Mondialisation. Etat des lieux
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Pour y voir un peu plus clair avec le Millenium Round de l’OMCNadia HOUDARTIl nous
apparait utile de rappeler quelques fondements des échanges
internationaux et de leur cadre institutionnel. Intrinsèques
à l’activité de l’homme, pour satisfaire ses besoins ( illimités)
avec des moyens limités - c’est le sens etymologique du mot économie -
ces échanges
présentent des spécificités
économiques, humaines, sociales et monétaires dés lors qu’ils dépassent
le cadre d’un Etat qui agit avec son organisation propre. A l’origine,
ce sont les facteurs géographiques qui ont prédominé aux échanges,
la répartition des biens naturels n’étant pas toujours en corrélation
avec la localisation des besoins à satisfaire. Aujourd’hui
la technique ( transports, transformation de matières premières, entre
autres ) supplée les distorsions et ce sont les facteurs capital et
travail qui ont forgé l’histoire des échanges et leur
organisation. LES
TRANSACTIONS. Les échanges
concernent les biens, les services, les personnes et les capitaux. L’importation
permet d’élargir son offre et de négocier au meilleur prix. L’exportation
permet d’élargir son marché, de préserver l’emploi, de jouer sur la
production de masse et la productivité. Les échanges
de capitaux concernent : -
le règlement des biens, des services, du travail des personnes. -
les transferts sans contreparties -
les investissements directs, industriels et commerciaux. -
les placements et les crédits à court, moyen et long terme. LES DOCTRINES Depuis
toujours les règles des échanges internationaux ont fluctué en fonction
de la double alternative du libre échange et du protectionnisme. Dans les 2
cas, on constate une division internationale du travail différente. Dans la
situation de libre échange, l’avantage est l’augmentation du revenu
intérieur qui augmente la demande intérieure et stimule la production de
nouvelles richesses ( Ricardo ). Le
protectionnisme, protège le marché intérieur de la concurrence et des
à-coups en provenance de l’étranger. Les 2
doctrines sont simultanément et en permanence remises en cause, la première
dès que des déséquilibres majeurs apparaissent avec les inégalités
qui en sont inhérentes, la seconde quand la prospérité permet un développemet
partagé. LE CADRE
INSTITUTIONNEL ET LES TECHNIQUES. Tout échange
fait l’objet d’un règlement avec transfert de monnaie et presque
toujours une opération de change entre la monnaie du pays qui cède et la
monnaie du pays qui reçoit. Un règlement
international est une créance remise sur l’économie d’un pays tiers. Toutes entrées
et sorties de capitaux correspondant à ces règlements génèrent donc
des flux inversés; ils sont réglementairement recensés dans un document
unique, la balance des paiements, qui comptabilise le solde entre les entrées
et les sorties de capitaux de chaque pays. Qui dit
balance dit solde nul, équilibre entre les + et les -, aussi l’excédent
des paiements ou l’insuffisance des encaissements est systématiquement
compensé par un placement ou un crédit. Le système
monétaire international de Bretton Woods en 1944 a été instauré pour
faciliter les ajustements des soldes entre les pays; la réserve alimentée
par les excédents pouvant financer, au coup par coup, les besoins
ponctuels. Son
fonctionnement peut-être unilatéral ou multilatéral, limité ou controlé,
individuel ou coopératif, que ce soit pour les décisions à prendre
comme pour toute assistance financière. C’est dans
ce cadre que se greffent : -
l’économie contemporaine, avec ses cycles d’expansion et de récession -
la maitrise de l’inflation et des taux de change -
le dialogue Nord / Sud -
la stabilisation du système monétaire international -
le développement du commerce mondial et sa réglementation LES DONNEES
INCONTOURNABLES AUXQUELLES NOUS SOMMES CONFRONTES AUJOURD’HUI : -
le marché est planétaire -
multinational -
interdépendant La multilatéralisation
des échanges s’impose désormais aux pays et ne résulte plus d’un
choix économique mais de confrontations ou de négociations avec les
organisations internationales et les entreprises transnationales. Toutes les
nations ont renoncé à la tentation de l’autarcie, même la Chine. La nature étant
par essence inégalitaire et les échanges fondés sur des rapports de
force issus de cette inégalité, l’enjeu des règles du jeu
supranationales qui se négocient actuellement, dans le cadre de l’OMC
entre autres, est, pour faire simple, de choisir entre : -
laisser faire les lois de la nature et poursuivre la déréglementation,
en supprimant le pouvoir régulateur des Etats, c’est à dire faire le
jeu des tansnationales et des ultralibéraux -
se battre pour exiger que les réglementations internationales jouent véritablement
un rôle régulateur et équitable.
I
L’HISTOIRE DE L’OMC l’OMC
s’inscrit dans le cadre des accords du GATT, elle en est le fondement
institutionnel. Indépendante
de l’ONU, l’OMC a vu le jour le 01/01/1995, à la suite des accords de
Marrakech signés le 15/04/1994. Son
originalité : - Création de
strutures permanentes qui ont pour objet de faire respecter les accords de
Marrakech ainsi que tous les accords précédents du GATT. - Mise en
place d’un organe d’arbitrage des différents. - Extension du
champ d’application des accords du GATT. - 139 Membres. - Organisation
reposant sur des bases Multilatérales. Ses
structures : - La conférence
ministérielle : .Se réunit
une fois tous les 2 ans ( la prochaine ayant lieu à Seattle). .Composée des
139 ministres des Etats membres. .Pour la
France et tous les pays de la Communauté Européenne : un seul représentant
( Pascal Lamy, commissaire européen en charge du commerce extérieur négocie
pour les 15 ). - Un
conseil général : .Organe
permanent composé de représentants de tous les membres. .Se réunit généralement
tous les 2 mois. .Les décisions
sont prises par consensus, si pas accord : vote à la majorité simple( un
membre = 1 voix ) .Dépend de
lui les 2 organes suivant. - Un organe
d’arbitrage des différents ( ORD ) : .Juge de paix
du commerce mondial. .167 affaires
ont été soumises à l’OMC. .Moyens
juridiques : Sanctions,obligation de mise en conformité des législations
nationales. - Un organe
d’examen des politiques commerciales ( OEPC ): .Supervise une
vingtaine de comités ( GATT GATS TRIPS ). .Rédige des
rapports d’évaluation sur la politique des Etats. Ses
principes : - La clause
de la nation la plus favorisée : .Cette clause
stipule que tout avantage commercial accordé par un membre de l’OMC à
un autre pays doit être accordé à l’ensemble des membres de l’OMC. - Le
traitement national : .Les produits
ou services importés sur le territoire d’un membre ne doit pas subir un
traitement moins favorable que celui réservé aux produits ou services
nationaux. - La
consolidation des engagements : .Lorsqu’une
mesure commerciale a été négociée comme consolidée ( ex : baisse
droits de douanes ), elle ne peut pas être modifiée dans un sens
moins favorable, sauf à négocier des compensations à accorder aux pays
avec lesqules la consolidation a été négociée. Ses réalisations
: - Un accord
sur les technologies de l’information, conclu le 13/12/1996. - Un accord
sur les télécommunications de base, conclu en février 1997, entrée en
vigueur le 05/02/1998. - Un accord
sur les services financiers, conclu en Décembre 1997. II
LA FACE CACHEE DE L’OMC L’envers
du décor: - Les
accords de Marrakech : .Les droits de
douanes réduits de 40 %. .Interdiction
totale des subventions accordées à l’exportation ( régime européen
de la banane qui favorise les pays ACP en conformité avec les accords de
Lomé ). .Prohibition
des sanctions unilatérales ( maintien par les E.U de ses legislations
contraignantes : Super 301, Loi Helms-Burton , Loi Amato), ( liste des
produits surtaxés laissée au libre arbitre du pays ). .Libre
concurrence ( existe t’elle lorsque les pays n’ont pas les mêmes
pouvoirs économiques ? ). - Les
structures hermétiques de l’OMC : .Les sessions
se déroulent à huis-clos. .Les textes préparés
restent confidentiels pratiquement jusqu’à leur signature. .Il n’y a
pas de représentants des syndicats, des consommateurs, ni des citoyens de
l’OMC. .Les
technocrates gérent l’organisation au quotidien. .Les Etats qui
ont recours à l’ORD doivent apporter la preuve du préjudice subit ( ce
qui n’est pas une mince affaire lorsque l’on est confronté au pouvoir
de cabinets juridiques onéreux ). Le
liberalisme à outrance
: - La libre
concurrence : .Les
entreprises multinationales représentent 60 % du commerce mondial ( réf
: Agefi 1995 ). .A eux seuls,
les E.U, le Japon, Le Canada, l’Union Européenne recouvrent 79 % du
marché mondial des technologies de l’information(cf accords du
13/12/1996). .l’OMC
consacre la supériorité industrielle des pays développés : 3 % des dépenses
de recherche et de développement seulement proviennent des pays en développement - Extension
des domaines d’intervention : .A tous les
domaines de l’agriculture, .des services, .de la propriété
intellectuelle . Mecanismes
de régulation en danger
: - L’Etat
régulateur : .Explosion des
barrières protectionnistes justifiées par les particularismes nationaux
( environnementaux, économiques, sociaux, sanitaires....). .Conséquences
: déréglementation des legislations nationales. .Disparition
du Secteur Public à terme ( éducation, santé, ressources
naturelles...). .Accaparement
des ressources planétaires, redéfinies comme marchandises, par des sociétés
transnationnales ( ex : Le groupe Vivendi privatise l’eau à travers
toute l’Amérique Latine). - Suprématie
des sociétés transnationales : .Fusions,
Acquisitions, mouvements de concentration exponentiels créent des
situations de monopole de moins en moins controlables. .Transfert des
prérogatives des Etats aux “superstructures extraterritoriales” . .Course
permanente aux innovations technologiques, surdimentionnement des capacités
de production = offre excédentaire pas le reflet d’un besoin citoyen. .Les 200 premières
firmes transnationales ( 25 % des activités économiques mondiales ) ne
fournissent que 0,75 % des emplois de la planéte (Herald Tribune-avril
1995). .Pas de contrôles
comptables et financiers des activités extraterritoriales des sociétés
transnationales. - Risque de
“bulle financière” : .20 % de tous
les avoirs à l’étranger appartiennent aux 100 premières sociétés
transnationales. .Aucun contrôle
efficace sur les mouvements de capitaux transfrontières. .Bannalisation
des paradis fiscaux, Sociétés off- shore.... .Les 21 000
milliards de dollars aujourd’hui sous contrôle des investisseurs et spéculateurs
( 50 % américains ) dépassent le PNB de tous les pays industriels réunis. III
LE MILLENIUM ROUND DE SEATTLE De
vrais enjeux Objectif : Au
nom de la seule liberté du commerce, faire passer en bloc des accords sur
les secteurs suspendus lors du dernier Round du GATT : l’investissement,
les règles de la concurrence, la transparence des marchés publics. Faire avancer
les dossiers encore “protégés” par la réglementation des Etats. L’agriculture
: ex : les
accords de Blair House de 1993 ont ouvert le marché européen aux céréaliers
américains et au soja génétiquement manipulé. L’interdiction
européenne d’importer de la viande aux hormones, dénoncée par les
Etats Unis et le Canada, sous prétexte que les réserves scientifiques ne
sont pas assez certaines, nous valent des mesures de boycott. Les
nouvelles mesures de libéralisation priveront les pays de toute maitrise
de la sécurité alimentaire. Les
services : L’accord général
sur le commerce des services ( GATS ) prévoit des engagements renforcés
et plus nombreux de tous les membres de l’OMC sur l’accés aux marchés
et le traitement national, notamment la présence commerciale et le
mouvement des personnes physiques ( clause du traitement national qui
interdit toute discrimination entre les exportateurs étrangers et les
producteurs nationaux ) = l’implantation des super et hyper marchés. Sont inclus
toutes les activités humaines : distribution, commerce de gros et de détail,
bâtiment et travaux publics, l’architecture, la décoration,
l’entretien, le génie civil et ingénierie, les services financiers,
banque et assurance, la recherche et le développement, les services
immobiliers et le crédit bail
location, les services de communication, les postes, les télécoms,
l’audiovisuel, les technologies de l’information, le tourisme et les
voyages, les hôtels et restaurants, les services de l’environnement
dont la voirie, l’enlévement des ordures, l’assainissement, la
protection du paysage et l’aménagement urbain, les services récréatifs,
culturels et sportifs, dont les spectacles, les bibliothèques, les
archives et les musées, l’édition, l’imprimerie et la publicité,
les transports par toutes les voies imaginables, y compris spatiales, l’éducation
( enseignement primaire, secondaire, supérieur et formation permanente ),
la santé animale et humaine. Un des
secteurs le plus menacé, la santé en Europe : marché où les dépenses
explosent notamment les tranches agées très consommatrices : “ nous
estimons possible de faire de grands progrès pour permettre l’expansion
des entreprises américaines sur tous les marchés de soin de santé.....
jusque là largement placés sous la responsabilité du secteur étatique” L’investissement
: Levée
l’interdiction de refuser des investissements ou le rachat
d’entreprises nationales, de patrimoines fonciers par des capitaux étrangers
( TRIMS ). Ce sont les Etats qui devraient être taxés ( AMI ). La propriété
intellectuelle : Droits
d’auteurs, brevets industriels, licences, marques déposées....Etendus
aux espèces végétales et animales génétiquement manipulées, aux
processus biologiques et parties du corps humain qui deviennent
brevetables ( avec le droit de percevoir des royalties sur chaque génération
de vivant manipulé ). Le brevetage
du vivant est au programme TRIPS ( Trade Relates aspects of Intellectual
Property rights ). Presque tous
les domaines de la vie politique, économique et sociale des 139 pays
membres est désormais régie par l’OMC, au nom des seuls intérêts
commerciaux - et de qui ? Et il s’agit
de conclure un engagement unique ( single undertaking ), “ obligeant
toutes les parties à en accepter la totalité, sans possibilité de trier
et de choisir “. L’avantage comme dit L Brittan, d’une négociation
sur une multitude de sujets, c’est qu’aucune “ de ces questions,
difficiles pour certains, mais importantes pour d’autres, ne pourra être
bloquée isolément et doit être évaluée en tant qu’élément du
calcul global des avantages que chaque membre peut tirer de la conclusion
d’un tel cycle”. Sur 3 ans,
afin que les “règles multilatérales soient en adéquation avec les réalités
et les besoins en constant évolution des entreprises “ (CCI ). Si on imagine
mal comment les gouvernements des pays développés peuvent maitriser la
portée de tant de mesures, qu’en est il des pays du Sud ? Beaucoup
d’entre eux n’ont pas de représentation permanente auprès de
l’OMC, ou la partagent à plusieurs. Le personnel
qualifié nécessaire leur fait défaut pour suivre des négociations
complexes et simultanées sur un grand nombre de sujets. Si certain
nombre de pays du Sud font partie de l’OMC, est ce possible de soutenir
que l’OMC est un forum plus démocratique que l’OCDE ( affirmation de
Lionel Jospin ) ? Comme
d’habitude, Washington et la commission de Bruxelles, le Canada et le
Japon, grâce à leur personnel pléthorique et très professionnel,
s’imposeront comme d’habitude. Susan Georges
conclut par ces questions : “entre 2 maux, lequel choisira le
commissaire européen, sacrifier la sécurité sociale ou la survie du
monde rural ?Accepter le boeuf aux hormones ou la destruction des forêts
? Protéger l’industrie audiovisuelle ou les accords de Lomé, déjà
vidés de leur sens par la décision de l’OMC sur la banane..... **** Les pays
ACP : Afrique,
Caraibes, Pacifique. Loi
Helms-Burton :
sanctionne les entreprises investissant
à Cuba et qui exploitent d’anciens biens americains ayant fait
l’objet d’une expropriation par les Cubains. Loi Amato
: sanctionne les entreprises investissant dans les secteurs gaziers et
petroliers en Iran et en Libye. La section
301 : du Trade Act
de 1974, confère au président des Etats Unis des pouvoirs de rétorsion
unilatérale contre les pays qui ne respectent pas les dispositions des
traités et accords. Accords de
Lomé : ( 1975 )
conclus entre l’Union Européenne et 70 pays ACP, permettent l’accés
en franchise de douane et hors contingent de 97 % des produits de ces pays
vers Union Européenne et sans réciprocité .
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