[ SAMIZDAT ]


«Une dynamique
s'est mise en place»

Entretien avec François Desanti
est secrétaire national du comité CGT des "privés d'emploi".

 

Que penser des actuelles propositions du gouvernement ?

- C'est très insuffisant. Mais c'est un début de résultat du mouvement. Le rapport de force oblige le gouvernement à regarder de près ce qui se passe du côté de ceux qui sont le plus en difficulté, chômeurs, exclus, RMistes.
Sur les transports, dans les propositions de Gayssot, il n'y a pas un franc de pris au patronat, alors qu'il bénéficie en premier des infrastructures de transport, notamment dans la région parisienne. Notre revendication est la gratuité des transports pour les chômeurs et leur famille.
Quant à Martine Aubry, elle répète ce qu'on savait déjà et que nous avions jugé insuffisant. Les 500 millions devaient déjà être versés depuis juillet 1997, pour pallier à l'Allocation formation reclassement (AFR) nouvelle version, depuis que Juppé s'en était désengagé.

 

Quelles sont vos propres revendications ?

- D'abord la prime de 3 000 francs. Ensuite une refonte du système d'indemnités pour arriver à un revenu décent pour tous, quelle que soit leur situation au regard des règles actuelles (ASS, RMI, AUD, jeunes). Pour nous, c'est 80 % du SMIC revendiqué par la CGT. Nous voulons aussi évidemment le rapatriement des fonds sociaux de l'ASSEDIC. Et plus généralement, il faut une véritable politique de création d'emplois, notamment par la loi-cadre sur les 35 heures. S'il n'y a pas un rapport de force vis-à-vis du patronat, on peut avoir des doutes.

 

L'unité entre les chômeurs CGT et les associations est nouvelle...

- C'est une bonne chose et tout le monde s'en félicite. Il y a la même volonté commune d'arriver à des résultats cohérents sur l'unité. D'autre part, c'est le terrain qui explique les choses. Les chômeurs ne sont suffisamment organisés. L'unité apparaît comme incontournable.

 

Pourquoi la CGT choisit-elle l'appellation de "privés d'emploi"?

- Dans le langage quotidien, nous parlons aussi de "chômeurs" ! La démarche politique de l'expression "privés d'emploi" pointe l'aspect privation, au regard de la Constitution qui prévoit le droit au travail, dont 5 à 7 millions de personnes sont privées. En outre, nous considérons que les chômeurs sont partie intégrante du salariat. Les chômeurs bénéficient d'un salaire différé, produit des cotisations sociales, au même titre que ceux qui sont en arrêt maladie ou en retraite.
De plus, les associations de chômeurs n'auraient pas de raison d'être s'il n'y avait plus de chômage. En revanche, un adhérent de la CGT chômeur, s'il retrouve un boulot, s'il veut continuer à adhérer à la CGT, il pourra toujours se défendre avec son organisation première. Cela ne peut pas être le cas pour une association et c'est la limite du débat.
Certes, il y a une distance entre les chômeurs et les syndicats. C'est pour cela que l'attitude des autres organisations syndicales ne va pas. Nous gagnerions tous en efficacité, c'est-à-dire le mouvement social avec les salariés actifs, si l'ensemble des syndicats avait la même démarche que nous. D'ailleurs nous le souhaitons. C'est la dynamique qui devrait prévaloir.
Je ne sais pas ce qui va sortir de la situation, mais ce que je crois, c'est que le mouvement social ne pourra plus compter sans les chômeurs. Une dynamique s'est mise en place.

Propos recueillis par Dominique Mezzi
Rouge ­ 8 janvier 1997



 
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