Propositions - Spéculation

FRANCE - ASSEMBLEE NATIONALE

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Document mis en distribution
le 15 novembre 1996

N° 3030

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIXIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 1996.

 

 

RAPPORT

FAIT
AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L'ECONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 1997 (n° 2993),

 

PAR M. Philippe AUBERGER,
Rapporteur Général - Député

ANNEXE Nº 13

ECONOMIE ET FINANCES
SERVICES FINANCIERS, MONNAIES ET MEDAILLES

Rapporteur spécial : M Jean ROYER
Député

 

III.- RENDRE RAISON AUX MARCHÉS FINANCIERS INTERNATIONAUX

 

La direction du Trésor, l’une de nos plus prestigieuses administrations financières, est confrontée depuis plusieurs années, à une réduction de son pouvoir. Elle subit en effet une contrainte constante de la part des marchés financiers internationaux, contrainte qui s’exprime chaque jour mais aussi au travers des bouleversements institutionnels comme la loi du 4 août 1993 confiant à une Banque de France désormais indépendante notre politique monétaire.

Chargé des relations monétaires et financières de la France, le Trésor peut cependant retrouver certains moyens d’actions. Il n’est pas nécessaire pour cela de remettre en cause le principe du marché, ni de sortir la France du mouvement de mondialisation.

 

Il s’agit simplement que les marchés financiers internationaux jouent leurs rôles véritables, à savoir une bonne allocation du capital à des fins productives, et l’envoi de signaux pertinents et mesurés aux responsables des politiques économiques. Atteindre cet objectif implique de lutter contre la spéculation.

L’intégration financière à l’échelle planétaire est essentiellement une chose positive et ce pour trois raisons.

Elle permet l’accès du capital aux espaces qui en ont le plus grand besoin. A l’origine, la déréglementation entreprise par les Etats industrialisés en matière de circulation des capitaux n’avait d’autre but que de faciliter le financement des déficits publics. Aujourd’hui, cette question devient un peu moins centrale, et l’intérêt de la globalisation financière réside davantage dans l’ampleur, considérable et sans précédent, des mouvements de capitaux en direction des pays dénommés jadis « en voie de développement », et devenus aujourd’hui des « marchés émergents ». Elle est donc un bon substitut à l’aide classique au développement.

En second lieu, la sophistication des instruments financiers, par exemple celle des « produits dérivés » permet de protéger efficacement les agents économiques des aléas du marché. A cet égard, les quelques échecs retentissants dus à une mauvaise utilisation de ces produits ne doivent pas masquer le surcroît de sécurité qu’ils procurent aux entreprises.

Enfin, les marchés financiers, comme tous les autres marchés, sont des indicateurs utiles aux responsables des politiques économiques nationales, qui se voient jugés par des observateurs théoriquement objectifs.

En fait, malgré ces avantages fondamentaux, le fonctionnement des marchés financiers internationaux n’est pas parfait : il est biaisé par l’intervention des spéculateurs.

 

A.- LES DÉTERMINANTS DE LA SPÉCULATION

1.- Un terrain de jeu immense

S’il est difficile de quantifier la spéculation qui sévit sur les marchés de change et sur les marchés internationaux des titres, quelques chiffres sont tout de même éloquents.

 

Sur le marché des changes, le volume global journalier des opérations s’est monté en moyenne à 1.190 milliards de dollars en 1995(1). Il est intéressant de comparer ce chiffre à celui du commerce mondial de marchandises et de services qui s’est élevé à 16,7 milliards de dollars par jour la même année.

Pour ce qui est des marchés internationaux de titres, deux ratios sont révélateurs(1).

Le premier apprécie l’importance du marché secondaire (2) par rapport à l’encours international des titres. Autrement dit, il indique le nombre de transactions par titre existant, c’est-à-dire la vitesse de circulation des titres. Alors qu’en 1994, il était de 994%, il était en 1995 de 1.156%. Ainsi en une année, un titre change de mains à plus de dix reprises.

Le second calcul rapporte le montant annuel des émissions de titres effectuées par le secteur privé à l’ensemble des transactions de l’année correspondante (c’est-à-dire la somme des volumes du marché secondaire et des émissions sur le marché international). Pour 1994 et 1995, le taux est stable à 0,7%. Encore faut-il ajouter que les émissions du secteur privé sont le fait d’institutions financières pour 82% et seulement pour 18%, le fait des entreprises.

Ces différents chiffres indiquent à quel point l’activité des marchés internationaux est déconnectée des fonctions économiques - investissement ou commerce - qu’ils doivent financer.

Le cas des marchés dérivés est différent : leur rôle étant d’ordre purement financier, on ne peut comparer leur activité à une quelconque fonction économique correspondante. Néanmoins, l’évolution de leur volume n’en est pas moins significative de la volatilité des marchés et de la volonté de contrer celle-ci. De fait, les marchés dérivés sont à la fois un indicateur, une solution et une tentation par rapport à la spéculation.

Fin 1995, l’encours notionnel était de 9,2 milliers de milliards de dollars sur les marchés organisés et de 40,6 milliers de milliards de dollars sur les marchés de gré à gré.

Ces marchés dérivés sont apparus il y a une vingtaine d’années pour permettre une protection contre la volatilité des taux et des cours. Ils sont utiles aux hedgers, ces agents économiques à qui la volatilité est nuisible et qui font supporter les risques à des agents prêts à les assumer.

Les marchés sont donc propices à la spéculation : plus il y aura de hedgers, plus il faudra trouver en face des « aventuriers ». Les marchés dérivés représentent alors un facteur d’accélération de la volatilité : celle-ci indiffère les personnes qui la craignaient et en sont maintenant protégées et, parallèlement, elle intéresse les spéculateurs car c’est leur facteur de rémunération.

Or, si le risque systémique semble écarté sur les marchés organisés par l’instauration de système de coupe-circuit à la suite du krach de 1987, en revanche, la prédominance des marchés de gré à gré, par nature non supervisés, constitue une dangereuse menace.

2.- La spéculation favorisée par les désordres économiques réels

Paradoxalement, tout intégrés qu’ils soient, les marchés internationaux ne le sont pas encore tout à fait. Sinon, les cours et les taux seraient uniformes dans le monde, ce qui priverait les spéculateurs de leur matière première, les fluctuations.

La spéculation tire profit de ce que nous vivons actuellement deux importantes transitions économiques : le processus d’industrialisation mondiale, qui est long mais s’accélère, et l’unification monétaire européenne.

En ce qui concerne cette dernière, il est certain que la nervosité des opérateurs va croître à l’approche des échéances. Si un pays apparaît de plus en plus comme insusceptible d’être inscrit dans le groupe de l’euro, sa devise risque d’être poussée fortement à la baisse par les investisseurs et les spéculateurs. Ce danger serait d’ailleurs d’autant plus grand qu’un espoir d’intégration existait auparavant pour ce pays.

C’est pourquoi il est important que les responsables des politiques économiques affichent d’emblée des intentions réalistes et des comptes sincères. Car plus les illusions auront été grandes, plus l’échec sera douloureux.

D’une manière générale, le désordre des marchés ne se nourrit pas seulement des écarts fondamentaux économiques, mais aussi des fautes de politiques économiques que les marchés sanctionnent tôt ou tard.

Par exemple, la crise du système monétaire européen en août 1993 a mis en lumière l’erreur qui a consisté pour les européens à ne pas tenir compte du choc externe considérable créé par l’unification allemande.

On a voulu maintenir artificiellement à leurs niveaux les cours des monnaies européennes par rapport au deutschemark, ce qui par ailleurs signifiait que le coût de la réunification était en partie supporté par les partenaires de l’Allemagne. Finalement, ce pari politique est apparu intenable et les marchés ont montré la pertinence de leur analyse économique. En se trompant, les autorités ont appelé de fait à une correction par le marché, correction qui a constitué pour les spéculateurs l’occasion de s’exprimer et d’amplifier la crise. A une cause rationnelle se sont ajoutés des phénomènes irrationnels.

3.- La volatilité étrangère à toute justification économique

La spéculation n’est pas la conséquence inévitable d’un système : elle s’appuie sur ceux qu’on a pu appeler les « gnomes de Londres », ces parasites, ces spéculateurs qui, contrairement aux arbitragistes, ne mettent pas de l’huile dans les rouages du marché, mais plutôt de l’huile sur le feu, en altérant le fonctionnement des marchés, parfois gravement.

Les spéculateurs opèrent à des fins ni économiques, ni financières, mais seulement à des fins personnelles, pour gagner de l’argent facile, tout en mettant en péril l’économie réelle. Citons M. Jean Saint-Geours, ancien Président de la Commission des opérations de bourse. Il remarque que, si la spéculation trouve un terrain propice en période d’euphorie et d’expansion de l’endettement, elle a avant tout pour cause une certaine malhonnêteté :

 

« On s'aperçoit que l’euphorie s'appuie sur un fabuleux arsenal de délits boursiers. Les manipulations du marché, l’utilisation de paradis fiscaux, les circuits de blanchiment, les fausses déclarations, fraudes fiscales, délits d’initiés, tout cela étant rendu possible par la complicité passive de la plupart des établissements du marché financier.

Parmi ces raiders, ces criminels, il y a les cyniques et les pêcheurs. Il y a les cyniques qui ne reconnaissent jamais leur faute. Je ne veux pas donner de nom. Et puis, il y a les pêcheurs qui, éventuellement, coopèrent, qui savent qu’ils font mal, qui d’ailleurs consacrent une partie de leur gain à des œuvres charitables et qui finiront par ne pas contester publiquement leurs turpitudes. Mais il y a une chose commune : c’est qu’ils sont tous fous. Et Kindleberger(3), observant cette période le dit. Quand on regarde leur comportement au travail, familial et la manière dont ils gèrent leur fortune, on est assuré que ce sont des fous » (4).

Les spéculateurs professionnels s’appuient sur leurs fonds de couverture. Ce sont des produits dérivés qui, comme on l’a vu, permettent aux agents économiques de se couvrir contre les risques de variation de cours ou de taux. Ces risques sont assumés par les gérants des fonds. S’ils sont habiles dans la maximisation de l’effet de levier propre à ces fonds, les gérants peuvent dégager très rapidement d’importants profits.

Parmi les gérants de fonds de couverture les plus connus figurent MM. Michael Steinhardt, Leon G. Cooperman, Julian Robertson junior et surtout M. George Soros. Le palmarès historique de ce dernier n’a pas d’égal : un retour moyen annuel de 35% depuis 1969. Il possède deux fonds, Quantum et Quota, dont les performances sont en général très bonnes. M. George Soros peut parfois gagner plus de 100 millions de dollar en un jour. Ce fut le cas par exemple les 5 et 13 septembre 1995.

Mais il ne suffit pas de stigmatiser les spéculateurs professionnels (5). Les investisseurs institutionnels aussi risquent de déstabiliser les marchés. La Banque des règlements internationaux exprime son « inquiétude » dans son 66ème rapport annuel au sujet du « regain d’appétit des investisseurs pour le risque, qui a semblé avivé par la réduction générale des rendements obligataires » et par l’intensification de la concurrence entre les gérants de fonds. Même en dehors de toute velléité spéculative, les fonds de pension, les fonds communs de placement et autres assureurs-vie ont acquis une masse telle que la moindre modification de leurs engagements, qu’ils font avec une logique d’ensemble, peut avoir des conséquences très néfastes.

 

B.- DES EFFETS FINANCIERS DANGEREUX AUX EFFETS RÉELS DÉVASTATEURS

La spéculation altère la fonction de révélateur des réalités économiques qu’exercent les marchés. Ceci ne manque pas de rétro-agir sur le réel lui-même.

1.- Le phénomène de la bulle et le risque systémique

Si l’on peut avoir confiance dans la perception des marchés sur le long terme, il faut se défier de leur propension à privilégier le court terme. Dans certains cas, les tensions créées par un courant vendeur à sens unique peuvent susciter une spéculation s’auto-alimentant, et allant au-delà de toute rationalité économique.

C’est ainsi qu’apparaissent les bulles spéculatives. Les exemples ne manquent pas où, sur tel marché spécifique (6), une très forte augmentation des cours est suivie d’une très forte baisse, ce qui signifie en fait que le marché se contredit lui-même, qu’il corrige son erreur initiale.

Or de tels chocs ne sont pas neutres sur l’économie réelle. Le dégonflement fatal de la bulle a deux effets principaux : un manque de liquidité qui peut entraîner la défaillance d’établissements de crédits qui auraient pris des positions spéculatives, et un effet récessif en raison des effets de richesse et de rationnement du crédit. Les agents rationnés seront principalement ceux qui n’ont pas la surface financière pour se porter emprunteur sur le marché financier, à savoir les particuliers et les petites entreprises.

Selon M. Alexandre Lamfalussy, si la probabilité d’un accident systémique diminue, sa gravité éventuelle augmente,

2.- Les politiques économiques nationales en otage

Les errances des marchés sont particulièrement coûteuses pour les économies nationales puisqu’elles créent des distorsions indues.

Par exemple, si elles affaiblissent artificiellement une monnaie, les conséquences seront dommageables pour toutes les parties (sauf pour les spéculateurs) : les partenaires du pays considéré verront leurs exportations défavorisées sans raison économique, tandis que le pays attaqué subira une fuite de capitaux qu’il devra contrer par une hausse de ses taux d’intérêts, ce qui nuira à sa croissance et à ses emplois. Au total, un effet récessif général sera apparu ex nihilo.

Face à cela, les moyens d’intervention des Etats sont limités. L’action sur les taux d’intérêt est en effet coûteuse en croissance et en emploi si elle est utilisée durablement. D’ailleurs, les banques centrales ne maîtrisent plus que les taux courts. Or les financements à long terme représentent en France 85% de l’endettement des ménages et 63% de la dette publique.

Sur le marché des changes, l’intervention directe des banques centrales se heurte à la faiblesse relative de leurs réserves en devises. En effet, les réserves de changes officielles totales détenues par les institutions monétaires du monde entier ne représentent, approximativement, qu’un dixième du volume total quotidien des transactions sur les marchés des changes. De fait, l’efficacité de leur intervention dépendra moins de la masse engagée que de leur crédibilité générale. Mais, à son tour, la crédibilité repose sur une autre soumission, un respect constant des dogmes du marché.

Il existe toutefois des systèmes de coopération internationale pour définir des taux de change de référence et envisager les plans d’action correspondants. Ce sont par exemple les accords de change conclus dans le cadre du G7 comme ceux du Plazza (New-York, 1985), ceux du Louvre (1987), de Washington (19S9) ou de Bercy (1990). A ce propos, les directeurs du Trésor du G7 se rencontrent environ une fois par mois pour gérer de façon concertée l’évolution de leurs devises.

Mais ces dispositifs sont aussi &agiles que les moyens de les appliquer sont limités. Il en est pour preuve la quasi-destruction du système monétaire européen en 1993, qui pourtant était l’archétype de l’accord de change politiquement solide. Le résultat a été un élargissement des marges de fluctuations, et donc du champ de la volatilité et de la spéculation.

Il n’est donc pas exagéré de dire que la situation actuelle est alarmante pour la souveraineté des Etats. Leurs politiques sont en fait principalement attachées à tenter de contrer les caprices des marchés et les dommages directs qu’ils infligent aux économies. Ainsi, elles négligent les priorités spécifiquement nationales. Il reste pourtant toujours possible d’agir.

 

C.- DES SOLUTIONS POSSIBLES

 

Il appartient avant tout à l’autorité économique de limiter les causes de spéculation dont elle est spécifiquement responsable. Pour cela, il est nécessaire qu’elle choisisse des objectifs réalistes et crédibles de politiques économiques, en dehors de tout dogme. Si elle affiche des ambitions trop hautes, elle entraînera l’incertitude du marché et favorisera des comportements spéculatifs qui pourraient s’avérer auto-réalisateurs. Ainsi, la simple communication d’objectifs irréalistes peut ruiner une politique avant qu’elle n’ait été mise en œuvre. Le marché impose ici une discipline juste et nécessaire, qu’il faut conserver. L’histoire a montré qu’elle était économiquement la plus efficace.

Toutefois, tout marché doit être régulé, ce qui ne veut pas dire réglementé. Or, il est patent qu’aujourd’hui les marchés financiers internationaux ne le sont pas. Pour limiter leurs errances, il faut décourager le comportement de spéculation.

Avec l’article 419 du code pénal et le règlement 90-04 de la commission des opérations de bourse du 5 juillet 1990, il existe déjà un dispositif répressif sanctionnant la manipulation des cours. La plupart des autres places financières en sont également pourvues. Ce dispositif est toutefois limité : il ne peut par nature intervenir qu’a posteriori et de manière ponctuelle. De plus, il est souvent difficile d’établir le caractère purement spéculatif de certaines opérations.

C’est pourquoi votre Rapporteur est favorable à une solution plus globale du type de celle suggérée dès 1978 par M. James Tobin, de l’université de Yale, et qui consiste à taxer les transactions sur les marchés financiers internationaux. Déjà en 1936, J.M. Keynes soulignait le fait qu’une taxe frappant les transactions pourrait renforcer le rôle des fondamentaux pour la détermination des différents cours, au détriment des anticipations spéculatives de court terme. En effet, la taxation de chaque transaction pénaliserait d’autant plus que les entrées sur le marché seraient courtes. Elle représenterait en revanche une quantité négligeable dans la prise de décision concernant des investissements à long terme.

Cette taxe ne pourrait être instituée qu’à une échelle internationale car l’initiative isolée d’un pays serait à la fois inefficace et nuisible à sa propre économie. M. James Tobin suggère que cette taxe soit instaurée et gérée dans le cadre de la banque des règlements internationaux ou du fonds monétaire international.

Quant au produit de la taxe, il pourrait constituer une ressource nouvelle et substantielle pour les Etats concernés.

Dans le même esprit, pour éviter l’importante spéculation qui sévira de manière croissante à l’approche de la monnaie unique, M. Barry Eichengreen, un autre économiste, propose de protéger les devises en soumettant à une taxe ou un dépôt obligatoire tous les prêts accordés aux non résidents libellés en monnaie nationale.

Il serait judicieux que les services financiers de l’Etat étudient de telles propositions et prennent les initiatives nécessaires dans les instances internationales. Il est en effet urgent d’innover en la matière si l’on veut redonner leur sens aux marchés financiers et en finir avec leur interventionnisme sur les politiques monétaires nationales. Les investisseurs s’engageraient avec plus de sérieux et d’à-propos économique dans leurs opérations. Les marchés ne joueraient plus que leur propre rôle et les nations retrouveraient la souveraineté de leurs économies.

En conclusion, il sera édifiant de lire les déclarations récentes qu’a faites M. George Soros, en forme d’aveu(7). Il affirme en effet être « choqué » par l’argent qu’il gagne : « Si par moralité on entend tout ce qui contribue au bien-être général, j'admets que la spéculation est sinon immorale, du moins amorale, car le seul but du spéculateur est de s’enrichir personnellement et non d’enrichir la société ».

S’il se justifie d’agir pourtant en toute légalité, il insiste sur le besoin de modifier cette légalité dans un sens restrictif : « Si des gens comme moi peuvent faire chuter des gouvernements, c’est qu’il y a quelque chose de détraqué dans le système ! ». Il ajoute : « Mon expérience des marchés m'a montré qu’ils tendaient aussi souvent vers le déséquilibre [que vers l’équilibre]. Si l’on ne prend pas de mesures pour les stabiliser, il y aura de graves accidents ».

 

(1)    d'après les 65ème et 66ème rapports annuels de la Banque des règlements internationaux (retour au texte)

(2)    Le marché secondaire est celui où s'échangent des titres qui ont déjà été acquis une fois. Le montant total des transactions y a été de 32.4DO milliards de dollars en JP95. Le marché primaire est celui de la création des actifs. (retour au texte)

(3)    M. Charles Kindleberger est auteur de l’Histoire mondiale de la spéculation financière, éd. P.A. U., 1994. (retour au texte)

(4)    Table ronde sur le thème de la spéculation financière organisée le 25 février 1994 par l’Association d’économie financière. (retour au texte)

(5)    La spéculation peut gagner jusqu’aux banques centrales. Ce serait le cas, peu vérifiable, de la banque centrale de Malaysia (Rapport moral sur l'agent dans le monde, 1995, page 140). (retour au texte)

(6)    Cours boursiers en 1987, cours du dollar en 1988, marché obligataire en l993 et 1994. (retour au texte)

(7)    L'Express, le 24 octobre l996. Voir également « Le Défi de l'argent », par M. George Soros, paru le 30 octobre 1996. (retour au texte)

 

 

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