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Stratégie de l'OCDE

Yves Baunay

SNES. (Syndicat National des Enseignements de Second degré)

Stratégie de l'OCDE pour la croissance économique, les politiques publiques, la cohésion sociales, l'emploi et l'apprentissage tout au long de la vie

Paris, le 30 août 1999

L’OCDE (organisation de coopération et de développement économique) offre un cadre d’analyse, de propositions et recommandations pour l’action des gouvernements très élaboré et très cohérent.

A cette fin, une mise en cohérence est recherchée. Le but affiché est d’anticiper et d’accompagner les changements nécessaires des économies et des sociétés entre la restructuration des systèmes d’enseignement formel (avec l’apprentissage tout au long de la vie comme objectif), les politiques sociales axées sur le développement de l’employabilité et l’incitation au travail, les politiques du marché du travail visant la flexibilité du temps de travail et des coûts salariaux.

L’élaboration des documents et rapports se fait de façon très consensuelle au niveau des comités ministériels. Elle associe certaines organisations syndicales à travers le TUAC (Trade Union Advisory Committee) et des organisations patronales à travers le BIAC (Business and Industry Advisory Committee).

Les recommandations ne s’imposent pas aux gouvernements mais elles jouent un rôle certain dans l’élaboration des politiques publiques dans les différents pays de l’OCDE.

Le mouvement syndical ne peut les ignorer. Il doit en faire une analyse critique et élaborer de façon indépendante réflexions et propositions sur les questions débattues, les faire discuter au sein des organisations syndicales et les faire connaître à l’opinion publique.

I – PROBLEMATIQUE GENERALE : LE PARADIGME LIBERAL

Les réflexions de l’OCDE s’efforcent d’intégrer et de mettre en cohérence les aspects économiques, sociaux, éducatifs de l’évolution des sociétés développées.

Dans la préface du dernier rapport de l’OCDE « Pour un monde solidaire » « Le nouvel agenda social », le secrétaire général de l’OCDE D. J. JOHNSTON définit le « paradigme triangulaire » qui résume la problématique de l’OCDE : « Donner l’importance qu’il mérite à chacun des trois éléments essentiels du progrès, à savoir la croissance économique, la stabilité sociale et la bonne gestion des affaires publiques. A l’avenir la poursuite du développement dans nos économies, qui sont de plus en plus des économies du savoir, sera étroitement liée à notre capacité de maintenir l’équilibre entre les trois éléments du paradigme, le capital humain étant l’un des moteurs de la croissance économique. Par conséquent, la capacité d’adaptation et de réaction de nos populations face à l’accélération du changement est essentielle ».

1) La réévaluation des « trente glorieuses »

Les systèmes d’action des pouvoirs publics dans les pays de l’OCDE (indemnisation du chômage, réglementation sur la sécurité de l’emploi, système d’impôts et de transferts, les régimes de retraite, systèmes de santé et d’éducation) ont été mis en place dans les années 50-60 quant la croissance était élevée, la population active en expansion, le chômage faible et la pauvreté en recul. Seule une petite minorité de citoyens avait besoin d’aide : les systèmes sociaux et éducatifs pouvaient être généreux et jouer un rôle positif pour la croissance économique, le bien être et la cohésion sociale.

Avec les années 70, les conditions économiques notamment la chute des rythmes de croissance de la productivité et de la production pour des raisons non totalement expliquées (développement des services, processus long d’adaptation pour tirer parti des nouvelles technologies, amélioration de la qualité des produits et services …), les conditions démographiques en particulier le vieillissement de la population, vont modifier radicalement les conditions d’équilibre et de financement de ces systèmes. Les pouvoirs publics vont donc se trouver contraints dans les années 80-90 à opérer une cure d’austérité. Trois volets vont s’imposer à l’action des pouvoirs publics : engagement de stabilité monétaire (lutte contre l’inflation), fortes restrictions budgétaires, forte réduction du rôle de l’Etat dans la réglementation économique, la participation à l’activité économique et accroissement corrélatif du rôle des marchés dans l’allocation des ressources. Cette trilogie constitue toujours l’orientation de base des politiques publiques des gouvernements des pays de l’OCDE et des politiques européennes.

Trois facteurs nouveaux apparus dans les années80-90 ont renforcé les incertitudes, accentué la déstabilisation des systèmes d’action des pouvoirs publics et poussé à des réformes des systèmes éducatifs et sociaux :

-       La mondialisation et la libéralisation des marchés, des marchandises et des capitaux qui exacerbent la concurrence : pour les pays de l’OCDE c’est d’abord la concurrence entre ces pays et entre des entreprises faisant appel à des ressources en main d’œuvre et à des qualifications analogues ; cela pousse à une demande croissante de qualifications de plus en plus élevées.

-       Les changements techniques dans les industries manufacturières et les services déplacent également la demande vers les emplois qualifiés : « la technologie détruit les emplois à bas salaires et à faible productivité et en crée d’autres plus productifs, mieux qualifiés et mieux rémunérés ».

-       La révolution organisationnelle conduit à des structures moins hiérarchisées, des productions plus flexibles grâce à l’informatisation, des relations plus étroites avec le client et à un élargissement des responsabilités des salariés qui mobilisent des compétences sociales et cognitives plus élevées.

Enfin, le vieillissement de la population pousse à revoir l’organisation du cycle de vie, dans le sens d’une plus grande souplesse et d’une plus grande liberté de choix entre temps de formation, temps de travail, temps de loisir et de soins à autrui.

Toutes ces évolutions ont accru les tensions sociales et mis fortement en cause la cohésion sociale au sein des sociétés développées : polarisation croissante des revenus, chômage accru, notamment des personnes les moins qualifiées, exclusion sociale, pauvreté accrue, y compris pour les travailleurs ayant un emploi mais peu qualifiés.

2) Nouvelle problématique, nouveau paradigme

Le nouveau contexte économique et social pousse à revoir radicalement les systèmes d’action publique dans le sens de l’efficacité économique (croissance économique et emploi) et la stabilité sociale. Pour retrouver leur dynamisme, les économies doivent être adaptables au changement permanent et atteindre un haut degré de flexibilité. Pour assurer la cohésion ou la stabilité sociale, les sociétés doivent assurer un minimum de sécurité à leurs membres. La bonne gestion des affaires publiques est celle qui assure la cohérence entre le dynamisme économique et la sécurité, celle qui concilie l’efficience économique et l’équité sociale.

a) Au centre de l’efficacité économique, il y a le capital humain (les connaissances et savoir-faire individuels) et la nécessité de promouvoir « l’apprentissage à vie ».

« A long terme, la croissance et l’emploi sont avant tout conditionnés par la capacité de l’économie d’utiliser efficacement et d’élargir simultanément le stock des connaissances scientifiques et techniques. Le savoir en sa qualité d’intrant comme de produit, est au centre du processus de croissance et de création d’emplois ». « Ce rôle stratégique du savoir explique l’accroissement de l’investissement dans la recherche et le développement dans la formation et l’enseignement, ainsi que des autres investissements immatériels qui, dans la plupart des pays, se sont développés plus rapidement que les investissements dans le capital physique au cours des dernières décennies ».

« Le rôle de premier plan dévolu au savoir et à l’acquisition de compétences dans cet environnement mondial fait que les différences observées, entre pays, dans la structure de l’emploi et du chômage deviennent sans doute de plus en plus le reflet de la capacité des économies nationales d’innover et d’absorber de nouvelles technologies grâce à des mutations structurelles ».

« Quelle qu’en soit la cause, le déséquilibre entre les qualifications requises et les qualifications existantes fait largement obstacle à la concrétisation de toutes les potentialités des nouvelles technologies et constitue une source importante d’inégalité au sein de la population active. Le seul moyen d’y remédier est d’appliquer une politique vigoureuse de formation mettant à contribution le système public d’éducation ». (La stratégie de l’OCDE pour l’emploi – Technologie, productivité et création d’emplois, Vol. 1. Synthèse et conclusions 1996).

b) Les politiques sociales ont aussi un rôle déterminant à jouer dans le dynamisme de l’économie et notamment pour « développer le capital humain de la population ».

« Les dépenses sociales peuvent constituer un investissement pour l’avenir si elles ont pour effet de renforcer le potentiel de croissance de l’économie et de garantir aux individus et aux familles les aides voulues pour leur permettre de tirer le meilleur parti possible de leurs possibilités et de contribuer pleinement à la vie de la société » (communiqué de presse des ministres des affaires sociales de l’OCDE des 23-24 juin 1998).

« Il faut que les politiques sociales favorisent, au lieu d’entraver comme c’est trop souvent le cas actuellement, l’acquisition permanente de compétences tout au long de la vie » (Pour un monde solidaire – Le nouvel agenda social OCDE 1999).

c) La politique sociale peut contribuer au développement du capital humain de la population

Le vieillissement de la population amène la mise en place d’une nouvelle organisation du cycle de vie. Dans les pays de l’OCDE, en 1960, les hommes vivaient environ 67 ans et passaient les 2/3 de leur vie à travailler. Aujourd’hui ils vivent 74 ans et ne consacrent plus que la moitié de leur vie au travail. Il importe donc de mieux répartir le temps entre éducation, travail, famille et loisirs, de revoir la façon dont l’activité se répartit tout au long de la vie, de rééquilibrer l’aide apportée par les politiques sociales aux différents groupes d’âge, de recomposer une vie active plus longue, notamment par une politique de « vieillissement actif ».

Dans ces conditions, trois problèmes éducatifs majeurs apparaissent :

-       L’apprentissage tout au long de la vie : l’éducation n’a plus à se concentrer sur les premières années de la vie, mais doit devenir une activité continue, ce qui implique de restructurer les systèmes d’enseignement dans ce sens ; il faut favoriser l’acquisition permanente des compétences, inciter les entreprises et les individus à investir dans l’apprentissage tout au long de la vie, développer l’efficacité de l’apprentissage par rapport au coût ; les politiques sociales et les politiques de l’emploi doivent cibler leurs interventions sur les adultes peu qualifiés, et mieux identifier les personnes à risque de chômage de longue durée et d’exclusion sociale.

-       Les interventions en faveur des enfants d’âge préscolaire : là aussi ça n’est pas l’école maternelle pour tous qui est préconisée mais des « programmes ciblés pour empêcher la marginalisation de se perpétuer d’une génération à l’autre ». Trois catégories de mesures sont avancées : des programmes de visites à domicile pour donner des conseils en santé et en matière d’utilisation des services sociaux, des programmes d’éducation et de préparation au travail des parents.

-       L’accès des jeunes au marché du travail. Selon le rapport « Pour un monde solidaire », « dans la zone de l’OCDE on constate depuis le début des années 80 une dégradation générale de la situation des jeunes en matière d’emploi et de salaires ». Le pourcentage des jeunes de 15-19 ans, et surtout de 19-25 ans, qui ne sont ni à l’école, ni étudiants, ni sur le marché du travail atteint des niveaux préoccupants. Il s’agit donc d’inciter les jeunes à rester dans le système éducatif en limitant les prestations aux jeunes chômeurs au niveau des garanties de revenus des étudiants à plein temps. Et le versement des prestations aux jeunes chômeurs doit être subordonné à la participation aux programmes d’éducation, de travail ou de formation. L’objectif fondamental étant de maintenir ces jeunes sur le marché du travail dans l’immédiat ou à terme.

d) Les politiques sociales doivent être aussi axées sur l’emploi. Elles sont complémentaires des politiques de prévention et d’acquisition des compétences visant à accroître l’employabilité de la population à long terme.

Fondamentalement, les politiques sociales doivent « protéger les personnes vulnérables et faire en sorte que les personnes dans le besoin aient des ressources suffisantes (minimum vieillesse, aides de derniers recours en faveur des exclus, structures de soins de santé de base, aide aux grands handicapés et services sociaux pour les enfants en difficulté … servent à préserver la dignité élémentaire du l’être humain) ».

Mais il s’agit d’aller au delà : « il s’agit plus d’intégrer que d’éviter la pauvreté en aidant les individus et les familles à réaliser leur potentiel grâce à des services adaptés et à une aide pécuniaire lorsque cela est nécessaire ou lorsque les gens ont une activité souhaitable du point de vue de la collectivité ».

Les réformes à opérer devraient être fondées sur un principe simple : offrir automatiquement, face à la probabilité croissante d’un aléa économique et social, un soutien accru aux personnes touchées par cet aléa et une plus grande incitation économique à surmonter cet aléa.

Par exemple, face au risque de chômage, il faut arbitrer entre d’un côté le renforcement des incitations au travail, la valorisation du travail pour sortir du piège du chômage et du piège de la pauvreté, et d’un autre côté la garantie d’un revenu suffisant qui peut apparaître contradictoire avec cet objectif. Il faut concilier efficience et équité et sortir les individus de l’assistanat. Deux stratégies sont actuellement mises en œuvre pour améliorer les perspectives d’emploi des personnes peu qualifiées : laisser s’accroître les inégalités salariales et assurer une garantie de revenu aux travailleurs à bas salaires ou appliquer des salaires minimums et verser des subventions salariales ciblées ou des réductions de charges salariales aux entreprises.

Autre exemple : la politique d’aide sociale visant à lutter contre l’exclusion doit reposer sur trois piliers d’égale solidité :

-       les allocations compatibles avec un retour sur le marché du travail qui permette un retour à l’autonomie,

-       l’assistance sociale et l’intervention des services sociaux pour résoudre un problème ponctuel de logement, d’alcoolisme, de toxicomanie ou d’invalidité, avec engagement à des efforts de la part des bénéficiaires : c’est la réciprocité,

-       les services de réinsertion professionnelle offerts aux demandeurs d’emploi, notamment aux parents isolés et aux jeunes ; là encore les exigences de disponibilité pour le travail ont tendance à être renforcées.

Conclusion : les réformes auront-elles lieu ?

Le rapport de l’OCDE « Pour un monde solidaire » note que la situation du marché du travail s’est améliorée, que l’état des finances publiques est meilleur et que la situation est plus favorable à l’innovation et aux réformes. « Sous la pression des contraintes budgétaires, les systèmes de retraite ont été réformés dans de nombreux pays, mais des innovations ont aussi été introduites dans les systèmes d’indemnisation du chômage et de prise en charge des personnes âgées dépendantes. La réforme des systèmes de santé se poursuit. Cependant, aucun pays n’a encore opéré toutes les réformes nécessaires ».

II – Evolution du marché du travail et stratégie de l’OCDE pour l’emploi

Pour l’OCDE l’ampleur persistante du chômage demeure très préoccupante (35 millions de personnes, 7 % de la population active, sans emploi dans la zone OCDE), mais elle peut être durablement réduite par tout un ensemble de réformes résolues inspirées de la stratégie de l’OCDE pour l’emploi.

Encadré IV.1.    La Stratégie de l’OCDE pour l’emploi

 

-       Elaborer une politique macro-économique qui favorise la croissance et qui, conjuguée à des politiques structurelles appropriées, la rende durable, c’est-à-dire non inflationniste.

-       Améliorer le cadre dans lequel s’inscrivent la création et la diffusion du savoir-faire technologique.

-       Accroître la flexibilité du temps de travail (aussi bien à court terme que sur toute la durée de la vie) dans le cadre de contrats conclu de gré à gré entre travailleurs et employeurs.

-       Créer un climat favorable à l’entreprise en éliminant les obstacles et les entraves à la création et au développement d’entreprises.

-       Accroître la flexibilité des coûts salariaux et de main-d’œuvre en supprimant les contraintes qui empêchent les salaires de refléter les conditions locales et le niveau de qualifications de chacun, en particulier des jeunes travailleurs.

-       Revoir les dispositions relatives à la sécurité de l’emploi qui freinent l’expansion de l’emploi dans le secteur privé.

-       Mettre davantage l’accent sur les politiques actives du marché du travail et les rendre plus efficaces.

-       Améliorer les qualifications et les compétences de main-d’œuvre en modifiant profondément les systèmes d’enseigne-ment et de formation.

-       Revoir les systèmes d’indemnisation du chômage et de prestations connexes – et leurs interactions avec le système fiscal – de sorte que les objectifs fondamentaux en matière d’équité de la collectivité soient remplis sans porter atteinte au bon fonctionnement des marchés du travail.

-       Développer la concurrence sur les marchés de production de manière à réduire les tendances monopolistiques et atténuer l’opposition entre travailleurs intégrés exclus, tout en contribuant à rendre l’économie plus novatrice et plus dynamique.

Source : Perspectives économiques de l’OCDE, Juin 1999, p. 156.

Les taux d’emploi des différents groupes présents sur le marché du travail divergent.

Les hommes d’âge très actif – ce que l’on appelle souvent le « noyau stable » de la population active – ont des perspectives d’emploi très comparables dans tous les pays de l’OCDE.

Par contre, les jeunes passent plus de temps dans le système éducatif mais sont dans le même temps découragés par le niveau élevé du chômage. Une transition sans heurt de l’école à la vie active est essentielle. Les pays qui ont réussi à faciliter le passage de l’école à la vie active ont surtout cherché à aider les jeunes à acquérir des qualifications professionnelles reconnues au sortir de l’enseignement obligatoire et à proposer des programmes de réinsertion à ceux qui avaient interrompu leur scolarité. L’acquisition d’une expérience professionnelle parallèlement à la poursuite d’études renforce également les bénéfices de l’enseignement.

Les efforts faits pour distribuer des emplois des travailleurs âgés aux travailleurs jeunes se sont révélés inefficaces et potentiellement coûteux.

Les femmes d’âge très actif sont de plus en plus présentes sur le marché du travail. Par contre, les ménages dont le chef est une jeune mère de famille sont souvent fortement dépendants des systèmes de transferts.

Les perspectives d’emploi et le potentiel de gains des travailleurs peu qualifiés (femmes et hommes) sont médiocres.

Bon nombre de pays ont mis en œuvre des réformes structurelles depuis le début des années 90 :

-       Marché du travail : certains pays ont hésité à se lancer dans des réformes touchant le noyau stable de la population active, préférant cibler leur action sur des groupes qui se situent à la marge ; peu de changements apportés à la législation sur la protection de l’emploi, plutôt assouplissement des contrats temporaires, décentralisation des négociations salariales ; réticence à réformer le salaire minimum ; par contre un certain nombre de pays ont pris des mesures résolues pour réduire le coût de la main d’œuvre.

-       Education et formation : bon nombre de pays ont procédé à des réformes de l’enseignement secondaire notamment en renforçant les liens entre l’enseignement professionnel et l’enseignement général. L’enseignement supérieur est encore peu touché. Des efforts ont été faits pour faciliter la transition de l’école à la vie active (formation en entreprise dans le cadre de l’enseignement professionnel et apprentissage).

-       Environnement des entreprises : progrès accomplis dans le domaine des nouvelles technologies, l’encouragement à la création d’entreprises ; intensification de la concurrence dans certains secteurs de services.

Le rapport de l’OCDE note que la mise en œuvre des recommandations de la stratégie pour l’emploi ne produit pas immédiatement ses effets sur le chômage ; une stratégie déterminée, et globale est souhaitable : les réformes menées dans plusieurs domaines se renforcent mutuellement.

Il importe enfin de prolonger les politiques macro-économiques fondées sur des finances publiques saines et la stabilité des prix parallèlement à la mise en œuvre des réformes structurelles de grande envergure ; les réformes parcellaires axées sur les seuls groupes défavorisés ne peuvent avoir que des effets limités.

L’OCDE suit l’état d’avancement dans chaque pays de la mise en œuvre des recommandations de la stratégie pour l’emploi.

III – La stratégie de l’OCDE pour l’éducation et la formation

Le rapport « Analyse des politiques d’éducation 1998 », fait le point des orientations de l’OCDE en matière d’éducation. De nombreux chantiers sont en cours sur les points considérés comme essentiels.

Le concept « d’apprentissage à vie pour tous » adopté par les Ministres de l’éducation, puis par les Ministres du travail et les Ministres des affaires sociales de l’OCDE devient un concept clé. Il exprime à la fois la cohérence des objectifs visés (« valoriser les compétences, les connaissances et les aptitudes des individus »), les attentes plus exigeantes du public, les tendances à l’élévation continue des niveaux d’instruction, dans un contexte marqué par de fortes restrictions budgétaires.

Il reste à faire passer ce concept dans la réalité. Cela implique un « changement radical d’orientation, l’accent devant être mis non plus sur les établissements, les écoles et les programmes, mais sur les apprenants et l’apprentissage ».

Il s’agit d’abord de préparer les jeunes et les adultes à se former en permanence. Pour cela l’enseignement et les enseignants doivent savoir s’adapter aux besoins individuels ; l’apprentissage doit être envisagé dans une perspective plus globale incluant les différentes étapes du processus éducatif et les parcours qui peuvent être empruntés.

Mais cela ne doit pas entraîner pour autant une augmentation proportionnelle des coûts. Le financement public de l’enseignement, notamment supérieur, doit être assuré en partie par l’étudiant. Enfin, il faut améliorer l’efficience des prestataires et des apprenants.

Cette approche de l’apprentissage à vie est celle qui répond le mieux aux impératifs économiques (« l’économie fondée sur le savoir »), au marché du travail (demande de compétence, de base et de qualifications élevées et constamment renouvelées), et à la nécessité de renforcer la cohésion sociale.

Dans ces conditions pour « l’entreprise, l’individu et l’économie, la formation continue relève de l’investissement productif et revêt donc autant d’importance, sinon plus que le capital physique ». « L’investissement consacré à l’éducation présente des avantages économiques et sociaux puisqu’il permet d’enrichir le stock de connaissances et de compétences, autrement dit le capital humain ».

1) Cadre général d’évolution des systèmes éducatifs vers l’apprentissage à vie

« Faire de l’apprentissage à vie une réalité pour tous » implique que le processus d’apprentissage ne se réduise pas au cadre de l’enseignement scolaire mais intègre celui de la famille, de la localité et de l’entreprise. Il requiert des individus motivés pour se former en permanence, dotés des compétences cognitives nécessaires à un « apprentissage autodirigé », ayant accès aux possibilités d’apprentissage et incités financièrement et culturellement.

L’objectif de l’éducation est bien de « faire de l’individu un bon citoyen, favoriser son épanouissement personnel, stimuler sa curiosité intellectuelle et son indépendance d’esprit, le rendre conscient de ses droits dans la société et de ses devoirs envers elle, assurer son employabilité ».

Cependant, l’accent est mis sur le développement de l’envie et de la capacité d’apprendre : « apprendre à apprendre » et l’acquisition des compétences de bases exigées par l’activité professionnelle : « qualités relationnelles, aptitudes linguistiques, créativité, capacité de travailler en équipe et de résoudre des problèmes, bonne connaissance des technologies nouvelles ».

Il s’agit de procéder à une évaluation complète du rendement de l’éducation en prenant en compte non seulement les avantages que celle-ci procure sur le plan individuel ou privé, mais aussi les avantages sur le plan social, notamment l’amélioration de la santé publique ou la diminution des problèmes sociaux. La rentabilité de l’enseignement secondaire de 2nd cycle tend à dépasser celle de l’enseignement supérieur dont les coûts sont beaucoup plus élevés.

L’enseignement doit être envisagé d’abord du point de vue de la demande des individus (adapté à leurs besoins et centres d’intérêt) et non pas de l’offre.

Du point de vue du contenu et de la qualité, l’important est moins l’acquisition des connaissances nouvelles que la préparation à la poursuite de l’apprentissage autodirigé.

Les ressources affectées à l’enseignement et à la formation doivent être approchées non pas de façon sectoriel mais systématique englobant l’existence tout entière, la diversité des prestataires de service, le caractère formel ou non de la formation …

La réalité actuelle montre l’existence de clivages sociaux et d’inégalités dans l’accès à l’apprentissage tout au long de la vie, en dépit de l’élévation du niveau général de formation initiale ; les apprentissages ultérieurs ne font qu’accentuer les effets de la formation initiale sur les gains perçus sur l’ensemble de la vie. Par conséquent « les politiques visant à renforcer la cohésion sociale doivent créer les conditions d’un accès de tous à des activités d’enseignement et de formation ».

L’OCDE se fixe comme tâche de mettre au point les indicateurs nécessaires au suivi des différents aspects de l’apprentissage à vie (programme INES de l’OCDE).

Des aspects importants apparaissent déjà :

-       L’enseignement préscolaire est très inégalement développé : une minorité d’enfants le suivent avant 4 ans avec de grandes différences entre pays. Mais le rôle positif de cet enseignement est reconnu pour la suite de la scolarité.

-       Arrêter l’école avant 17 ans devient l’exception dans tous les pays de l’OCDE. Mais abandons de scolarité et taux d’échec élevés avant la fin des études secondaires deviennent préoccupants. « Le niveau de fin d’études secondaires est désormais le minimum requis pour exercer un emploi ». Les jeunes qui sortent sans avoir atteint ce niveau « courent le plus grand risque de se retrouver au chômage ». Mieux intégrer enseignement professionnel et général et initiation pratique au travail devrait amener ces jeunes à acquérir un niveau de formation minimum et à s’engager à continuer à apprendre dans la suite de leur vie.

-       La croissance soutenue de la fréquentation de l’enseignement supérieur place les pouvoirs publics devant de nouveaux défis : diversification des formations, préservation de la qualité, financement, prise en compte des besoins de ceux qui n’y accèdent pas.

-       Pour la formation continue, chaque année plus des deux tiers de la population adulte ne participe à aucune activité de formation organisée. Et les modalités sont très fortes entre pays et à l’intérieur des pays. Les adultes peu qualifiés dans la perspective d’un apprentissage tout au long de la vie doivent faire l’objet d’une attention particulière des pouvoirs publics.

En fait, même si les indicateurs pertinents restent à construire, il apparaît « qu’un long chemin reste à parcourir avant que l’apprentissage à vie ne devienne une réalité pour tous ».

Les efforts à déployer seront coûteux mais ils constituent un investissement qui devra être pris en charge par l’ensemble des partenaires.

2) Le rôle des enseignants dans l’apprentissage à vie pour tous

Il faut prendre la mesure de ce que signifie pour la formation initiale « la transmission de compétences de base, d’une motivation et d’un état d’esprit utiles tout au long de la vie ».

Les enseignants ont un rôle essentiel à jouer dans le processus d’adaptation des systèmes éducatifs aux mutations économiques et sociales. Ils doivent être au cœur du processus de transformation radicale de l’organisation et des méthodes d’enseignement, et consentir un effort de renouvellement de leurs compétences et de leurs attitudes. L’investissement dans le perfectionnement professionnel des enseignants doit être conçu et développé dans cette perspective. Il doit intégrer préparation des enseignants à l’application des réformes, avancement des individus dans la carrière, et activités d’apprentissage entre collègues au sein des établissements ou réseaux d’établissements. Le professionnalisme des enseignants doit être transformé et devenir un des moteurs du changement grâce à « leurs compétences, leur ouverture, leur maîtrise des technologies, leur capacité à s’adapter et à collaborer en permanence au sein d’écoles et de réseaux assimilables à des organisations apprenantes ». Trois indicateurs symbolisent l’ampleur des changements visant à « briser le moule de la classe : un enseignant face à ses élèves dans une salle de classe » :

-       Confier la classe à une équipe surtout dans l’enseignement primaire, ce qui implique des compétences nouvelles pour les enseignants.

-       Faire intervenir en classe des adultes autres que les enseignants, notamment les parents, sans remettre en cause le professionnalisme des enseignants.

-       Introduire les technologies de l’information et de la communication comme élément de transformation des pratiques enseignantes. L’OCDE développe une activité de suivi de cette question dans le cadre du programme « Développement de nouveaux logiciels en matière d’éducation ». Pour l’instant rien ne permet de dire que les TIC représentent une solution de rechange pour l’enseignant. Loin de réduire le rôle de l’enseignant, elles peuvent au contraire l’enrichir considérablement.

Le professionnalisme renouvelé des enseignants exigera par dessus tout :

-       des connaissances spécialisées : « un bon enseignant doit être une source importante de connaissances et être capable d’aborder des domaines très divers » ;

-       un savoir faire pédagogique dans un contexte en évolution ;

-       la compréhension de la technologie et de son potentiel pédagogique ;

-       compétence et collaboration au niveau de l’institution appréhendée comme organisation apprenante ;

-       la flexibilité : évolution des compétences professionnelles attendues ;

-       mobilité : capacité à entreprendre d’autres activités professionnelles ;

-       ouverture d’esprit.

Par ailleurs, les personnels du secteur de l’éducation représentent environ 5 % de la population active ce qui en fait un des « secteurs industriels » les plus importants : données fondamentales notamment pour la question du financement.

3) Favoriser l’insertion professionnelle des jeunes ou « la transition de la formation initiale à la vie active"

Un examen comparatif de la situation dans les pays de l’OCDE est achevé depuis début 99. Le rapport est en cours de rédaction. Une conférence internationale est prévue en juin 2000.

« Toute stratégie visant à donner aux jeunes les moyens de réussir leur passage à la vie active et adulte devrait donc avoir pour tout premier objectif d’empêcher l’échec scolaire ».

Mais cela ne suffit pas.

Les formations en apprentissage donnent des résultat intéressants mais exigent des conditions de partenariat, d’engagement des entreprises, de passerelles avec l’enseignement supérieur qui ne sont rarement remplies dans les autres pays de l’OCDE. Elles ne sont donc pas le « modèle » le mieux adapté pour ces pays.

Des solutions plus largement applicables à long terme devraient consister à concevoir des filières qui débouchent sur une double qualification : accès à l’enseignement supérieur et acquisition en parallèle d’une qualification professionnelle recherchée sur le marché du travail.

Au delà il s’agit de mettre en place des politiques cohérentes en direction des jeunes ayant quitté le système scolaire prématurément ou qui risquent de le faire.

Actuellement, la réflexion de l’OCDE se polarise sur 4 thèmes :

-       mettre en place des filets de sécurité pour les personnes à risque (mesures de prévention au sein du système éducatif et mesures correctives pour les jeunes sortis sans qualification),

-       développer les liens entre travail et études, c’est une bonne préparation à l’apprentissage tout au long de la vie,

-       nouvelles compétences requises et politiques visant à faciliter la transition (méthodes pédagogiques favorisant le développement de l’employabilité, liens enseignement général et emploi …),

-       renforcer l’apprentissage tout au long de la vie par des politiques et programmes destinés à faciliter la transition.

4) Le financement de l’enseignement supérieur

Dans la plupart des pays si l’enseignement supérieur continue d’être considéré comme relevant du secteur public, on demande aux individus de prendre en charge une part plus importante des frais de scolarité et de subsistance.

Il faut étudier les incitations mises en place pour que les étudiants et leurs familles investissent davantage dans l’enseignement supérieur.

Le bilan de l’évolution des dépenses privées affectées à l’enseignement supérieur fait apparaître une grande complexité, de grandes disparités entre pays, à l’intérieur des pays selon les filières, les institutions fréquentées.

Il est nécessaire de porter un regard neuf sur les mécanismes de financement de l’enseignement supérieur et prendre en compte la souplesse des parcours d’études souhaitée par les apprenants et souhaitable pour l’économie. Il faut adopter une approche plus stratégique, correspondant à une nouvelle vision de l’étudiant qui « doit être considéré comme un client exigeant et non comme un consommateur passif ».

Il faut veiller à ce que les étudiants issus de familles modestes puissent poursuivre des études supérieures et qu’ils n’en soient dissuadés par l’accroissement de l’effort financier demandé aux étudiants et aux familles.

5) Le financement de l’apprentissage à vie

L’étude a été lancée en 1996. Une conférence mondiale est prévue en 2000 sur ce sujet.

Plusieurs problèmes sont analysés dans le rapport en préparation :

-       le rôle des secteurs publics et privé compte-tenu des possibilités de bénéfices purement privé de l’apprentissage à vie et de la rentabilité publique et privée de cet apprentissage,

-       comment développer l’apprentissage à vie sans provoquer une croissance des dépenses publiques qui lui sont consacrées ; améliorer le rapport coût/efficacité, et le rapport dépense privée/bénéfices récupérés,

-       comment les employeurs et les particuliers peuvent-ils financer l’investissement dans la formation : par des gains antérieurs (épargne non imposable) ou par bénéfices attendus (prêts subventionnés où garantis) ou par subventions directes des finances publiques,

-       la complexité institutionnelle provient de la nécessité d’équilibrer l’affectation des ressources entre les différents secteurs contribuant à l’apprentissage à vie.

Les différents secteurs seront passés en revue dans cette perspective : éducation et garde des jeunes enfants, enseignement secondaire du 2e cycle et transition de l’école à la vie active, enseignement supérieur, formation des adultes en cours d’emploi, formation des personnes âgées.

Une attention sera apportée aux solutions à mettre en place pour remédier aux problèmes posés par le déséquilibre entre les étapes de l’apprentissage à vie, entre financement public et financement privé.

« L’un des défis auxquels les responsables sont aujourd’hui confrontés consiste à investir dans les parcours de formation qui ont le rendement le plus élevé par rapport à leur coût. Il leur faut également veiller à un développement plus équitable des possibilités d’apprentissage ».

« Lorsque les ressources sont limitées il devient nécessaire d’explorer des solutions efficaces par rapport à leur coût : études à temps partiel, enseignement à distance, programmes modulaires » …

6) Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA)

Il s’agit de vérifier « si les élèves acquièrent les compétences dont ils auront besoin demain en tant que citoyens, si l’enseignement public leur transmet bien cette faculté d’apprendre en permanence dont ils auront besoin tout au long de leur vie pour pouvoir s’adapter ».

Une première publication a présenté le cadre conceptuel et les méthodes employées.

Des évaluations périodiques seront faites.

L’objectif est de dégager les meilleures pratiques, d’aider les écoles à mieux orienter leur enseignement et les élèves leur apprentissage, de mettre en lumière les points forts et les points faibles des programmes scolaires.

7) Evaluation et comptabilisation du « capital intellectuel »

Une première réunion a eu lieu à Amsterdam sur ce thème. 2 conclusions provisoires ont été tirées :

-       le capital intellectuel est important pour l’entreprise : il doit être visible et figurer dans les rapports des entreprises accompagnant les bilans pour intéresser les investisseurs,

-       le capital intellectuel est mesurable : il faudrait établir des normes et y intéresser les partenaires sociaux dans le cadre de la bonne gouvernance des entreprises.

Ce débat rejoint celui des compétences et notamment les compétences clés que le système éducatif devrait transmettre. Un séminaire de l’OCDE sera organisé à l’automne sur cette question.

Conclusion

Pour l’OCDE l’enseignement et la formation ne sont pas des panacées au chômage ou à d’autres fléaux ; d’autres réformes sont nécessaires : politiques sociales, marché du travail, politiques macro-économiques …

Et on retrouve la mise en cohérence, évoquée en introduction, de l’ensemble des actions publiques préconisées par l’OCDE.

IV – Essai d’analyse critique de la problématique de l’OCDE

1) Une approche globale et cohérente

La grande force des analyses et propositions de l’OCDE c’est d’abord la cohérence qui est établie entre les divers aspects des actions publiques. Même si les politiques sociales et notamment l’emploi sont toujours soumis aux impératifs des équilibres macro-économiques, les mises en relation sont établies dans une vision globale des différentes politiques.

Les analyses et propositions de l’OCDE prennent appui sur certains développements théoriques actuels ou récents et sur les études économétriques concrètes par pays.

Les propositions pointent des problèmes réels, des préoccupations et des aspirations sensibles dans les pays concernés comme le chômage, la pauvreté, l’exclusion mais aussi les aspirations à poursuivre les études plus longtemps.

L’investissement éducatif, dans la formation continue et dans la recherche, et même l’investissement social sont considérés à juste titre comme essentiels pour le développement et la croissance.

Les modes d’élaboration des propositions permettent d’établir un large consensus parmi les gouvernements et les experts. Les partenaires sociaux sont également consultés.

2) Pour une approche plus contradictoire de l’histoire des politiques économiques passées

Le changement de cap des politiques économiques et sociales dans les années 80 résulte de facteurs complexes et surtout de choix qui n’avaient rien de fatal.

* Il s’agit de faire la part entre des éléments très divers pour expliquer ce tournant :

·       Les aspects de crise économique apparus dans le fonctionnement des économies au tournant des années 70 ;

·       L’incapacité des solutions, Keynésiennes développées dans les années 50/60 à régler les problèmes et la nécessité d’inventer de nouvelles politiques pour faire face aux données nouvelles ;

·       Les choix économiques idéologiques et politiques inspirés des théories libérales ont été considérés par les gouvernements et une large partie de l’opinion comme les plus pertinents pour faire face aux problèmes nouveaux ;

·       L’évolution des rapports de forces politiques et syndicaux en liaison avec l’évolution des catégories sociales, a entraîné des modifications importantes dans le partage, de la valeur ajoutée.

* D’autres choix, d’autres solutions auraient pu être mis en plus, avec d’autres objectifs, d’autres priorités, d’autres conséquences pour les diverses catégories sociales. La « cure d’austérité » et la « trilogie » (politiques monétaires restrictives, austérité budgétaire et rôle privilégie du marché comme forme de régulation, ont en fait privilégié de certains intérêts économiques.

* Ces choix ont été générateurs de nouveaux déséquilibres (le chômage et la pauvreté notamment), de nouvelles évolutions (dans la scolarisation de la jeunesse), de nouvelles inégalités, de nouvelles aspirations… qui appellent des solutions nouvelles.

* Les facteurs d’évolution des sociétés : mondialisation et régionalisation des économies, changements techniques, organisation du travail et gestion des entreprises, résultent de choix politiques et sociaux : leur maîtrise et leur mise au service de l’intérêt général, d’un développement humain et soutenable impliquent des choix qui doivent être discutés et tranchés collectivement. Le libre jeu des forces du marché, les seuls critères de la rentabilité des capitaux engagés dans les activités économiques et financières, ne peuvent assurer automatiquement une bonne maîtrise et une bonne utilisation de ces facteurs.

* Les propositions syndicales ont besoin de s’appuyer sur un diagnostic de la situation dans les divers domaines économiques, sociaux et culturels pour fonder de façon réaliste les solutions avancées au service de l’intérêt général et contester éventuellement celles que d’autres forces sociales voudraient imposer à la société pour maintenir leurs privilèges.

3) L’articulation de l’économique et du social doit être approchée de façon ambitieuse et dynamique

·       La séparation de l’économique et du social n’a aucune pertinence théorique (on ne peut faire abstraction des rapports économiques et sociaux qui constituent le cadre structurel du fonctionnement des économies).

·       Dans le fonctionnement des sociétés les aspects économiques, sociaux et culturels sont en interaction constante.

·       La pertinence des choix économiques ne peut être appréciée sans analyser leur impact économique mais aussi social. Et réciproquement les choix éducatifs et sociaux doivent être appréhendés à travers leurs aspects économiques, mais aussi dans une vision humaniste du développement.

·       Les politiques sociales ne sauraient se réduire à la prise en charge des laissés pour compte, des exclus d’une économie régulée par les seules forces du marché. Les sociétés doivent se fixer des objectifs ambitieux de bien être social, garantir la réalité des droits fondamentaux des individus comme les droits à la santé, à l’éducation, à la culture, à la liberté d’expression et d’information, le droit au travail qui implique le plein emploi… La lutte contre, les discriminations de toutes sortes, pour l’égalité entre les femmes et les hommes sont des objectifs essentiels.

·       L’expérience montre que le plein emploi et une répartition des richesses assurant un revenu décent pour tous ne peut résulter du seul renforcement de la flexibilité des économies et du marché du travail. Il est nécessaire de reconstruire un droit du travail garantissant la sécurité des salariés sur de nouvelles bases.

4) Pour un meilleur équilibre entre les mécanismes du marché par rapport aux actions publiques

Pour l’OCDE ce sont les mécanismes du marché (marché des biens et services, des capitaux et du travail) qui constituent la règle pour une bonne régulation de l’économie et de la société.

Dans cette perspective les interventions publiques ont fondamentalement deux objectifs :

-       supprimer toutes les réglementations et les interventions publiques qui entravent le libre jeu des forces du marché et/ou qui se substituent à l’initiative privée ;

C’est une remise en cause des services publics comme producteurs de biens et services d’intérêt collectif comme producteur de droits essentiels comme l’éducation, la protection sociale, la non subordination … Les formes de régulation par le marché ne s’arrêtent pas au seul domaine économique mais doivent pénétrer les domaines de la protection sociale, de l’éducation et de la formation.

-       prendre en charge les individus qui sont dans l’incapacité de s’intégrer dans le fonctionnement libéral de l’économie et de s’adapter aux évolutions : l’objectif de cette solidarité nouvelle est de réintégrer les individus sur le marché du travail, seule façon de les rendre autonomes. L’équité consiste à réduire les droits et la protection de ceux qui ont un travail et des revenus suffisants pour prendre en charge d’abord ceux qui ne sont plus en situation d’en bénéficier. Implicitement il est considéré qu’il ne manque pas d’emplois globalement. Il y a seulement des individus qui ne sont pas « employables ».

Cette conception de l’intervention publique et de la protection sociale est très réductrice. Elle peut assurer une protection de qualité et des droits élevés pour l’ensemble de la population. Elle perpétue des inégalités sous des formes nouvelles.

5) Le social et l’éducation au service de l’efficacité économique et de toute la société

Une des faiblesses fondamentales de la problématique de l’OCDE est de considérer que le social doit s’adapter aux contraintes de l’économie et dans ce cadre le système éducatif doit s’adapter aux exigences du marché de l’emploi. L’investissement dans l’éducation est un facteur essentiel de l’augmentation de la productivité du travail mais il ne se réduit pas à cette dimension. Il est une condition essentielle du développement des individus et de la démocratie.

La question essentielle que ne se pose jamais l’OCDE est celle du partage des gains de productivité. Si ces gains de productivité ne sont pas réinvestis dans le développement de la formation initiale et de la formation continue, dans le développement de l’emploi par la réduction du temps de travail et la création de nouvelles activités, dans l’augmentation du pouvoir d’achat pour créer un débouché à ces nouvelles activités, le système entre en crise.

Par ailleurs, le développement des qualifications conçues comme des capacités supérieures de réflexion, d’initiative, de créativité appelle de nouvelles organisations du travail qui favorisent cette créativité. Cela implique que la citoyenneté se développe aussi au sein des entreprises. On en est encore très loin. Des transformations sont nécessaires au sein des entreprises. Ainsi le social et l’économique doivent évoluer en cohérence et non pas en subordination.

Il faut critiquer les conceptions essentiellement adaptatives et adéquationistes de l’OCDE, de l’éducation comme facteur d’adaptation au changement. D’abord l’éducation et la formation tout au long de la vie trouvent leur raison d’être développées dans leurs propres finalités humanistes, culturelles et sociales. Les contenus, les objectifs et les modalités sont élaborés sur la base de ces missions et de valeurs propres. Les critères d’évaluation de l’éducation et de la formation doivent être définis dans ce cadre et non pas sur la base des seuls critères efficacité-coûts..

Toutes ces considérations impliquent le développement de l’éducation et de la formation, d’abord comme un service public, et non comme une activité banale soumise aux forces du marché.

6) Le concept de capital humain même dans son acception élargie, est réducteur

Le concept du capital humain réduit l’activité humaine à un facteur de production et ne reconnaît pas le rôle central du travail humain dans la création et les processus de production de biens et services. Ni l’éducation, ni le travail ne constituent un bien comme un autre (et encore moins un capital). Ils constituent des activités humaines et sociales spécifiques. Leur développement implique un cadrage collectif qui relèvent de choix politiques qui conditionnent la qualité du fonctionnement de la société et qui doivent donc être débattus et arrêtés par les citoyens de façon démocratique.

Le concept du capital humain réduit les capacités productives aux capacités individuelles et escamote le caractère de plus en plus collectif et socialisé des processus de production.

­        Il réduit l’éducation et la formation à un processus et une responsabilité individuels alors qu’il s’agit plus que jamais d’une responsabilité collective et sociale qui a d’ailleurs donné lieu au développement de services publics collectifs pris en charge par la société tout entière.

L’investissement dans l’éducation et la formation des jeunes et des adultes, doit être un engagement de toute la société y compris au plan financier. C’est non seulement l’efficacité économique qui en dépend, mais la qualité de l’ensemble des rapports sociaux, de la vie démocratique, sociale, culturelle…

En ce sens, le concept d’employabilité est aussi un concept contestable dans la mesure où il escamote la responsabilité publique dans l’exercice effectif du droit à l’éducation et à la formation. Il fait reposer la responsabilité de la formation continue et de son financement d’abord sur les individus, accessoirement sur les entreprises et pratiquement pas sur les services publics ou l’intervention publique, sauf pour les exclus.

Cette approche a des conséquences en termes d’organisation du système éducatif comme service public fondé sur les valeurs de justice sociale, d’égalité, de citoyenneté, d’identité collective.

Elle a des implications au niveau du financement : l’éducation, la formation des jeunes et des adultes constituent d’abord un investissement de toute la société financé par l’impôt prélevé sur la richesse produite collectivement. Réduire l’éducation et la formation à une marchandise et l’investissement éducatif à un investissement privé guidé par les critères de rentabilité est en contradiction avec son caractère éminemment social, collectif. L’éducation et la formation constituent d’abord des enjeux de civilisation de progrès de toute l’humanité. Le financement de l’éducation par un prélèvement collectif (impôt) sur les richesses produites, en fonction des capacités contributives des divers agents et citoyens, constitue un principe fondamental.

7) Une analyse plus approfondie des capacités mobilisées par les individus dans les collectifs de travail est nécessaire

L’OCDE fait référence à la société du savoir. Les connaissances, la recherche, l’innovation prennent certes une place croissante dans la production des biens et services. Mais on ne peut escamoter le fait que l’organisation de la production reste soumise aux impératifs de rentabilité dont les indicateurs sont de plus en plus liés aux critères élaborés par les marchés financiers. De ce fait les besoins sociaux ne sont pris en compte qu’à travers le prisme déformant de ces critères.

A l’échelle de l’humanité et même des pays les plus développés, il y a encore sous estimation des potentialités de l’investissement dans l’éducation pour faire reculer le sous développement, la pauvreté et promouvoir un développement humain et supportable à l’échelle de la planète.

Il faudrait analyser les contradictions entre les formes persistantes d’organisation du travail et des activités économiques et sociales à l’échelle de la planète et même dans les pays développés, et la nécessité de déployer les capacités créatrices pour une plus grande efficacité économique et sociale. Une prise en compte des exigences du développement de toute l’humanité, de la préservation de l’environnement, de contenus de travail plus intéressants, plus qualifiants, impliquerait d’autres formes d’organisation du travail, d’autres relations économiques au niveau mondial.

Une meilleure reconnaissance des qualifications, compétences et professionnalités exigerait des analyses des capacités réellement mobilisées dans le travail. C’est à partir de ces analyses que l’on peut discuter des évolutions nécessaires à apporter aux contenus des formations, aux diplômes et certifications et à leur reconnaissance.

Il faut souligner les convergences objectives entre exigences du développement culturel, social, démocratique et conditions d’efficacité du développement économique. Il appartient à une organisation syndicale comme l’IE de souligner ces convergences, tout en mettant à jour les obstacles qui dans le contexte mondial d’aujourd’hui continuent à entraver le développement humain.