Le pourquoi de notre action |
La victoire du
système Elf Quel est lenjeu du conflit social chez Elf ? On a beaucoup dit que la grève contre les suppressions demploi annoncées par la compagnie pétrolière était dun type nouveau. Une grève " moderniste " puisque les salariés ont notamment paralysé les centres informatiques. Soit le conflit a effectivement pris des formes inhabituelles. Mais sil est révélateur, cest aussi pour des raisons encore plus profondes. Il faut, en effet, avoir à lesprit que le groupe Elf est la caricature de ce vers quoi évoluent tous les grands groupes français. Alors que les investisseurs étrangers détiennent désormais près de 37 % du capital des entreprises françaises cotées à la Bourse de Paris, ce taux de participation, dans le cas dElf, dépasse 50 %. Dans le capital dElf, on trouve, de plus, tous les grands fonds de pension américains. De son côté, le patron dElf, Philippe Jaffré, est, de tous les chefs dentreprise français, celui qui a le plus tôt pris en compte les commandements de rentabilité exigés par ces fonds. Des commandements qui tournent autour dun slogan : créer de la " valeur " pour lactionnaire. Le conflit dElf trouve ici sa racine : comme ces fonds exigent des entreprises une rentabilité de très court terme Alcatel sest fait sanctionner en Bourse pour lavoir oublié , ils ne se soucient guère que les cours pétroliers pourraient progressivement remonter, ce qui rendrait les investissements de la compagnie plus rentables. Non, ils exigent des coupes claires immédiates. Bref, laffaire Elf est révélatrice dune radicalisation du patronat français, sous la pression de la mondialisation. Le gouvernement a-t-il pris la mesure de cette évolution ? On peut en douter. Dans certains cercles socialistes, la mode est toujours à parler de " lentreprise citoyenne ". On connaît la ritournelle, souvent entonnée par Martine Aubry ou Dominique Strauss-Kahn : certains grands patrons auraient à cur que leur entreprise soit rentable mais ne négligeraient pas pour autant les questions sociales. On sent bien, pourtant, que cette présentation de choses est fallacieuse. En conduisant une politique de privatisation à marche forcée, et en ouvrant le capital des firmes aux investisseurs étrangers, dans des proportions inconnues aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, les socialistes ont accepté, bon gré, mal gré, que progressivement toutes les grandes entreprises françaises soient soumises à une logique nouvelle. Une logique au terme de laquelle seul lactionnaire compte. Une logique strictement boursière. Mais, dans un système déconomie ouverte, que peut donc faire le gouvernement pour sy opposer ? Quoi quil en dise, il dispose
de nombreux moyens pour contenir cette évolution.
Dabord, il serait bien inspiré de freiner ces
ardeurs privatisatrices. En second lieu, il arrive
souvent que lEtat dispose encore de pouvoirs de
régulation, pour contenir les appétits dévorants des
marchés financiers. On se souvient ainsi que dans le cas
de la bataille qui oppose la BNP à la Société
générale et Paribas, la loi lui donnait les moyens pour
que lavenir du système bancaire français ne se
joue pas que sur le seul terrain boursier. Mais le
gouvernement a finalement baissé les bras. Ce qui
nest guère rassurant : le système Elf est en
passe de lemporter. |
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