Brisons l'amalgame
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Depuis très longtemps l'immigration est associée à la misère. Ainsi, selon Michel Rocard, «on ne peut accueillir toute la misère du monde». L'ouverture des frontières développerait le chômage, conduirait à l'explosion des systèmes de protection sociale. Afin de préserver la dignité des immigrés, il faudrait que l'État contrôle les conditions matérielles de vie (ressources suffisantes, logement décent) pour que l'étudiant d'origine étrangère s'inscrive en fac ou qu'un étranger puisse venir rendre visite à sa famille vivant en France. Si l'on ne peut accueillir toute la misère du monde, encore faudrait-il combattre ce qui la génère. Autrement dit, on ne peut rendre responsables des personnes victimes des rapports Nord/Sud/Est : l'exploitation du Sud, de l'Est et l'abandon de certaines régions africaines par exemple. Lorsque le FMI et la Banque Mondiale imposent à certains gouvernements de développer des cultures d'exportation (coton, café, arachides) au détriment des cultures vivrières, il ne faut pas s'étonner que dans un premier temps ,les paysans viennent grossir les populations urbaines puis, devant la situation de plus en plus catastrophique, émigrent vers les pays du Nord. C'est une question de survie ! Actuellement le détroit de Gibraltar devient un immense cimetière où se noient tous les jours des êtres humains fuyant la misère, la répression ou voulant tout simplement vivre ailleurs. Il y a quelques années beaucoup dénonçaient l'existence des boats-peoples flottant au large du Viêt-nam (Bernard Kouchner, actuel Ministre de la Santé, par exemple). On aimerait bien les entendre à propos des embarcations de fortune qui essayent de franchir le détroit de Gibraltar ! Jusqu'à présent les frontières ne sont pas ouvertes au contraire, elles ont plutôt tendance à se refermer! et nos conditions de vie ne cessent de se dégrader : développement du chômage, de la précarité, de la misère, remise en cause d'acquis sociaux C'est démagogique d'en faire reposer la responsabilité aux immigrés. Plus on durcira les lois concernant l'immigration plus on renforcera la précarité. l'État ne pourra jamais expulser tous les sans papiers, pour au moins trois raisons :
mais surtout la raison profonde est d'ordre économique. L'existence de sans papiers permet de renforcer la précarité de l'exclusion et donc de faire pression sur le marché du travail en faveur des capitalistes. Ainsi, lutter contre l'exclusion sociale et la précarité suppose de se mobiliser pour la régularisation globale de tous les sans papiers. Sous couvert de dignité, l'État réglemente les conditions de vie des personnes d'origine étrangère. En 1982 Badinter, alors ministre de la justice, crée les certificats d'hébergement pour, selon les dires du ministre, lutter contre les marchands de sommeil et autres exploiteur de la misère du Tiers Monde. La principale motivation du gouvernement de l'époque (le socialiste Pierre Mauroy est à Matignon) est déjà de contrôler les flux migratoires. Debré n'a fait que prolonger cette disposition en imposant aux personne accueillant des étrangers de déclarer en plus leur départ. Ceci montre une chose : lorsqu'on prend des mesures spécifiques, même en se retranchant derrières des raisons humanitaires, sur des populations spécifiques cela conduit toujours à la criminalisation de celles-ci. De même, la circulaire Sauvé/Marchand impose qu'un étudiant étranger puisse justifier de 2300 francs par mois. Pourquoi les étudiants étrangers et pas les étudiants français ? Les français auraient-ils des capacités de survie plus importantes que les étrangers ? Il est évident qu'il est très difficile de survivre avec des revenus aussi faibles (le RMI impose aussi des logiques de survies : vols, travail au noir). Pour obtenir des certificats d'hébergement il faut justifier d'un logement ayant un minimum de surface au sol, d'un minimum de pièces, etc. Certes il paraît difficile de vivre à 4 dans un studio ; mais c'est aussi vrai pour des personnes d'origine étrangère que pour des Français ! Ainsi, la question n'est pas d'établir des planchers qui déterminent l'autorisation de séjour en France, mais bien de lutter contre la misère dont sont victimes aussi bien des «Français de souche» que des personnes d'origine étrangère. | |
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