Article paru dans le Monde du 27 janvier 1998


Mobilisation dans plusieurs établissements scolaires à la suite de violences et
d'agressions
 

 
DEPUIS quinze jours, des mouvements de grève d'enseignants se multiplient dans la banlieue parisienne
pour dénoncer des actes de violence. Dans six établissements scolaires collège Jean-Vigo d'Epinay-sur-
Seine (Seine-Saint-Denis), collège Elsa-Triolet de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), lycée professionnel
Pierre- Mendès-France de Ris-Orangis (Essonne), collège Pablo-Neruda de Grigny (Essonne), lycée
Romain-Rolland de Goussainville (Val-d'Oise), collège Louise-Michel de Clichy- sous-Bois (Seine-Saint-
Denis) , des membres du personnel ou des élèves ont été victimes d'agressions souvent dues à l'intrusion de
personnes extérieures munies de couteaux ou de battes de base-ball.
A chaque fois, ces événements sont perçus par les enseignants comme " un nouveau cran franchi " sur
une échelle de violences quotidiennes. Dans ces établissements, les mêmes revendications reviennent
comme un leimotiv : classement en zone sensible ou en zone d'éducation prioritaire (ZEP), création de
postes de surveillants, de conseillers principaux d'éducation (CPE), d'infirmières, etc. Tous réclament " des
moyens supplémentaires pour faire face à la violence ".
En grève depuis le jeudi 22 janvier, l'ensemble des enseignants, des surveillants et des personnels de
service du collège Louise-Michel de Clichy-sous-Bois soutenus par des parents d'élèves considèrent que
la sécurité n'est plus assurée dans leur établissement. Lundi 19 janvier, six jeunes se sont introduits dans le
collège et ont blessé deux élèves âgés de treize et quinze ans. Le lendemain, une enseignante, une jeune fille
en emploi- jeune et un surveillant ont été frappés par des élèves alors qu'ils tentaient d'arrêter des bagarres.
" TROP D'ÉLÈVES PAR CLASSE "
" Notre collège, prévu à l'origine pour huit cents enfants, en accueille aujourd'hui 1 200. Avec de tels
effectifs, le moindre incident prend d'énormes proportions. Nous demandons des moyens exceptionnels en
attendant qu'un troisième collège soit construit à Clichy ", explique un professeur, qui évoque " une fatigue
et une nervosité permanentes ". Sénia, élève de troisième, parle de " la cour et le réfectoire où l'on se
marche dessus, le préau trop petit surtout quand il pleut , la violence verbale " et regrette qu'il y ait " trop
d'élèves par classe ".
Les enseignants insistent sur " les bons rapports " qu'ils ont avec leurs élèves, hormis " une minorité
d'entre eux qui profitent du moindre incident pour se défouler ". " Nous ne faisons pas grève contre les
élèves mais pour réclamer un meilleur encadrement ", souligne un professeur. " La Seine-Saint-Denis est
un département sinistré. Nous avons l'impression d'être abandonnés ", se révolte la mère d'un élève. " Il
faut tout le temps se bagarrer pour réclamer des choses qui tombent sous le sens ", affirme-t-elle, tout en
dénonçant " l'affectation d'emplois-jeunes sans formation pour résoudre les problèmes de violence ".
N'ayant pas obtenu satisfaction à la suite d'un rendez-vous à l'inspection académique, les enseignants du
collège Louise-Michel demandent à être reçus au ministère de l'éducation nationale. Leur revendication
tient en une phrase : " Il faut une volonté politique pour que l'argent soit mis là où il y en a le plus besoin. "
SANDRINE BLANCHARD
 

© Le Monde 1998

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