28 Juillet 2001 - INTERNATIONAL

Francis Wurtz : L'inacceptable attitude de la police

Le président du groupe de la gauche unitaire (GUE-Verts nordiques) au Parlement de Strasbourg, était présent à Gênes jeudi dernier. Il tire les enseignements des événements survenus lors du sommet du G8.

Quel bilan tirez-vous du sommet du G 8 ?

Francis Wurtz. C'est tout d'abord un immense succès car les manifestants étaient très nombreux. J'ai assisté, juste avant la tenue du G 8, à une très grande manifestation (60-80 000 personnes) extrêmement chaleureuse, sans le moindre incident. J'ai vu des jeunes très ouverts sur la société, pas du tout nihilistes. On a d'ailleurs tort de parler d'" antimondialistes ". Ils ne sont pas contre la mondialisation, ils sont contre la mondialisation libérale.

Pourquoi certains des manifestants se sont-ils attaqués aux policiers italiens ?

Francis Wurtz. Parce que le dispositif de sécurité mis en place par la police italienne était une véritable provocation. Alors que l'on savait que 150 000 personnes devaient venir, ils ont fermé l'aéroport, le port, toutes les gares. Sur la route, les contrôles ont été incessants. Dans la ville, cet hideux rideau de fer, qui encerclait complètement le centre de la vieille ville était une véritable une incitation à la violence. Il faut savoir aussi que les responsables italiens ont laissé les casseurs se déchaîner. Il ne sont pas intervenus tout de suite contre ces groupes, entraînés et motivés pour la " casse ". En revanche, les policiers ont frappé sans discernement parmi les manifestants. Ils ont eu une attitude inacceptable.

Ces violences n'ont-elles pas décrédibilisé les mouvements de lutte contre la mondialisation libérale ?

Francis Wurtz. La présence de ces casseurs pose un vrai problème. Je n'englobe pas parmi eux ces jeunes manifestants qui ont utilisé la violence à Gênes pour se défendre ou attaquer les policiers italiens, grisés par le contexte ambiant. Il y a un très fort courant qui souhaite aujourd'hui isoler ces casseurs du mouvement de lutte contre la mondialisation libérale. Nous devons désormais nous séparer des casseurs. C'est très important car il y a un risque de confusion auprès de l'opinion publique. La victime ne faisait pas partie des casseurs. Aujourd'hui, je pense qu'il y a un courant dominant qui pousse à se départir le plus explicitement possible des casseurs.

Comment cela est-il possible ?

Francis Wurtz. Il faut un service d'ordre. On ne peut plus se contenter de spontanéité. Et il faut, dans les discours, afficher clairement sa différence avec ces groupes extrêmement déterminés. Il ne faut pas les laisser s'assimiler avec les " antimondialistes ".

Vue la diversité des composantes des " antimondialistes ", est-il possible d'obtenir une unité, qui permettrait notamment d'imposer l'exclusion des casseurs ?

Francis Wurtz. Cette diversité est à la fois la force et la limite de ces mouvements. J'ai vu dans ces manifestations, à la fois des catholiques brandissant le portrait de Jean-Paul premier et des socialistes contestataires. Cela prouve que si le mouvement social est nécessaire, il n'est pas suffisant pour remplacer une intervention politique. C'est la question du moment. Comment articuler la juste et riche diversité des mouvements sociaux et l'intervention politique ?

Entretien réalisé par Damien Roustel