Resent-Date: Wed, 23 Apr 1997 15:53:57 +0200 Mime-Version: 1.0 To: marches97-forum@ras.eu.org From: Michelle PROUZEAUSubject: Marches italiennes Resent-From: marches97-forum@ras.eu.org Reply-To: marches97-forum@ras.eu.org X-Mailing-List: archive/latest/28
Nous sommes 2 à avoir suivi les initiatives italiennes la semaine du départ des marches.
Les comptes-rendus obligatoirement brefs des carnets et du journal destinés à une large diffusion, ne permettent pas de livrer les témoignages et questionnements recueillis au cours de ces rencontres.
Nous vous livrons donc à travers le forum ces notes de voyage. Pour l'instant un problème technique de récupération de fichiers ne nous permet d'en envoyer qu'un seul. Celui-ci concerne l'initiative napolitaine.
La situation italienne est complexe, il n'est pas possible de décrire les "marches", puisqu'il n'y a pas de marches. Mais de nombreux débats ont parcouru les différentes assemblées auxquelles nous avons assistées. Nous essayons ici de vous en donner un compte-rendu. Un point communu :
TOUTES CES ASSEMBLEES ONT DECIDE DE MULTIPLIER LES ACTIONS PENDANT LES SEMAINES QUI PRECEDENT LE RASSEMBLEMENT A AMSTERDAM ET D'ENGAGER UNE MOBILISATION LA PLUS LARGE POSSIBLE POUR CET EVENEMENT.
Premier envoi : Naples, le 2ème jour des initiatives.
Naples, le 15 avrilC'est dans l'ancien chateau fortifié d'Acerra que se tient la réunion publique organisée par le Comité des Marches pour le travail en Europe. Ce comité rassemble plusieurs collectifs de chômeurs et précaires de la région napolitaine, phénomène rare en Italie. En effet, Naples est la seule région où existe une tradition de "lutte pour le travail" très forte. C'est en milliers qu'il faut compter les adhérents de l'ensemble des associations.
Le mouvement a vu le jour en 1974 ; il a connu des hauts et des bas liés au
type du mouvement (création d'une liste, combat pour les inscrits, ouverture
d'une autre liste...), mais également aux aléas de la gauche radicale
italienne. Deux moments de lutte ont été particulièrement intenses.
Les années 81-84 où des manifestations à certains moments quotidiennes de
20 000 à 30 000 personnes ont permis d'obtenir un revenu minimum pour les
sans-emploi pendant un an. Cette mesure de courte durée et la situation
politique de l'Italie ont amené une certaine démobilisation.
Le mouvement
renaît en 1991 sous l'impulsion de militants politiques regroupés autour de
la publication de la revue "Officina". Il adopte deux revendications
principales qui sont à la fois facteur de cohésion et de fragmentation :
un revenu minimum garanti
un travail pour tous.
Les luttes des dernières années ont permis d'obtenir pour les 1300 adhérents du mouvement "Banchi Nuovi" huit mois de cours. Mais cette période arrive à son terme et aucun espoir de débouché n'est en vue.
Carmine (Sin. Cobas) fait remarquer la détermination de ces militants : " Jamais un mouvement n'a été aussi durement réprimé. En 20 ans, ils ont accumulé plus de 2000 procès. Certaines personnes ont subi 10 à 15 condamnations." Cette répression continue, le pouvoir organise 2 maxi-procès au mois de juin mour blocages de routes, de gares, occupations...
C'est donc dans un contexte tendu que s'ouvrer cette réunion sur les
Marches. Les interventions autres que celles dénonçant le néo-libéralisme,
portent sur trois points :
1. La nécessité de sortir de la problèmatique locale dans laquelle le mouvement est enfermé depuis sa naissance. La forte combattivité n'a pas permis d'obtenir des résultats très satisfaisants. " si nous cultivons uniquement notre potager, nous pouvons recueillir notre plat de lentilles, mais il sera chaque fois plus réduit, plus petit, dit Maria Pia des Corsisti Organizzati."
2. La nécessité de construire même localement un mouvement unitaire. En effet à Naples, les sans-emploi n'appartiennent pas au même collectif que ceux qui sont en formation, et c'est un autre mouvement qui organise les précaires employés par l'Etat, les "travailleurs socialement utiles". Les actions sont dispersées : le 16 avril à Naples, les "travailleurs socialement utiles" ont bloqué le départ des trains pendant une grande partie de la journée pour obtenir la prolongation de leur contrat ; les "corsisti organizzati" formait une chaîne humaine l'après-midi pour avoir du travail à la fin de leur formation. Un exemple de la forte mobilisation et de son manque d'unité.
3. La difficulté de s'associer à un parti (Partito Rifondazione Communista) qui prépare cette "grande marche contre le néo-libéralisme" mais, d'une part, est absent des leuttes locales des chômeurs, et d'autre part, soutient un gouvernement qui prépare des lois contre les travailleurs. Le projet incriminé est le projet "Treu" qui instaure le système privé de l'interim jusqu'alors inexistant en Italie, système instauré sans prévoir la moindre la moindre sanction à l'égard des agences qui ne rsepecteraient pas le droit du travail. De fait, la veille, à Crotone un responsable du PRC s'était élevé contre l'utilisation du symbole de la marche "le petit pied", dans un tract appelant à la mobilisation contre ce projet.
Ces dernières interventions questionnent sur le problème de l'indépendance du mouvement social face aux partis politiques en particulier ceux impliqués dans des enjeux électoraux. AC! a rappelé son attachement à préserver en France cette indépendance.
Le "Comité des Marches pour le travail en Europe" n'en reste pas moins unitaire. Les chômeurs de Naples souhaitent venir à Amsterdam le 14 juin. Mais dans un pays où le revenu minimum n'existe pas, le problème du coût est dramatique. Ils n'envisagent pas de parvenir à organiser un déplacement sans un soutien financier.