LA TRIBUNE
21 juillet 1999

 

Après les OPE, Elf et TotalFina sont prêts à jouer l'ouverture

Le conseil d'administration de TotalFina devrait se réunir dans la journée pour examiner l'offre d'échange d'Elf Aquitaine présentée lundi par Phillipe Jaffré. A priori, ses délibérations devraient se dérouler sans surprise majeure. Le PDG de TotalFina, Thierry Desmarest, a déjà fait part de son sentiment sur l'OPE de son concurrent Elf : il s'agit, sur le fond, du même schéma de rapprochement qu'il propose lui-même, excepté la scission entre pétrole et chimie, contestable aux yeux de TotalFina. « Nous continuons tranquillement notre chemin et il n'est pas question de surenchérir. Philippe Jaffré a pris le risque de faire juger les deux offres par le marché et le marché ne croit pas à la sienne », confie, pour sa part, un proche du camp TotalFina.

Très sceptiques vis-à-vis du projet d'Elf, les syndicats maintiennent leur pression. « Les personnels sont en première ligne », a estimé hier le représentant FO du groupe qui craint de voir le chiffre des suppressions d'emplois (6.000, dont 2.000 en France) s'alourdir. Par ailleurs, les syndicats d'Elf Exploration-Production se prononceront à la fin de la semaine sur une proposition de la direction visant à mettre fin au conflit en cours à Pau.

Sur le terrain boursier, les choses suivent leur cours. La Commission des opérations de Bourse a donné hier son visa à l'OPE de TotalFina, après le feu vert du Conseil des marchés financiers qui avait jugé l'offre recevable. Première conséquence : Elf devra se prononcer officiellement sur l'OPE de Total dans les cinq jours suivant l'obtention du visa. Concernant Total, son OPE sera ouverte officiellement pendant une durée de 35 jours de Bourse après la publication dans la presse de la note d'information de TotalFina visée par la COB. Ce qui fait courir l'offre jusqu'à la première quinzaine de septembre.

« Caractère attractif. » Thierry Desmarest ne doute pas de sa réussite, étant donné son « caractère hautement attractif ». Mais il ne ferme pas pour autant la porte à Elf désormais convaincu de l'intérêt d'un rapprochement. « Je pense qu'avec la plus grande convergence qui vient d'apparaître sur le projet industriel, nous avons plus de chances d'arriver à une opération amicale sur des bases raisonnables », a-t-il déclaré hier au Figaro. Philippe Jaffré a choisi le même journal pour lui répondre. Et les deux propos publiés côte à côte font montre d'une même volonté d'ouverture. « Mon approche n'a jamais été hostile à l'égard de quiconque, assure le président d'Elf. Je pense que la présentation de notre projet va à son tour accélérer la maturation des idées de Thierry Desmarest et des équipes de TotalFina. »

Il est sans doute encore trop tôt pour parler d'une ébauche de compromis entre ces deux grands patrons à la personnalité affirmée. « Philippe Jaffré n'est pas aujourd'hui dans cette logique. Mais il n'y a pas de fermeture a double tour », confie un proche du président d'Elf. Un conseiller de Total fait chorus : « Tout le monde a l'air d'accord pour penser que cette affaire devrait devenir amicale. Nous sommes prêts à faire une place au management d'Elf. C'est dans l'intérêt de tous de se retrouver autour de la table. » Et surtout d'éviter que cette bataille pétrolière ne tourne à l'interminable et confuse mêlée qui divise actuellement la banque française.

Aline Richard