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Antenne ASSEDIC
17 janvier 98:
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METZ: «Ça ne va pas s'arrêter comme ça»
Date: Fri, 16 Jan 1998 18:09:46
From: owner-conflits_l@tao.ca
«Ça ne va pas s'arrêter comme ça» --------------------------------- A Metz, malgré les évacuations, la lutte sonne comme une résurrection. Libération, 16 janvier 1998 Metz envoyé spécial Jeudi, 3 heures du matin, Union patronale de Moselle (Upim) de Metz. Les manifestants sont encore une trentaine à occuper les lieux. Vers 21 heures, pourtant, la moitié seulement avait assuré qu'elle resterait. Mais voilà. La troupe n'arrive pas à partir malgré la fatigue, malgré la vie de famille. Lui a gardé son blouson Sernam sur le dos, elle sa petite veste droite. Il fait pourtant chaud «chez les patrons», et les CRS ne menacent même plus. Non, s'ils sont couverts, c'est parce qu'ils sont en partance, mais qu'ils n'y parviennent pas. Il y a toujours un café à boire, une discussion à entamer. Mais surtout une conviction: «Ça va continuer.» Et l'envie d'«en être». Qu'importe qu'ils soient «crevés», «nazes», «exténués»: ils tiennent, et tiendront «tant qu'il faudra». Fiers et heureux. Comme Aurélia, 43 ans, chômeuse depuis huit ans. Pour elle, cette lutte sonne comme une résurrection. Elle somatisait, s'en voulait, «avant». Avant le 2 janvier, quand elle a rejoint le mouvement et arrêté les calmants. Et la voilà qui parle, fort, avec son accent roumain. Qui harangue les «copains»: «Il faut réveiller les esprits qui ont peur de s'exprimer. Ceux qui n'ont plus d'identité, plus de fierté. Ou les chômeurs qui ne nous rejoignent pas, de peur de perdre les quelques aidesqu'ils ont.» Elle hausse encore la voix: «Avant, j'avais honte de dire que j'étais au chômage. Honte de me sentir inutile, rejetée. Je sentais la mort, chaque minute. Regardez mes cheveux: ils sont blancs. A 43 ans. Aujourd'hui, c'est fini tout ça. Je suis heureuse.» Autour, certains évoquent 68. Les barrières sociales qui tombent, les discussions qui s'improvisent. Il y a là Jean-Luc, SDF; Alain, ex-PDG; Fouad, lycéen; Monique, vingt ans de chômage; Anne-Marie, prof. Et d'autres, dont beaucoup de CGT et quelques AC! Beaucoup assurent que de «nouvelles têtes» viennent chaque jour élargir le cercle d'une soixantaine d'hommes et de femmes qui, sur la ville, font les trois-huit, se relayent, à coups d'occupations et de tractages. Et, à chaque nouvelle tête, une victoire. Un signe que «ça ne va pas s'arrêter comme ça». Même si, et ils en conviennent, les déterminés ne sont pas nombreux. Mais eux qui dorment sur la moquette, avec le blouson en oreiller ou en couverture, sont sûrs de leur force. Il n'y a qu'a voir ce billet de 100 F tendu depuis une Audi, devant les locaux occupés, et cette petite phrase: «C'est pour vous. Pour vous aider.» Il n'y a qu'a voir Gilbert, 40 ans, mineur de charbon, venu les soutenir, après avoir expliqué à ses «copains du trou» qu'eux «touchent 6,5 milliards de subventions pour 15 000 emplois. Tandis que les 3,5 millions de chômeurs n'ont eu droit qu'à 1 milliard». Il n'y a qu'a voir la manif de la veille, qui a réuni 1 500 personnes. Voir aussi Annie, 48 ans, conseillère d'une mission locale pour l'emploi, bientôt en fin de contrat. Mais soulagée. Car, depuis son bureau d'ANPE, elle en avait marre d'«être une pompe à incendie, un rouage pour maintenir les choses en l'état». La voix posée, les vêtements impeccables, la voici qui fusille «les stages bidons de formation qui ne correspondent pas aux besoins des entreprises» et «les petits boulots qui n'ont pas de sens». Alain, 38 ans, renchérit: «Avant, les politiques géraient la crise. Maintenant, ils gèrent la misère. Moi, je veux qu'ils luttent contre la misère.» A Metz, comme ailleurs: les manifestants sont exigeants. Des politiques, ils demandent plus que l'«aumône». Plus que «leur politique au coup par coup». Les CRS sont venus les déloger au petit matin. Mais c'était «sans importance»: il y a la manif de samedi en vue. Et d'autres occupations, plus tard. David Dufresne
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