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Analyse critique du 2ème rapport du gouvernement au Parlement sur les Institutions Financières Internationales, octobre 2000.

Agir ici, AITEC, CRID,
Avec la participation de : les Amis de la Terre, Conseil scientifique d’Attac, Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement

Cette analyse a été rédigée à partir des contributions de plusieurs associations mais le document final n'engage qu'Agir ici, l'AITEC et le CRID www.globenet.org/ifi

Lire aussi: Les activités du Fonds monétaire international et de la Banque mondial (Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie)

SOMMAIRE

Introduction
1- Une évolution positive en regard du rapport de juillet 1999
2- Les améliorations nécessaires pour le rapport 2001

3- Analyse du contenu

Le Fonds monétaire international (FMI)
1.2 Les activités du FMI
1.2.1 La surveillance
1.2.2 Les programmes et l’assistance technique 
1.2.3 Les programmes pour les pays émergents
1.3 La réforme du système financier international
1.3.1 Transparence et évaluation
1.3.2Rôle du Fonds dans la lutte contre la pauvreté
1.3.4 Prévention des crises
1.3.5 Régulation financière internationale
1.3.6 Renforcement de la surveillance et le rôle des standards financiers internationaux

La Banque mondiale
2.1.5 Le Centre International de Règlement des Différends 
relatif aux Investissements
2.2.1 Les priorités de la Banque à l’égard 
des pays les plus pauvres
2.2.3 La Banque mondiale face aux nouveaux défis 
des pays en développement

L'initiative PPTE
3.1 La mise en oeuvre de l’initiative PPTE
3.2 La lutte contre la pauvreté et le cadre participatif

Conclusion et Annexes

 


Introduction

En 1999, Agir ici, l’AITEC et le CRID et une quarantaine d’ONG françaises lançaient la campagne : “ Transparence, démocratie : les IFI aussi ! ”. L’un des objectifs de cette campagne était que le rapport du gouvernement au Parlement sur les Institutions Financières Internationales (IFI) soit rendu public en application de la loi de finances rectificative pour 1998[1].

Cet objectif a été atteint puisque le rapport 1999 a été transmis aux associations engagées dans la campagne par M. Laurent Fabius, à l’époque président de l’Assemblée nationale. Les associations ont ainsi pu rédiger une analyse critique du rapport et la transmettre au Parlement, au gouvernement, à d'autres décideurs et aux médias.

Cette année, Agir ici, l’AITEC et le CRID réitèrent cette initiative avec la participation de plusieurs associations et experts. Cette analyse critique du rapport du gouvernement est une synthèse de leurs commentaires. Elle ne reprend pas tous les points qui mériteraient débat mais se concentre sur quelques thèmes spécifiques  qui ont retenu l’attention des associations.

1- Une évolution positive en regard du rapport de juillet 1999

Le rapport 1999, qui se limitait pratiquement à une description technique du fonctionnement de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), brillait par sa vision idéalisée des institutions de Bretton Woods. Il se contentait de généralités et les positions défendues par la France au sein de ces institutions étaient à peine évoquées. Finalement, l’intérêt de ce rapport était à ce point limité que pour Jean Louis Bianco, président du Haut conseil de la coopération internationale, son “ contenu se résume à ‘circulez, il n’y a rien à voir’ ”[2].

Le rapport 2000 n’a pas rompu avec cette vision idéalisée mais démontre un réel effort de transparence, notamment sur les réformes entreprises au sein de ces institutions . Le rapport va au-delà des généralités institutionnelles et les données chiffrées sont plus nombreuses (rapports entre la France et les institutions, état d’avancement de l’initiative pour l'allégement de la dette des pays pauvres très endettés, créances françaises, etc.).

Ces progrès importants doivent permettre aux parlementaires, pour peu qu’ils s’en saisissent, d’engager un véritable contrôle des orientations françaises au sein des IFI. Il permet également aux associations de se positionner sur les politiques suivies et d’avancer des propositions de réformes. Ceci doit contribuer à un réel débat entre le Parlement, la société civile et le gouvernement français sur l’avenir des institutions de Bretton Woods.

2- Les améliorations nécessaires pour le rapport 2001

Les manifestations de Washington et de Prague ont démontré, une fois de plus, l’ampleur de la contestation à laquelle doivent faire face les institutions de Bretton Woods.  Depuis la crise asiatique, le FMI et ses politiques ont été vivement contestés, jusqu’au sein des institutions. La récente démission de Ravi Kanbur, coordinateur du rapport de la Banque mondiale sur le développement, un an après que Joseph Stiglitz, économiste en chef, a été remercié, témoigne de l’âpreté du débat. Les Républicains américains tirent à boulets rouges sur des institutions affaiblies : de Milton Friedman à Jeffrey Sachs et, plus récemment, la Commission de contrôle des institutions financières du Congrès et son célèbre Rapport Meltzer[3], beaucoup prônent un durcissement libéral. Pour les uns, cela passe par la disparition pure et simple de ces institutions ; pour les autres, par une réduction drastique de leurs prérogatives. Les institutions de Bretton Woods tremblent quelque peu, le débat ne fait que commencer.

Dans un tel contexte, on pouvait attendre du rapport du gouvernement au Parlement qu’il explicite les enjeux de ce débat, qu’il fasse état de propositions françaises pour une réforme ambitieuse du système international et qu’il développe une vision politique de l’avenir des institutions financières internationales. On peut, une fois encore, regretter que la France se contente d’un simple alignement sur des institutions en crise, sans jamais  remettre en cause les politiques du FMI ou de la Banque. Si le rapport fait allusion au rapport Meltzer, pour s'en démarquer sur la base d'une vision idéalisée des IFI, rien n’est dit sur les critiques de Joseph Stiglitz concernant le consensus de Washington, ni sur ce que révèle la récente démission de Ravi Kanbur. Le rapport aurait aussi pu répondre aux critiques et aux propositions de réformes proposées par les organisations de la société civile, françaises et internationales.

Plus précisemment, et dans un souci de plus grande transparence, il est nécessaire qu’à l’avenir le rapport présente un état des lieux des discussions et des débats au sein du Comité financier et monétaire international et au sein du Conseil d’administration de la Banque mondiale. Cela permettrait aux parlementaires et aux associations de mieux connaître les positions des administrateurs des différents pays, de les comparer avec celles de la France et d’intervenir dans le débat.

D’une façon générale, on regrettera le manque d’ambition du Trésor français dans ce rapport 2000. Rien de très novateur n’est dit – ou presque – sur les principes politiques qui doivent présider à la régulation du système international, sur l’articulation entre les institutions de Bretton Woods et les organismes des Nations unies, sur une régionalisation possible des institutions, sur le rôle possible de l’Europe dans la réforme de ces institutions et sur les discussions en cours entre les différents pays membres de l’Union sur cette question, etc. C’est ce qu’on aurait pu attendre du rapport du gouvernement du quatrième actionnaire de la Banque et du Fonds auprès de sa représentation nationale. A la lecture de ce rapport, il semble même que le Trésor soit aujourd’hui en retrait sur les propositions françaises de l’automne 1998, propositions qui n’étaient pourtant pas d’une grande témérité.



[1] Lorsqu’il a été demandé au Parlement, en décembre 1998, d’approuver au détour d’un article de la loi de Finances rectificative le changement de statut du FMI et pour 3,3 milliards de Droits de tirage spéciaux (DTS) d’augmentation de la quote-part de la France, les députés ont réagi. Ils ont adopté un amendement précisant que chaque année le gouvernement remettrait au Parlement un rapport présentant l’activité des institutions de Bretton Woods et de la France au sein du FMI et de la Banque mondiale. L’amendement adopté prévoit que : “ le Gouvernement remettra chaque année au Parlement, au plus tard le 30 juin, un rapport présentant :

a) L’activité du Fonds monétaire international au cours de son dernier exercice budgétaire […] ;

b) L’activité de la Banque mondiale au cours de son dernier exercice budgétaire […] ;

c) Les décisions adoptées par les instances dirigeantes du Fonds monétaire international : Conseil d’administration, conseil intérimaire, conseil des gouverneurs, et les instances dirigeantes de la Banque mondiale ;

d) Les positions défendues par la France au sein de ces instances dirigeantes ;

e) L’ensemble des opérations financières réalisées entre la France et le Fonds monétaire international, d’une part, entre la France et la Banque mondiale, d’autre part."

[2] Jean Louis Bianco, “  Démocratiser la coopération ”, Libération, 20 avril 2000.

[3] Rapport de la Commission de contrôle des institutions financières du Congrès américain sur les activités des institutions de Bretton Woods.