GROUPE DE REFLEXION et D’EXPRESSION
"  DEVELOPPEMENT DE L’ EP A ELF "

 

1. Introduction

Le personnel n’est pas du tout convaincu de la justesse de l’analyse de la direction qui motive ce plan et est inquiet pour la pérennité de L’Exploration Production (EP) à Elf, d’autant que cette analyse et les arguments avancés ne sont pas étayés par des données vérifiables, pertinentes et fiables.

Le changement de périmètre, tel qu’il a été annoncé ne peut se faire qu’au détriment de notre savoir-faire qui est une des richesses et un pilier de notre branche.

Le plan de réduction des effectifs et d’externalisation est la seule réponse apportée à l’analyse des dysfonctionnements des services centraux. D’autres solutions existent pour améliorer le fonctionnement de l'EP.

 

Or, pour les services centraux (Elf EP) le plan est justifié par la direction par deux arguments principaux :

Les tarifs des services centraux de l’EP sont trop chers " (+ 10 à 40% que nos principaux concurrents, mais au même niveau qu’Amoco et Shell !)

la charge de travail des services centraux de l’EP devrait diminuer " ( - 30% à l’horizon 2005 )

Il faut savoir que les services centraux ont été artificiellement organisés en centre juridiquement autonome. Et donc les notions de tarif sont tout aussi artificielles et arbitraires.

Le tableau de comparaison du nombre de barils produits par personne dans les diverses compagnies ne traduit que des différences structurelles, mais pas des différences d’efficacité. Cette corrélation n’est pas significative pour les services centraux de l’EP, car les études sont corrélées aux développements et non à la production.

L’argument de non-similitude avec les autres opérateurs n’est pas un argument économique. Céder à la mode n’est pas une méthode de management et n’emporte pas l’adhésion du personnel.

C’est parfois ceux qui ne cèdent pas aux modes qui sont les gagneurs. Si nous sommes actuellement dans les meilleurs en production et exploration sur le plan économique (Normes US), sachons être fiers de notre différence et anticiper le retour de balancier.

Nous proposons donc d’analyser les arguments économiques avancés et de trouver d’autres solutions avec la Direction pour rester au niveau d’excellence.

 

2. " Nos tarifs sont trop chers " !

2.1 Nous contestons cette analyse :

En remarque préliminaire, nous rappelons que la partie " Etudes " faite par les services centraux de l’EP ne représente en moyenne que 2 à 3% du coût total d’un projet de développement.

La valeur ajoutée par la qualité de nos travaux au niveau de la branche Exploration Production n’est pas prise en compte.

Dans l’étude de comparaison des services centraux de l’EP avec l’expérieur : si l’on avait pris une valeur exacte comme la moyenne pondérée calculée sur l’exercice 97 et non un budget 99 aux hypothèses inconnues, on aurait fait apparaître les services centraux de l’EP dans le groupe des meilleurs avec un tarif horaire d’environ 30% de celui annoncé !

La comparaison avec les tarifs des sociétés anglo-saxonnes est sans objet, car le système français de comptabilité analytique de coût complet utilisé pour leur calcul n’est pas comparable avec le système anglo-saxon (direct cost).

L’analyse des tarifs faite par la Direction n’est pas probante. Il y a trop de flou dans l’étude. La non communication de certaines informations au niveau de la branche montre la volonté de la Direction de masquer les coûts réels.

Les dépassements au delà des seuils de régies plafonnées ne font que rarement l’objet d’avenant parce que nous ne travaillons pas dans une véritable relation contractuelle mais plutôt dans un esprit de service.

Beaucoup de nos prestations d’assistance en ligne qui participent à la performance de nos filiales ne sont pas facturées.

La sous-traitance comme dogme n’est pas la garantie d’une meilleure qualité au moindre coût. Il y a un risque important de perte de savoir-faire et donc de maîtrise technique.
Aucune étude sérieuse n’a montré que la sous-traitance envisagée améliorait les coûts. Beaucoup d’études sur les services informatiques tendent à démontrer un surcoût dû à cette sous-traitance.
Une étude de IPA (Independent Project Analysis) chez les majors pétroliers montre qu’en général le passage massif à la sous-traitance se traduit souvent par des surcoûts de 15 à 20%.

La compétence du personnel des fonctions de soutien intègre les spécificités de l’industrie pétrolière. Ce qui ne serait pas le cas de sous-traitants à vocation générale.

2.2 Propositions pour rétablir une vérité des coûts contrôlables

Mise en place, pendant une période suffisamment longue, d’un système comptable qui permette une réelle transparence des coûts.

Mise en place de personnel suffisant et ayant un véritable professionnalisme commercial. La Réorganisation des Directions Techniques (RDDT) mise en place il y a un an, avec la promesse de travailler " à périmètre constant " n’a pas démontré l'efficacité de cet aspect commercial des RGC.

Concernant l’informatique le document " Analyse de l’aspect du système d’information " critique "l'étude performance des services centraux de l’EP " et propose une alternative à l’externalisation.

Travaillons avec une meilleure répartition du personnel existant plutôt que de sous-traiter massivement ses activités, avec tous les risques précités.

3. " Notre charge de travail va diminuer " !

3.1 Nous contestons cette analyse :

Dans la préparation du budget et des tarifs 99, les recettes ont été volontairement minorées d’environ 10%.

Le marché des matières premières est caractérisé par des fluctuations des cours. Une entreprise de ce secteur doit être capable de s’adapter sans détruire son potentiel humain à la première difficulté. L’évolution récente du prix du brut en montre l’évidence (de 9 USD à 16 USD).

Il n’y a pas de stratégie claire de développement industriel. Il n’y a aucun message technique, notamment en matière de stratégie d’exploration, comme auparavant.

Peut-on se permettre d’avoir un ROCE (Retour sur capitaux employés) élevé et de racheter des actions (vision à court terme) alors que l’on est parmi les plus mauvais en durée de vie des réserves (vision long terme).
La direction privilégie ainsi le court terme au détriment du long terme.

Il y a donc une volonté managériale de ne se concentrer que sur de gros objets rentables. N’est-ce pas très risqué de mettre tous nos œufs dans le même panier ?

Nous savons que les Directions de certains concurrents imposent aux responsables filiales de remonter un quota d’études aux services centraux. L’EP est probablement le seul fournisseur au monde à proposer à ses clients de voir ailleurs s'il n'y aurait pas moins cher

3.2 Propositions

Nous proposons de créer les conditions pour que la charge de travail revienne. Ceci implique :

Une véritable stratégie d’entreprise et de développement de nos réserves qui soit perceptible par le personnel.

Un budget de pré - reconnaissance conséquent et valorisé.
Cela implique de redonner les capacités d’imagination et d’invention aux explorateurs en donnant les budgets adaptés et d'avoir une bonne adéquation entre le budget Exploration et le renouvellement nécessaire des réserves.

Une diversification. Ne pas se concentrer que sur des gros objets. Ne pas laisser tomber les petits et moyens gisements rentables (même si leur VAN n’est pas au niveau imposé par le management à court terme ).

Un suivi actif du non opéré pour contrôler les opérateurs et acquérir du savoir-faire.

De restaurer l’importance de la R et D, pour assurer le long terme et en valoriser les résultats.

Une diversification vers les métiers d'énergie.

La création de compétences pour le renouvellement des réserves après 2010 sur les hydrocarbures non conventionnels.

Le travail, c’est comme l'œuf et la poule. En créant les conditions de succès, le travail revient ; et en ayant un bon taux de charge, les coûts des prestations baissent. La boucle est bouclée.

On peut, dans un premier temps, faire du dumping sur certains tarifs (la différence étant pris en charge par le Groupe et l’EP) comme toute entreprise qui cherche à se lancer et voir ensuite l’effet sur la charge de travail.

Donner la possibilité de travailler pour d’autres clients que les filiales, avec une structure interne adaptée.

Faire un plan de transfert de compétence par compagnonnage si des départs à la retraite sont prévus. Il faut avoir de quoi former les jeunes avant d’éliminer notre gisement de connaissance qui est la base de notre patrimoine.

Regréer des compétences disparues ou en voie de disparition (maintenance, inspection, traitement soufre, traitement gaz, sous-marin, architecture pétrolière, grands fonds, etc...)

4. Conclusions

4.1 Nous sommes prêts à travailler pour restaurer l’image de marque des services centraux de l’EP, qui a été ternie par des fautes de management. Le personnel ne demande qu’à travailler, mais dans le cadre d’une véritable stratégie industrielle ambitieuse.

4.2 Un accroissement d’activités devrait permettre à chacun d’apporter sa contribution dans une structure modifiée mais sans externalisation, avec reprise d’un courant d’embauche pour revenir à une pyramide des âges qui préserve l’avenir et offrir de l’emploi à nos jeunes.