’Argentine  consacre déjà 11% de ses surfaces cultivables  aux cultures transgéniques, la Chine 14%, le Canada 10%, les Etats Unis 63%, le Mexique seulement 1% mais nul  doute qu’initié par l’exemple ce dernier  ne fasse de rapides progrès.

Véritables Midas  des temps capitalistes, en péril  d’étouffer sous leurs excédents, les pays riches   n’ont en fait  de destinée que  d’ouvrir de nouvelles routes,  de conquérir  les  nouveaux far-west  qui, en leur permettant  d’écouler leurs excédents de matière grise et de  production,  rentabiliseront  les capitaux  investis et  viendront alimenter le flux  les dividendes  exigés par un actionnariat  toujours plus gourmand. Perpétuellement  confrontés  aux impératifs de la   croissance intérieure  et  donc  la compétitivité de leurs entreprises,  ils se doivent  de sans cesse renforcer  les mesures qui leur ouvrent les chemins de leur  prospérité. Il s’ensuit que s’ils n’ont que peu  d’intérêt  à trop activer les ressorts d’économies émergentes qui au long terme pourraient s’avérer dangereusement concurentielles,  encore moins à répondre sans réserve à une surenchère  de revendications  humanitaires et sociales,  ils ont  en revanche tout avantage à rendre  les disparités à la fois lucratives et supportables. Dans ce contexte, rien de ce qui peut mener à l’optimalisation des outils à disposition ne saurait être négligé, rien non plus de ce qui en  corrigeant les effets  les plus grossiers du sous-développement assure la paix civile indispensable à la bonne marche des affaires.

Ainsi, le chômage généralement présenté comme un fléau, n’est-il aux yeux de certains économistes qu’un banal instrument de régulation des coûts de production, essentiel pour faire baisser les salaires, augmenter la pression de la rentabilité  sur la main-d’oeuvre, constituer  une réserve  de compétences et de savoir-faire suffisamment souple pour s’adapter  aux  impératifs   de la productivité et  de la demande. De même, indépendamment des abus et dérives,  toute aide  ou assistance  de quelque forme ou de quelque étendue géographique  que ce soit, vise-t-elle à créer  les débouchés et les courants d’échange  nécessaires à l’écoulement d’une  production industrielle menacée de compulsion,  l’espoir   étant que les moyens mis à disposition contribuent  à  apaiser  de  redoutables tensions et  relever  le  pouvoir d’achat de 4 à 5 milliards  d’humains  qui, s’ils étaient  trop longuement privés des  joies  de la consommation entraveraient  la croissance  et  menaceraient  d’attiser   un peu partout  les incendies  de la démagogie  nationaliste  ou du fanatisme religieux. Quant aux  efforts  soutenus en vue de  promouvoir les principes de liberté et de droit des personnes qui ont fait et font encore  la force des démocraties, s’ils  prétendent  obéir au noble désir d’améliorer le sort de millions d’êtres humains, ils ne font que reprendre à la lettre l’antique recette  de toutes les soumissions,  maintes fois éprouvée     aux temps reculés des conquêtes romaines “ ils (les romains) laissaient   aux peuples qu’ils ne détruisaient pas la faculté de vivre sous leurs  lois; ils accordaient  cet  avantage  non seulement à ceux qui devenaient leurs alliés mais encore à ceux qui se soumettaient comme sujets; ils ne laisaient subsister chez eux aucune marque de l’autorité du vainqueur,mais les obligeaient à remplir certaines conditions et tant que ces peuples étaient fidèles ils étaient   plus fidèles encore à leur conserver leur dignité et leur existence  comme  nation... ” (13)

Chômeurs et  indigents des banlieues, qu’on s’efforce d’assister et maintenir sur les chemins tracés du droit et du devoir citoyen, nations  en déroute qu’il faut instruire, conseiller  et progressivement  associer au  jeu subtil du libre-échange et de l’union douanière,  comme jadis les dames de la bonne société, les riches ont désormais leurs pauvres  rassemblés dans les périphéries plus ou moins lointaines d’une communauté de destin économique. Aux empires du début du siècle ont succédé  les triades, des noyaux à fort pouvoir d’attraction,  Japon, Etats-Unis, Union Européenne, qui en aimantant la troupe désordonnée des électrons vassaux  satellisent les plus conformes à leurs perspectives marchandes.

Encadrer  et gérer  la misère, atomiser les forces et redistribuer la carte  des alliances politiques au plus serré des implications commerciales,  deux faces d’un vaste plan d’aménagement du territoire planétaire  conçu pour assujettir la gestion et l’exploitation optimales des biens, des êtres  et des machines à la mathématique financière du modèle occidental. Assujettir, planifier, autant dire, fusionner les aspirations,  laminer les particularismes,, conditionner les énergies, sacrifier le pluralisme sur l’autel d’un projet   proclamé généreux et sacré. Cela porte un nom : totalitarisme. La tentation suprême,  face à tous les désastres annoncés, d’embrasser d’un même élan prétenduement salvateur les nébuleuses enchevêtrées de la désillusion et de l’espérance.Mondialisation, globalisation, échanges, croissance, développement, pacification, démocratisation. Sous le velours des promesses, l’intention, sans fard : la planification globale du monde au seul usage de la  civilisation industrielle. Or,  pour si dépendant qu’il puisse être de la sollicitude  des pays développés, rien ne dit que le Tiers Monde entende se plier  à la radicalité de la manoeuvre ou  se laisser convaincre  de l’unicité des solutions. Il peut opter pour le droit à la différence.  Il a pour lui la force  du nombre. Et l’Histoire  est là pour raconter comment au plus fort de la détresse  les peuples accouchent  des monstres censés les libérer de l’oppression  et les guider dans la lutte de tous les triomphes. Le danger est donc réel de  voir un peu partout la résistance nourrir les appétits de puissance  et cristalliser les mécontentements au sein d’une pluralité de réseaux idéologiques rivaux d’autant plus dangereux que commandés et fédérés à distance, ils pourront essaimer quasiment sans risque et enclencher partout à la fois les redoutables mécanismes d’une internationalisation  de la terreur  dont il deviendra  quasiment impossible  de  contenir les débordements. Il y a,  à n’en pas douter  urgence à mettre en oeuvre les moyens qui  permettront  d’harmoniser les intérêts des parties, de répondre à  des ambitions et des attentes  qui pour être fondamentalement  antagonistes   n’ont  que le choix  de la conciliation.  Non qu’il y   en  aille nécessairement de l’intérêt  des  démunis. Il s’agit d’abord  pour  les tenants  du nouvel ordre libéral, s’ils croient  devoir  rester aux commandes  du navire, de négocier sinon une utopique égalité des moyens d’existence, du moins de nouveaux équilibres, d’inévitables compromis.  Alors? Demain, la première conférence non pas contre mais pour la mondialisation ? Le rapport syndicat-patronat réactivé et  transféré à l’échelon planétaire pour prévenir l’effondrement?  Les   princes de la haute finance, les industriels, les associations de défense des droits de l’homme,  les ligues écologistes, les travailleurs, au coude à coude  à la même table pour circonscrire  les uns le péril ,  les autres la fin de leurs privilèges? Au seuil de troisième millénaire Davos, Matignon  d’un nouvel ordre mondial ?

 

1) CNUCED Un partenariat pour la croissance et le développement. 9ème  session          de Midrand. Fev.1996

2) CNUCED ib

3) Christian Morrisson : La faisabilité de l’ajustement structurel- 1996

 (Source  La Bourse ou la vie - Eric Toussaint - Ed. Luc Pire 1998 p209)

4) CNUCED ib

5) PNUD Rapport  sur le développement  humain 1999

6) ib

7  ib

8) Catherine Lalumière : Rapport sur les négociations  multilatérales

9) Responsable de  Fiat Amérique, et entre autre  fondateur de sociétés de financement et d’investissement, Aurelio Peccei fut chargé de 1964 à1966 de la réorganisation de l’entreprise Olivetti. 

10) CNUCED ib

11)Jos Jonckers : L’aide au développement  ou la nécessité de nouveaux compromis. Le Courrier Août-Juillet l996

12) Claude Smadja - Le Matin juillet l999

13) Machiavel -  Oeuvres Complètes -  La Pleiade p 573

 

Elizabeth HUBER

 

 

 

 

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