Paris 13-14 (75) - DOCUMENTS |
Note de synthèse dossier dAttac consacré aux fonds de pension (FdeP). 01/99
QUEL RAPPORT EXISTE-T-IL ENTRE LE REGIME DE RETRAITE DES SALARIES DU SECTEUR PRIVE ET LES FONDS DE PENSION ? Réponse de Chirac à Jospin : les seconds vont venir au secours du premier qui va bientôt se trouver en difficulté.
EN QUOI LE REGIME DE RETRAITE DES SALARIES DU SECTEUR PRIVE EST-IL MENACE ? Réponse de Chirac à Jospin : lévolution démographique est caractérisée par un vieillissement de la population. Dans un système de retraite par répartition, les cotisations des actifs servant à payer les pensions des retraités, cette tendance est source de déséquilibre : il y aura de moins en moins dactifs pour payer les pensions de retraités en nombre croissant. Les actifs sont donc menacés davoir à assumer des charges insupportables.
MAIS LE VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION FRANÇAISE EST-IL LE SEUL PARAMETRE A PRENDRE EN COMPTE ? NON. Tout dabord lévolution des 25 années à venir ne sera pas sensiblement différente des 30 années passées. Ouf ! Nous ne sommes pas tombés dans le gouffre prédit par nos politiques. Ensuite il faut également tenir compte de la diminution du nombre de jeunes et de la proportion de la population active au chômage. Dans ce cas, les charges réelles qui pèseront sur la population active dans les années 2020 ne seront pas de 35% supérieures aux charges actuelles mais de 3% dans le meilleur des cas et de 14% au pire. Lemploi jouant un rôle clef sur le niveau de ce pourcentage. Enfin, la part de richesse par individu ayant augmenté de 50% en 20 ans, il est tout à fait probable que les gains de productivité se comportent de la même façon dici les années 2020. La menace toute relative que fait peser le vieillissement de la population sur le système de retraite masque en fait la vraie question politique de la répartition des richesses futures.
ALORS POURQUOI PARLER DES FONDS DE PENSION ? Réponse de Jospin à Chirac: les " fonds de pension à la française " ou un " troisième étage de retraite venant sajouter au régime général et à la retraite complémentaire(ARRCO et AGIRC)" ou une " dose de capitalisation " ou, en deux mots, un peu " dépargne retraite ", permettraient à ceux qui le veulent (comprendre " le peuvent "), de mettre de côté un capital accumulé durant leur vie active pour compenser le manque à gagner prédit pour leur retraite.
EN REALITE, LA REPONSE VARIE SELON QUE LON EST SALARIE OU QUE LON PROFITE DES MARCHES FINANCIERS. Pour les salariés, le fait dépargner pour la retraite dissimule une nouvelle forme de cotisation, mais surtout elle masque la réalité des fonds de pension : 1°/ Le régime de retraite par capitalisation (géré par des fonds de pension), creuse les inégalités : dans les pays anglo-saxons, seuls les retraités qui ont pu épargner régulièrement durant leur vie active dans un secteur prospère ont une retraite digne de ce nom; les autres, bénéficiant dun régime par répartition atrophié, sont assimilés à des pauvres. 2°/ Pour verser à date fixes les pensions de retraite, les FdeP doivent retirer le maximum de profit des actions et des obligations quils détiennent. Les actions représentant la moitié des actifs quils possèdent, ils ont intérêt à ce quelles produisent des dividendes substantiels. Ces derniers peuvent être gonflés en diminuant les salaires, le nombre de salariés (ou écrémage, downsizing, Vilvorde _ 30% du capital de Renault est détenu par des FdeP anglo-saxons.), et en réduisant les sommes allouées au développement à long terme des entreprises. Le développement des FdeP engendre le chômage. 3°/ Par rapport au régime de retraite par répartition dont le rendement évolue en même temps que la croissance économique (économie réelle), le régime de retraite par capitalisation assure un rendement théorique plus élevé (économie financière). Cependant, en cas dinflation, de " correction " ou de krach boursier, les valeurs mobilières peuvent faire des plongeons spectaculaires (cf la crise de 1929 et la crise boursière de 1987). Les pensions de retraite suivent alors le même mouvement, la valeur des titres en bourse étant nominale, artificielle, et non réelle, il ny a tout simplement plus dargent pour les payer. Il faut remplacer " rendement théorique " par roulette et convenir que ce système nest pas fiable sur une longue période. 4°/ Pour continuer à fonctionner, les FdeP ont besoin de pomper toujours plus de richesses nouvelles. Des places financières récentes et sûres pourraient naître dans les pays dits émergents. Le problème est que ces pays connaissent des crises graves qui ont mis en lumière leur vulnérabilité (Mexique, puis Asie, Russie et Brésil). Les FdeP dépendent dun avenir incertain 5°/ Pour sinstaller en France, les FdeP auraient besoin de ressources fraîches également. La Loi Thomas votée en 1995 et non appliquée faute de décrets, mais toujours en sursis faute dêtre abrogée par un premier ministre qui a oublié sa promesse de candidat, proposait une solution : vider progressivement de ses ressources le régime actuel de retraite par répartition. Les FdeP installent une logique irréversible à leur profit. En permettant un nombre considérable de retraités de sortir de la misère, en favorisant une logique de croissance et dinvestissement, en ayant donné des gages de fiabilité sur une longue période, en ayant assuré une mutualisation des risques économiques (secteurs sinistrés secourus par les secteurs en développement), le régime par répartition a fait ses preuves. Il permet le développement parallèle dune épargne boursière pour les salariés qui le souhaitent (assurance vie, plan dépargne populaire, plan dépargne en actions, plan dépargne dentreprise). Enfin et surtout, il peut évoluer non pas selon le bon vouloir des capricieux marchés financiers ou des arbitrages des seuls chefs dentreprises, mais en fonction de variables qui touchent à léconomie réelle et qui peuvent faire lobjet dun débat public : âge de la retraite, montant des cotisations, réduction négociée des disparités entre régimes, modulation de lindexation automatique en fonction des différentes catégories de salariés, organisation de la vie active entre travail, formation et loisirs, durée du temps de travail, rapport entre le montant de la pension de retraite et lancien salaire, etc.
QUI A DONC INTERET A SUGGERER QUE LES FONDS DE PENSION PUISSENT ETRE UNE BONNE SOLUTION ? Les hommes politiques par soumission à la mode économiste anglo-saxonne, par désarroi, incompétence ou cynisme ? Les organismes dassurance pressentis pour devenir les gestionnaires des fonds de pension français ? Il faut dire que les sommes en jeu (plus de 1000 milliards de francs), laissent entrevoir des commissions pour frais de gestion non négligeables. Les dirigeants de sociétés qui tirent plus profit de leurs placements financiers que leurs investissements ? Les marchés financiers qui ont intérêt à ce que la financiarisation de léconomie se développe, confortant par là-même leur emprise sur elle ? En menaçant les groupes qui ne versent pas de dividendes suffisants de les laisser tomber en allant investir leurs masses énormes de capitaux ailleurs, ce que lon appelle autrement le corporate governance? En faisant pression sur les Etats qui ne pourraient pas régler leur dette publique détenue pour moitié par les FdeP ? En embarquant de force la société toute entière dans la spéculation, afin de mieux asseoir leur idéologie ? Car cest le trait caractéristique de cette dernière que de laisser croire que lintérêt de certains se confond avec lintérêt de tous. Ce ne sont pas les pensions du régime de retraite par répartition qui ont besoin des fonds de pension mais les fonds de pension qui ont besoin de largent des retraites du régime par répartition. Mais déjà le sauvetage dun régime de retraite napparaît plus comme un argument suffisant pour les défenseurs des FdeP. Ceux-ci ajoutent à leur vertu première celle de permettre aux entreprises, qui nen ont pas besoin, de trouver de nouvelles sources de financement. Ils semmêlent dans leurs contradictions : car pourquoi alors vouloir introduire à dose homéopathique (seulement le troisième étage du régime, le parachute de secours), ce qui ne manque plus dapparaître comme la panacée universelle en matière de développement économique ?
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