Paris, le 22 janvier 1999
à Monsieur Lionel JOSPIN, Premier Ministre
Monsieur le Premier Ministre,
Nous devons une fois de plus attirer respectueusement votre attention sur des faits graves survenus au Laboratoire de Physique Corpusculaire du Collège de France, faits qui malheureusement ne sont pas exceptionnels et dont la généralisation croisssante met en danger l'avenir de la recherche scientifique dans le pays. Malgré de lourdes menaces, dont celle (ayant à plusieurs reprises reçu un début d'exécution) de licenciement de ses membres, notre Intersyndicale s'est rassemblée pour dénoncer ces dysfonctionnements dans le cas du LPC. En dépit de nombreuses interventions de parlementaires et de votre attention bienveillante, les faits dénoncés se poursuivent en toute impunité (voir notre page web pour un rappel). Les litiges créés par la politique de destruction de notre laboratoire ont généré de nombreux contentieux, dont une plainte pénale pour discrimination (signée par des agents ainsi que par des organisations syndicales et antiraciste) et des saisines d'instances européennes chargées de veiller au respect des Droits de l'Homme.
En mai 1998, le Ministère de tutelle a nommé, pour examiner la situation du LPC, une commission dont la composition, le fonctionnement et l'efficacité étaient contestables. Elle comprenait un membre haut placé de la hiérarchie de l'IN2P3. Son mandat était biaisé: la lettre de mission attribue la crise du LPC à des "conflits de personnes". Ses prérogatives étaient limitées: elle n'a mené aucune enquête administrative. Depuis sa création, aucun moratoire n'a été appliqué sur les mesures de "restructuration" contestées: les expulsions de personnels et le harcèlement professionnel se sont poursuivis. Le rapport de la commission, rendu le 16 novembre, resterait inconnu de la Direction Générale du CNRS et du Comité d'Ethique pour les Sciences (COMETS), qui en ont demandé communication. Sa remise au Ministère s'est doublée d'une intensification des voies de fait au LPC: les outils de travail et de communication dont disposaient encore les personnels exclus de la "nouvelle unité" litigieuse ont été supprimés, le câblage informatique de tout un étage a été coupé. Des moyens budgétaires et matériels reçus dans le cadre de contrats extérieurs (e.g. européens) sont rendus inutilisables. Plusieurs agents sont obligés de financer de leurs deniers leurs déplacements professionnels. De surcroît, des documents prouvent la mise en oeuvre, depuis 1996, de procédures à caractère psychiatrique qui constituent de vraies machinations ourdies à l'insu des intéressés et visent notamment notre Intersyndicale.
Nous avons l'honneur de vous demander de bien vouloir: a) intervenir d'urgence pour mettre fin à ces pratiques et rétablir les moyens de travail des personnels; b) nous communiquer le rapport diligenté par Monsieur D. NAHON et nous permettre, avant toute décision, de nous exprimer sur son contenu; c) vu les éléments nouveaux et l'existence voies de fait grossières, ainsi que les carences inévitables de ladite commission que notre Intersyndicale n'a pas rencontrée, ordonner la réouverture de l'enquête sur le LPC.
Veuillez recevoir, Monsieur le Premier Ministre, l'expression de notre très haute considération.
R. BRUERE-DAWSON, SNTRS-CGT
J. MAILLARD, SNCS-FSU
G.MAUREL, SNESup-FSU
A. JEJCIC, SNPCEN-FSU